Fleur Pellerin : Héroïne de Modiano, ou compagne de OSS 117 ?

par bakerstreet
mercredi 26 novembre 2014

« Rue des boutiques obscures »,

C'est le nom d'un des premiers romans de Modiano. Le héros, ancien détective, devenu amnésique, y cherche sa propre identité.

 

On ne présente plus le style modianesque, fait d'une fausse simplicité de style qui ne retire rien, à son envergure et à sa qualité.

Quelques musiciens eux aussi, sont parfois parvenus à cette grâce.

Ou alors des peintres, comme Marquet, qui semble si facile d’exécution.

Et pourtant, on se demande comment ils parviennent, par la magie d'un simple lavis, et de quelques touches fugaces, à faire s'ouvrir ainsi le ciel.

Couronné par le prix Nobel dernièrement, bien des gens ont été sensibilisé à cet auteur pudique et attachant, tout comme ils ont découvert pour cette occasion notre ministre de la culture, semblant avoir elle même découvert Patrick Modiano !

 

Fleur Pellerin, ministre de la culture, s'est en effet distinguée, quand elle a confessé au cours d'une interview, être incapable de donner un seul titre de roman de cet auteur faisant alors la une de la littérature mondiale. 

Dans cette valse à trois temps, faisant danser des poupées gigognes autour du vide, Fleur Pellerin ne serait-elle pas sans le savoir un personnage de Modiano ?

 

Les romans de Modiano sont une sorte de catharsis de sa propre enfance. Ils sont bourrés de ces jeunes gens fragiles, qui lui ont ressemblé, jadis.

Ballotté par les événements, passant d'une pension à l'autre durant son enfance, Patrick Modiano est issue d'une époque trouble, la guerre et ses réseaux, et de parents aventuriers, et artistes, vivants dans un monde interlope, où les combines étaient courantes, tout comme les gens de passage.

https://www.google.fr/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=1&cad=rja&uact=8&ved=0CCEQFjAA&url=http%3A%2F%2Ffr.wikipedia.org%2Fwiki%2FPatrick_Modiano&ei=v5B0VJL1PJDbatbMgJgD&usg=AFQjCNEC8JLnURxmxcT-3FNTa5MGQcx4lQ&sig2=NQxBT0kbY20C0i6bq-BH6g&bvm=bv.80185997,d.d2s

C'est tout cet univers, qu'il met et remet inlassablement en tableaux obsessionnels, avec quelques digressions, jouées au clavier bien tempéré.

 

On y retrouve toujours les même thèmes : L'absence, la disparition, la recherche identitaire, la trahison de personnages qui ont compté, l'impuissance à comprendre l'histoire et ses désordres. Les héros se situent toujours comme lui-même, en observateur d'une histoire qui les dépasse, mais pourtant les fascine.

 

Fleur Pellerin, femme au parcours indiscutablement brillant, a pour le moins elle aussi un passé « difficile ».

En lui même, on peut considérer c'est une forme de revanche sur la vie, une illustration de ce que l'on nomme « la résilience ». Cette capacité à réussir à se développer positivement, en dépit d'un stress ou d'un d'une adversité préalablement défavorable. "

 

Abandonnée dans les rues de Séoul trois ou quatre jours après sa naissance, envoyée en orphelinat, elle sera adoptée à l'age de six mois par une famille française.

La suite sera infiniment plus limpide.

 

Néanmoins, comment ne pourrait-elle pas se poser elle aussi des questions sur son passé, et ses origines ?

Il n'est pas absurde de penser que l'impasse qu'elle a fait sur Modiano était un acte manqué. Peut-être bien que ce genre de roman « lui tombe des mains », car abordant un sujet qu'elle répugne inconsciemment à aborder.

Ce genre d’œuvre ne fait elle pas réminiscence douloureuse, dans le sens qu'elle apporte plus de questions, qu'elle ne donne de réponses.

On pourra gausser à l'infini sur sa « bêtise », et sur son « inculture », quand elle déclarera pour sa défense ne pas avoir le temps de lire. 

Si c'était le cas, son parcours étonnamment brillant, à plus d'un titre, démontre pourtant le contraire.

Bien sûr : « Pas le temps de lire ! », cela veut dire qu'elle se réserve pour les choses importantes ! 

Au risque de faire croire que la littérature pour elle ne l'est pas. ... »

Un peu fâcheux pour une ministre de la culture.

 

Tant pis, c'est dit... Elle ne nous en dira pas plus. Cette déclaration, sommaire, peut-être vue comme inhérente à volonté de couper court !

Ne préfère-t-elle pas aller de l'avant, comme elle l'a toujours fait, passant du statut de bonne élève à celui de ministre, dans un parcours qu'on peut qualifier de hors norme ?

 

Ce n'est pas une fleur qui s'oublie en songes inutiles sur les floraisons perdues !

« A l'ombre des jeunes filles... » ne semblent pas être sa tasse de thé... Mais ne vaut-il pas mieux confesser son ignorance que dire des conneries ? C'est une chose rare en politique ou l’esbroufe et l'assurance feinte semblent être les marques dominantes. 

En écrivant cela, je pense à un autre homme politique, qui s'était un jour hasardé à parler littérature.

Pas la peine de le nommer. Vous le connaissez bien sûr.

C'était en 2006 :

"L'autre jour, je m'amusais - on s'amuse comme on peut - à regarder le programme du concours d'attaché d'administration. Un sadique ou un imbécile avait mis dans le programme d'interroger les concurrents sur La Princesse de Clèves. Je ne sais pas si cela vous est arrivé de demander à la guichetière ce qu'elle pensait de La Princesse de Clèves.

Imaginez un peu le spectacle !" 

 

C'est drôle, les personnages de la vie sur lesquels on écrit. Ils obéissent un peu à la même loi que ceux des romans. Ils finissent par vous imposer leur propre histoire, à votre corps défendant.

Voyez le vieux Tolstoï, qui détestait cette Anna Karénine, le symbole même de la vanité, de la superficialité et de la décadence, et qui en tombe de plus en plus amoureux, au fil des pages !

 

Bouvard et Pécuchet, ces deux personnages attachants du roman de Flaubert, parviennent eux aussi à retourner le roman du dessein premier de l'auteur. Celui-ci voulaient faire à travers leurs aventures, l'illustration de la bêtise humaine. Mais curieusement, ils apparaissent plutôt l'expression d' esprits curieux et libres, jamais découragés par leurs échecs. 

 

« A l'insu de mon plein gré ».

Formule maintenant célèbre du non moins fameux Richard Virenque !

Ce coureur cycliste confondu par un contrôle antidopage sur le tour de France, a nié farouchement son implication volontaire. Il reste l'auteur de ce lapsus qui après avoir fait rigoler toute la france, fait long feu.

Virenque dure en version littéraire bien plus longtemps que n'a duré sa carrière sportive. Comme quoi les écrivains n'ont pas le monopole de la citation, pas plus que les politiques n'ont celui du cœur.

 

Et nous voilà revenu dans notre cabinet ministériel !

 Revenons à nos moutons, ou nos bœufs comme aurait dit De Gaulle.

Ministre de la culture, on ne vous laisse rien passer !

C'est pour ça que le grand Charles y avait mis Malraux, un poste taillé sur mesures. On ne comprenait rien à ce que disait Malraux, qui faisait de grands gestes, qui caricaturait la condition humaine, et parlait de la grandeur de la France !

Mais il vous saisissait, et même les pacifistes avaient la larme à l'oeil à l'entendre !

 

Difficile de rentrer dans le costard de Malraux, ou même de celui de Jack Lang, inventeur de la fête de la musique. 

La culture c'est pas si cool que ça !

La preuve : C'est un milieu assassin où la moindre faute d'orthographe vous fait dévisser. 

 

La planque c'est bien connu, c'est d'être aux anciens combattants.

Quelques dates phares suffisent à l'affaire !

Savoir faire le garde à vous, ne pas confondre Pétain et De Gaulle, ne pas penser que le soldat inconnu à son double au musée Grévin, être disponible le 11 novembre et le 8 Mai.

Le cahier des charges est moins exigeant à porter que le barda d'un poilu de 14 !. Malgré cela, certains parviennent à se prendre les pieds dans les tapis du ministère en les revendant à leurs proches.

Les gens sont remontés, forcément avec toutes ces affaires qui commencent à fleurer le bon Modiano de derrière les fagots !

 

Tant de messieurs intrigants, louches au possible, composant leur légende sulfureuse, comme ceux de « la petite bande ». Il évoluent dans un café perdu et louche, ou entrent et sortent des personnages équivoques et matois, vaguant à leurs petites affaires, s'en foutant plein les poches.

 

« Les affaires », comme on dit, benoîtement, n'ont rien à voir avec les bonnes affaires, celles dont on peu s’enorgueillir, et faire remonter le PIB du pays.

Une série TV faites de tant d'épisodes, de mensonges et d'hypocrisie assassines, qu'elle se rapproche de plus en plus de celle des « sopranos » famille de maffieux italo-américaine.

Moi, je vois bien Strauss-Khan du tonnerre de dieu dans la distribution, prenant les jeunes gens sous sa coupe, les encourageant, leur donnant du « mon petit » !

Et je vous donne du Cahuzac avec son attaché case, un monsieur pourtant si élégant, si honorable, jamais avare de conseils, pronant l'intégrité, la mesure.... !

Et voilà Thévenoud, apparaissant dans la saison, 2, très drôle, en phobique de l'administratif, un numéro de clown qu'on ne connaissait pas.

Mais il n'a pas le temps de nous en dire plus, tant il est toujours pressé, filant entre deux promesses, deux portes qui claquent.

 

Je me tais, on en finirait pas. Cela rappelle "la nausée" de Sartre !. Il suffit de lire les journaux, qui pourtant endiguent comme ils peuvent ! 

Modiano est aussi un écrivain furieusement contemporain. On aurait tort de le circonscrire aux années troubles. Fleur Pellerin se trompe sur son compte. Ce type est un visionnaire.

Il faut l'avoir lu ! L'avenir semble un long passé.

 

Petite pastiche de Modiano :

 

                       Chapitre 1

…. « Au café de Flore on trouvait d’autres habitués, en particulier ce monsieur Jean Paul, accompagnée d’une certaine Simone, à l’élégance aristocratique, mais que l’on disait pourtant « de gauche » !

« Le troisième sexe » était sorti. Un nom improbable pour un titre de roman.

Elle avait beau compter et recompter. Fleur n’en trouvait toujours que deux, mais préférait garder ça pour elle, de peur qu’on la trouve « cruche » ! De toute façon, elle ne l’avait pas lu encore, et aurait été bien embêtée si on lui avait demandé ce qu’elle en pensait. 

Elle aurait bien demandé à monsieur Malraux, si elle avait osé. 

Mais il l’intimidait bien trop ! Pourquoi ne parlaient ils pas de « la princesse de Clèves », un livre qu’elle avait lu pour le bac, et dont elle avait partagé les tourments de l’héroïne.

 

Simone se faisait aussi appelé « le castor », par le premier cercle d’amis, les plus proches, ceux de « la rive gauche », précisément.

 Elle l’avait vu au bras de son amant américain, un type roulant en aronde décapotable rouge, et mâchant sans cesse un chewing-gum ! 

Elle s’était senti très sotte, à l’arrière de la voiture, alors que ses cheveux volaient au vent, après qu’ils l’aient invité à monter avec eux.

« Allez, ne soyez pas timide ! »

 

 Ils roulaient maintenant à vive allure vers l’arc de triomphe, la place de l’étoile . 

Il s’était retourné vers elle, et lui avait demandé brusquement :

« How are you, miss ? »

« Ca va, avait-elle dit. 

« Savez vous que vous êtes intéressante ? Je suis sûr que vous avez plus d'un secret ! En tout cas, vous êtes promise à un brillant avenir ! »

Elle s’était sentie bête, comme il la regardait, de façon un peu appuyée, dans le rétroviseur.

« C'est drôle, vous vous appelez vous aussi Flore, comme ce café ! C’est marrant comme concordance, non ? 

Mais il vaut mieux s'appeler « Flore » que « deux magots » ! »

« Mon nom c'est Fleur, pas Flore. Mais il ne semblait ne pas entendre ! »

 

Elle avait sorti son miroir de poche, pour se refaire une beauté, allongeant ses longs cils d'un trait de rimmel.

.

« Vous venez de Chine, vous aussi, comme Marguerite Duras ? »

.....Bien sûr, elle n’avait pas osé demander qui était cette Marguerite Duras.....Une écrivain, une artiste, rive gauche, ou droite....

Un jour il lui faudrait choisir entre les deux cotés. Elle sentait vaguement qu’on se moquait d’elle, et aurait voulu être ailleurs, peut être en mer de chine... ».

 « Moi, j’aime bien les Chinoises, je les trouve très intelligentes, pas comme les parisiennes... ! »

« Le castor » a coté de lui, la tête enveloppée dans son foulard, s’était contentée de hausser les épaules, et de soupirer....

Elle avait rougi, et n’avait su que répondre. 

Une fois de plus.

 

Elle aurait voulu disparaître, comme un castor dans son trou, ou alors dans le coffre de l'aronde.

Heureusement, elle n’était pas ministre de la culture.

 

--------------------------

 

Mais après tout,est-ce si grave de ne pas avoir lu monsieur Modiano , même en étant ministre de la culture ?

Lui-même d'ailleurs, fidèle à son image, semblera le premier surpris de sa nomination, se demandant si une fois de plus, cela n'était pas une erreur, attendant qu'on lui donne des explications, presque en colère.

« Il lui semblait avoir rencontré quelque part ce type qui venait de décrocher le Nobel. Mais au bout du compte, plus il y pensait, plus il doutait de ses impressions ! Ce type n'était-il pas un habitué de la rame de métro qu'il prenait à « Kremlin-Bicètres », et dont il voyait chaque matin le visage dans la vitre se superposant au sien ? »

---------------------------

 :https://www.google.fr/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=newssearch&cd=1&cad=rja&uact=8&sqi=2&ved=0CCMQ-AsoATAA&url=http%3A%2F%2Fwww.lexpress.fr%2Factualite%2Fpolitique%2Fvideo-fleur-pellerin-reclame-un-role-dans-oss-117-a-son-realisateur-gene_1624913.html&ei=huhzVJ6jKNbiasrwgYAG&usg=AFQjCNGVw2I1q22bUb_fQUmFyIRa58RFbw&sig2=MkVeoegV6xYSYDhi1yHh1g

 

Retour au pastiche, après ce nouvel épisode « culturel », ou Fleur avoue au cinéaste Michel Hazanavicuis son envie de tourner dans un « OSS 117 »...

 

                   Chapitre 2

 

Ce rendez vous dans ce petit café de Montparnasse n'était-il pas un « lapin », comme lui avait fait comprendre madame Thérioux, sa concierge, qui lui avait tendu son courrier alors qu'elle sortait ?

« Mais mademoiselle Fleur, voyons ! Vous avez un bon petit travail. Etre fonctionnaire au ministère, c'est quelque chose, tout de même, par les temps qui courent ! Pourquoi vous gâcheriez tout en allant soi disant faire du cinéma ! Moi, à votre place, je me méfierais ! »

Elle avait longtemps cherché le nom de cet homme dans le bottin !

Michel Hazanavicuis existait-il vraiment ?

Un nom un peu improbable elle en convenait.

 

Madame Therioux s'était fait un plaisir de le travestir, inter-changeant les deux dernières syllabes : Vicuis, en vicius...

Pour bien lui mettre "les points sur les i", comme elle disait toujours...

Il existait un Maurice Hazare-Bittolon, rue des petites écuries.

Et puis un Haéhensky, 9 impasse de la butte aux champs, On trouvait aussi un Hazvionabine, et aussi un André Hénaff, qui habitait près de l'Odéon !

Mais aucune trace de ce Michel, que les copains appelaient pour rire OSS 117.

C'est qu'il avait soi-disant déjà fait deux films « d'agent secret » !

 

Une fille un peu ivre, qu'on disait « facile », lui avait susurré à l'oreille qu'il en préparait un troisième, et que déjà, dans le journal « L'éclair », il avait passé une annonce, pour recruter des figurants.

L'idée qu'il est pu utiliser un pseudo ne l'avait pas effleuré.

On lui avait dit qu'elle faisait trop confiance aux gens.

Elle regarda sa montre, un petit bracelet montre qu'elle avait eu pour sa communion. Peut-être avait-il eu une contretemps, lié à une des mystérieuses affaires de production.

Les clients entraient et venaient sans lui jeter un regard.

Sans doute pensaient-ils qu'elle n'était qu’une étrangère, tout juste débarquée de la gare avec sa valise.

 

Elle s'était toujours dit que les choses les plus improbables et les gens les plus extravagants a priori étaient le plus susceptibles d'exister, de secouer l'univers mou qui l'entourait, et que présidait monsieur François, affable, presque normal.

Elle se rappelait de ses paroles, tout en haut des marches de l’Élysée, rassurant, comme un commerçant sur le pas de sa boutique. Juste après l'affaire du prix Nobel.

« Vous verrez mon petit ; c'est le début qui est dur. Après on n'y fait plus attention ! Mais vous devriez sortir. Vous êtes toute pâle.

Si vous voulez, je vous prête mon scooter pour rentrer chez vous ! »

 

Il s'était montré prévenant, onctueux. C'est déjà comme ça, à force de bonhomie, qu'elle avait accepté ce poste, plutôt que celui de standardiste à l'Elysée-Montmartre, bien moins exposé. .

Elle, elle travaillait à" l’Élysée" tout cours !

C'était plus facile à retenir, et aussi pour venir à pied le matin. .

C'est qu'elle était vraiment fâché avec les noms, les lieux.

 

Il fallait qu'elle se rappelle de plein de choses qui ne l’intéressaient absolument pas. Elle avait fait des listes dans son petit carnet vert pour ne plus faire d'impairs. Modiano n'avait rien à voir avec Medrano, le petit cirque de son enfance, où elle allait voir les équilibristes.

Et aussi les fauves.

Ce monde finalement était comme un cirque qui passe !

Les spectateurs se lâchent sur les pauvres clowns, et ne sont pas fâchés, quand un tigre donne un coup de patte au dompteur. 

Elle même n'était elle pas qu'une pauvre ballerine soignant ses pointes, mais se tordant si facilement les chevilles..

 

La pluie s'était mise à couler sur les vitres de l'établissement, son café refroidissait. Elle aurait voulu avoir le talent d'un prestidigitateur pour disparaître, comme ce sucre dans la tasse qui fondait. Et faire apparaître monsieur Michel, et peut être même OSS 117, costaud, large d'épaules, en imposant aux clients !

Le cinéma c'était bien mieux que la vie, la seule forme au fond de vraie culture.

 

Mais c'était pas une chose à dire, avec ce poste qu'elle avait. Elle se ferait encore épingler, comme lors de cette triste affaire du prix Nobel.

Enfin, elle s'en moquait bien, maintenant qu'elle allait partir. 

Elle allait s'envoler avec toute cette joyeuse équipe vers les îles du Pacifique.

Elle s'imaginait, avec un collier de fleurs autour du cou. Jean Dujardin serait encore bien sûr de la partie. Quel rôle lui réserverait-on dans le scenario ?

Il lui avait dit qu'il aimait bien son prénom, qu'il n'y aurait rien a changé de coté.

-Elle fut prise d'un doute. Et si madame Therioux avait raison ?

 

Bien sûr, on lui avait dit de se méfier de ces gens qui prétendaient faire du cinéma. Ils faisaient monter des jeunes filles dans leur grosse berline, avant de partir pied au plancher, vers Passy.

Plus loin même, au delà des boulevards de ceinture.

Qu'en était-il de ces fameuses auditions, se passant dans une villa où dit-on, des choses pas très nettes s'étaient passées pendant la guerre. Certains évoquaient « la traite des blanches ».

Mais tout cela n'était bien sûr qu'une rumeur imbécile !

En tout cas, elle avaiit entière confiance en Jean Dujardin.

 

Encore ce matin, la concierge, un balai à la main, lui avait fait la leçon :

« Vous parlez trop facilement aux inconnus, mademoiselle Fleur !

Vous êtes bien trop franche, Cela pourrait vous causer de la misère. Il faut faire comme les autres. Ne vous laissez pas avoir ! Soyez sur vos gardes ! 

Ne dites pas de paroles en l'air ! Vous savez que vous êtes à Paris, ici ! »

Qui n'avait pas envie d'une vie d'aventures, et aussi « de céder aux sirènes de la renommée » ?

Et puis, autant le dire, cette "petite bande", lui semblait bien plus sympa que l'autre, celle de son ministère, un peu collet monté toujours sur la réserve. Elle s'imaginait déjà sur la photo du casting. Celle prise sur le perron de l'Elysée, faisait vraiment trop "distribution des prix". C'en était "tordant" !

 

Elle n'avait rien contre les fims d'action, bien au contraire même.

C'est ce qu'elle préférait ! Pas le temps de s'ennuyer de penser à des choses tristes, de se prendre la tête entre les mains en pensant au budget ou aux intermitents du spectacle à qui elle ne savait plus que dire. 

 

Déjà petite, elle avait lu toute la série de Fantômette et puis celle du club des cinq.

Mais personne, lors de ce maudit interview, ne lui avait posé des questions sur Annie, Claude, ou le chien Dagobert !

Là, elle les aurait vraiment remis à leur place, tant elle se savait incollable sur les titres ! Quel dommage qu'Enid Blyton n'ait pas eu le prix Nobel !

 

Elle détestait vraiment ce Modiano, et ces aquarelles idiotes, ces rétroviseurs orientés vers le passé glauque, où l'on ne voyait qu'un « thick fog » comme disait Allan.

Allan, c'était l'ami d'OSS, un chic type, qu'on appelait aussi « Tarzan », car il parlait fort, et n'avait pas besoin de porte-voix. 

Tarzan, qui portait toujours une casquette américaine, à longue visière et ajourée, tout comme Cecil B.DeMille, détestait le « hors champ » !

« Des trucs de gonzesses, disait-il ! Moi je met la camera face à l'action. Pas de simagrées ! Rien que du plan large ! »

Elle trouvait qu'il avait bien raison.

 

A quoi ça servait de se vautrer dans le passé, alors que le présent n'avait qu'une hâte, c'était de filer vers l'avenir dans une voiture de sport ?

 

Le patron avait entrepris de répandre de la sciure par terre, avant de se mettre à balayer.

Mais personne ne rentrait dans le café, qui se vidait peu à peu.

 

Il n'était pas trop tard pour reculer.

Les lunettes de soleil lui serviraient pour aller sur la manche, au festival de Deauville, par exemple, où tout de même il y avait des planches.Peut être arriverait-elle à obtenir quelques autographes d'acteurs américains ?

 

La valise était à ses pieds, intacte d'auto collants qu'elle rêvait d'appliquer : « Casino del Valparaiso », ou « Central hôtel, Caracas » .

 

En rentrant bien vite à l’Élysée, personne à la culture, ne s'apercevrait de son absence.

Sur la buée des vitres, elle avait cru écrire le mot magique avec son doigt. : OSS.

Comme une invite !

Mais elle s'était trompée dans l'ordre des lettres, et de dehors, on ne voyait qu'un SOS tremblant et hésitant.

Heureusement pour elle, personne n'avait rien remarqué !

.


Lire l'article complet, et les commentaires