Europe : le scandale des manifestations des dockers à Strasbourg

par Daniel RIOT
mercredi 18 janvier 2006

De l’art de manifester : la grande bêtise des « dockers »... Avec le recul, il y a de quoi s’inquiéter... Les dockers, dans leur euro-grève et dans leur euro-manifestation, ont fait preuve d’une irresponsabilité grave et révélatrice...

Les « incidents » de Strasbourg n’ont rien de surprenant. Le matin, avant le début de la « manif », deux signes annonçaient tout... J’ai vu des « dockers » acheter des packs de bières dans un supermarché du centre ville. Avec de l’argent, mais aussi avec des cris... Un membre de l’équipe de Relatio s’est fait agresser dans sa voiture par des dockers, avant le rendez-vous des manifestants, d’une façon inadmissible... Seule une intervention de la police a pu le « dégager », alors qu’il ne demandait rien à personne...

Il suffisait de « respirer l’air de Strasbourg » le matin, pour savoir qu’aux revendications légitimes de métiers qui se sentent en péril s’ajouteraient, dans l’après-midi, un goût du « défoulement », une « envie de casser », un besoin de « jouer les hooligans »... Et une imbécile volonté de « tout casser » pour se sentir exister. Nihilisme ? Pas même. Anarchisme ? Pas même. Imbécillité crasse. Et délinquance. La bêtise et la bière n’ont jamais constitué une « circonstance atténuante ». Qui plus est, cette colère artificiellement gonflée ne se justifiait en rien : la directive contestée n’a aucune chance d’être adoptée. La seule anomalie, c’est qu’elle ait pu être ressuscité par des lobbies malins, qui savent utiliser les faiblesses d’un système trop bureaucratique, qu’on ne combat pas à coups de pétards, mais d’arguments...

Les syndicats organisateurs peuvent exprimer tous les « regrets » qu’ils veulent ou peuvent : une corporation s’est disqualifiée. Et l’ensemble des « gros bras » de nos quais s’est disqualifié en brisant des vitrines et des matériels urbains, en défiant les forces de l’ordre, comme des gamins l’autorité, en jouant les provocateurs devant le Parlement européen.

Les attaques contre l’immeuble du Parlement sont évidemment les plus graves, parce qu’elles ont une portée symbolique. Là, « on » ne s’attaque pas aux « horribles capitalistes », aux « ultra-libéralistes », aux « élites », aux « technocrates » : on s’en prend aux élus des peuples européens et au Parlement qui, tous comptes faits, est sans aucun doute, actuellement, l’assemblée élue d’Europe la plus soucieuse des aspects sociaux des politiques à mener. Un comble.

Le problème de fond, c’est que ces syndiqués-là, qui ont tout de même de puissants moyens d’actions, ne font que pousser jusqu’au bout la logique de celles et de ceux qui depuis des années considèrent « l’Europe » comme un bouc émissaire facile, et non comme une chance et la plus belle des aventures politiques, économiques et culturelles de ce temps...

Les non français et néerlandais au projet de traité constitutionnel ont eu les mêmes raisons. Manque de pédagogie, manque de courage, manque de « transparence », manque de cohérence. Et manque de maturité démocratique de « peuples » qui se font « masses » et « foules », encouragés par des responsable politiques, syndicaux, et autres, qui trichent avec les faits et les réalités pour mieux « percer » dans les sondages. Pour mieux exploiter ce que René Girard appelle le « mimétisme de masse », et cet « individualisme possessif de masse » si caractéristique de ce début du XXIe siècle...

La « directive docker », stupide et déjà enterrée en 2003, ne nécessitait nullement ces démonstrations d’imbécillité de masse pour être rejetée. Même si une majorité du Parlement européen l’acceptait, les Etats la refuseraient. Kafka pas mort : dans l’absurde, « on » peut encore mieux faire. En février contre la directive « sur les services » ? Les manifestations s’annoncent plus grandes encore. Puissent-elles être moins bêtes... La doxocratie n’est pas la démocratie. Et la violence des rues ne mène à rien, dans nos démocraties.


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