France, Europe vers la faillite écologique et financière ?

par charlesleter
samedi 2 juin 2012

L’empreinte écologique a été adoptée, ces dernières années, par différents organismes (instituts universitaires, instituts de statistiques, organisations internationales..) comme instrument d’évaluation ou comme indicateur de performance des politiques nationales mises en œuvre pour lutter contre le changement climatique et assurer un développement durable.

 Dans ce contexte, plusieurs études statistiques récentes ont souligné l’ampleur croissante du déficit écologique dans un grand nombre de pays, l’empreinte écologique par habitant de ces pays dépassant largement la biocapacité par habitant. Rappelons que l’empreinte écologique convertit en ha (hectares) la consommation d’un territoire en comptant les importations et en déduisant les exportations, l’énergie fossile utilisée est aussi convertie en empreinte. La biocapacité mesure en ha les capacités de production du milieu de façon renouvelable.

Cette tendance est naturellement préoccupante, un développement durable ne pouvant être soutenu que si le déficit est égal à zéro. Tout dépassement, en effet, traduit une surexploitation des ressources renouvelables qui ne peut être rendue possible que par un apport supplémentaire d’énergie fossile et/ou par une exploitation excessive des stocks de ressources renouvelables.

 La grave crise économique et sociale que traversent actuellement, en particulier les pays de l’Union Européenne se caractérise notamment dans la majorité de ces pays par une détérioration importante de leur balance commerciale ainsi que de leur balance de paiements.

 Il nous a paru intéressant d’examiner s’il existait dans ces pays une corrélation étroite, sur une période suffisamment longue pour être représentative, entre le déficit écologique en ha/habitant et le déficit commercial (en milliards €). A cet effet, nous avons examiné de 1997 à 2003 l’évolution de 9 pays européens, dont la France, en comparant d’une part l’évolution dans ces pays de leur déficit écologique et d’autre part, celle de leur déficit commercial.
 
2 Evolution du deficit écologique.

Le tableau ci après traduit l’évolution des 9 principaux pays Européens dont la France de 1997 à 2003. Tous sont en déficit important avec une augmentation en moyenne de +3% par an en moyenne des 9 pays.

Déficit écologique en ha/hab.
 Allemagne :France : Italie : Belgique :Angle :Pays bas :Dan :Grèce :Espagne : Moyenne
1997 -3,4 -1,1 -3,1 -3,8 -3,5 -3,6 -0,7 -2,6 -1,6 -2,7
___________________________________________________________________________________


2003 -2,8 -2,6 -3,1 -4,4 -4,0 -3,6 -2,2 -2,8 -3,6 -3,2 




Le retour à l’équilibre suppose une inflexion et une réduction constante chaque année des facteurs de déséquilibre (démographie, efficacité énergétique de l’économie, PIB, empreinte de l’énergie), ce qui n’est généralement pas le cas aujourd’hui. Ainsi en 2008 le déficit moyen pour ces 9 pays était de 3,94 ha/hab sachant que la méthode de calcul avait été modifiée en 2006, l’énergie nucléaire n’étant plus prise en compte dans le calcul, ce qui a eu pour effet de réduire artificiellement le déficit.

3 Déficit commercial

Les indicateurs examinés sont la balance commerciale qui regroupe les échanges de biens et la balance des paiements qui comprend en plus les services et les transactions financières correspondant au compte courant de chaque pays.

 Déficit commercial en Mrds €(balance commerciale BC et balance paiements BP)
 Allemagne :France : Italie : Belgique :Anglet:Pays Bas :Dan :Grèce :Espagne : TOTAL
BC +67 +15 +43 +7 -26 +16 4,6 -12 -18 +96,6
1997___________________________________________________________________________________
2008 +175 -68 -11 +4 -110 +40 +4 -36 -90 -143 

 Allemagne :France : Italie : Belgique :Anglet :Pays bas :Dan :Grèce : Espagne TOTAL
BP -39 +24 +43 +10 -+4,5 +16 +0,8 -12 +2,5 +49,8
1997___________________________________________________________________________________
2008 +165 -38 -56 -6,5 -26 +23 +4,1 -33 -103 -158
Seuls 4 pays sur 9 en 2008 sont bénéficiaires en BC et 3 sur 9 en BC, alors qu’en 1997 ils étaient 6 sur 9 en BC et 7 sur 9 en BC. Les bilans se sont inversés en une dizaine d’année, avec une augmentation continue des déficits de l’ordre de 6% par an au total.



Le total des déficits en BP sont en 2008 de –38mdrs pour la France et de –70mdrs pour les 9 pays .pour la balance des paiements c’est –68 pour la France et –143 pour les 9 pays. Seuls 3 pays ont une balance positive l’Allemagne, les pays bas et le Danemark alors que 3 pays s’enfoncent dans le déficit l’Espagne(-103),l’Italie( -56), la France (-38).

Analyse des causes
- Allemagne : Ces bons résultats financiers résultent de fortes exportations de biens industriels (machines-outils, automobiles ) notamment vers les pays émergents .
- Pays -Bas : Ils bénéficient du commerce d’importation vers l’Europe avec les grands ports de la mer du Nord.
- Danemark : Le pays possède des réserves de gaz et de pétrole qui lui permettent d’exporter de l’énergie et de profiter de la rente pétrolière.
- Les autres pays subissent la mondialisation par l’ouverture de leurs marchés sans barrières douanières à l’entrée de l’Europe, et sans sources d’énergie internes les importations de produits énergétiques sont considérables. En même temps que l’Empreinte écologique augmente le déficit commercial augmente pour importer l’énergie et faire tourner les machines et l’économie. En outre la dette de ces pays croit pour financer la machine économique.
- Cette situation est de nature à appauvrir tous ces pays à moyen terme et n’est pas durable.

Conclusion

Selon toute probabilité, si l’on se réfère aux statistiques disponibles depuis une dizaine d’années, il existe une corrélation, dans un grand nombre de pays dits industrialisés, entre le déficit de l’empreinte écologique et celui de la balance extérieure (commerciale, paiements). Le modèle économique de ces pays est donc à revoir, sans tarder, car il conduit progressivement à un Krach écologique ; en effet une augmentation continue de la production et de la consommation de certains produits, telle qu’elle est comptabilisée aujourd’hui à travers les échanges commerciaux, va buter sur les limites physiques de la planète. En particulier, les pays industrialisés devront mettre un frein à la tendance actuelle à une surconsommation, notamment dans les secteurs alimentaire et énergétique. Cela passera inévitablement par des mesures visant à modifier, par touches successives, certains modes de consommation. Dans ce contexte, il sera nécessaire de mieux contrôler certains grands lobbies industriels et de les inciter à convertir leurs activités dans des secteurs économiques contribuant à une réduction de l’empreinte écologique (produits renouvelables ou à faible empreinte).


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