Fabuleuse découverte d’une tombe princière celte à Troyes. Art grec, étrusque, ou art de Gergovie ?
par Emile Mourey
vendredi 6 mars 2015
Bravo à l'Inrap ! " On ne peut que se joindre à Manuel Valls pour féliciter les archéologues qui viennent de mettre au jour cette tombe absolument extraordinaire. Les fouilles sont toujours en cours. Un état de conservation exceptionnel, un riche mobilier, un chaudron en bronze d'un mètre de diamètre, une cruche à vin (oenochoé) en céramique à figures noires. "Des découvertes comme celles-là, on n'est pas prêts d'en faire avant 20 ou 30 ans", s'enthousiasme un archéologue.
http://www.lexpress.fr/actualite/sciences/la-stupefiante-tombe-princiere-celte-de-lavau_1657993.html
Faut-il y voir une variante du dieu Cernunnos plus habituellement représenté dans le symbole du cerf ? Le cerf est l'animal le plus intelligent, le plus rusé pour échapper au chasseur. De tous les gibiers, il est le plus noble mais aussi le plus mystérieux, apparaissant soudain au milieu des fourrés, puis disparaissant. Dans le chaudron de Gundestrup, l'homme sage s'est représenté dans la position d'un boudha. Il se trouve face à un choix : celui du
Mais ici, à Lavau, près de Troyes, c'est le symbole du taureau qui a été choisi, ce qui paraît assez logique puisqu'il s'agit manifestement de la tombe d'un chef militaire. Le taureau est l'animal le plus terrifiant qui soit quand il charge. Nul doute que le guerrier de la sépulture s'identifiait à ce symbole quand il chargeait à la tête de ses troupes. Voici ci-dessous, en image semblable, le dieu barbu de Lezoux à oreilles et à cornes de taureau, très bel objet, lui aussi en bronze. Lezoux est le site arverne le plus riche en poteries, notamment décoratives.
Le bord du vase est décoré de têtes de lions ou de lionceaux, symboles du courage militaire (ci-dessous, à droite). Ces têtes de lions sont semblables à celles des chapiteaux de Mont-Saint-Vincent, là où je situe Bibracte, la capitale des Éduens. Le lion est aussi présent dans les chapiteaux du Crest, là où je situe Gergovie.
Les Gaulois ne veulent aller ni dans les tristes royaumes du dieu des profondeurs, ni dans les silencieux séjours de l’Erèbe. Ils disent que le corps-âme vit dans l’autre monde (orbe alio). La mort est une phase intermédiaire avant une longue vie. Et le poète Lucain, auteur de ces lignes, ajoute : Ils sont heureux quand la crainte de la mort, la plus terrible de toutes, les talonne. Ils se ruent au combat, l’esprit plein de courage. Leurs âmes sont prêtes à recevoir la mort. Ils savent que leur récompense sera la revie qui sera refusée au poltron.
Suivant l'usage, une femme, ou des femmes, ont été enterrées vivantes aux abords de la chambre funéraire pour accompagner le défunt dans son long voyage.
Victime de l'esprit du sacrifice et du devoir civique, le taureau-guerrier est mort, soit au combat, soit d'épuisement, soit de vieillesse, mais il laissera éternellement dans la mémoire de la cité le souvenir vivant du dévouement, image du chien fidèle (en haut).
Son exemple glorieux engendrera d'autres dévouements, d'autres fidélités embryonnaires, puis grandissantes (en bas).
Symbole de la défense, les cornes du taureau mort sont tombées, mais au jeune taureau/guerrier que carapaçonne une armure articulée de fer, de nouvelles cornes poussent.
Les cratères sont la splendeur de l'art des Arvernes. Au cours de leurs expéditions en centre Europe depuis leur base de Heunebourg, il arrive forcément qu'ils perdent quelques chefs. Car c'est bien un chef prestigieux, véritable Hercule d'1m87, qu'ils ont enterré dans la célèbre tombe de Hochdorf, avec son char de prestige. Dans leurs expéditions vers l'Italie, ils ont mêlé leur art à un art étrusque. Ils ont semé tout au long de leur passage des morceaux de cratère. Au mont Lassois, ils ont marié une de leurs princesses au chef d'une tribu voisine, celle des Lingons, et c'est un cratère qui a scellé l'alliance, le fameux vase de Vix.
Conformément au rituel de la libation antique, elle tient dans sa main droite, la phialle pacifique d'offrande. Dans la main gauche, elle offre le vin mystique de son cratère. Décorant les deux anses du vase, voici, là encore, Gergovie, mais cette fois dans son aspect terrifiant et guerrier. Ses bras sont soutenus par des serpents au venin redoutable qu'accompagne, en retrait, le lion symbole du courage militaire. Ses deux jambes
La Gorgone est née du cratère de même que la Salamandre est née des volcans d'Auvergne.
Pourquoi refuser à la Gaule ce que les historiens accordent pourtant aux autres régions du monde ? Du X ème siècle au VI ème avant J.C., n'y a-t-il pas là une logique d'évolution depuis Gergovie jusqu'à Troyes, et au-delà ? Sans oublier la logique militaire qui ne peut expliquer les grandes expéditions celtes qui vont suivre que par l'existence d'armées constituées. Reste, il est vrai, le mystère de l'absence de documents écrits qu'ils auraient pu nous laisser.
570 ans avant J.C., au VI ème siècle, Platon n'avait-il pas raison, dans son Atlantide, de souligner le haut degré d'évolution des Atlantes... de Gergovie ?
Honneur à toi, cité de Gergovie !