Francois Asselineau, Patrick Cohen : complotisme ou obscurantisme ?

par Maurice Bouchon
mardi 21 mars 2017

Il y a une semaine, le journaliste Patrick Cohen diffusait à l'antenne de France-Inter un montage ayant pour but de discréditer François Asselineau (candidat à l'élection présidentielle). La polémique opposant ces deux hommes a suscité relativement peu de réactions chez les journalistes, ni d'ailleurs chez les "spécialistes de la critique des médias". Pourtant, pour quiconque veut bien prendre la peine de la regarder d'un peu plus près, cette polémique se révèle riche en enseignements.

 

Épisode 1 : un auditeur interpelle Patrick Cohen au sujet de la censure qui frappe François Asselineau

Le 06 Mars 2017, un auditeur demande au journaliste de France-Inter Patrick Cohen de faire le bilan des politiques européennes actuellement à l'oeuvre, et l'interpelle sur le fait qu'en 10 ans François Asselineau n'a jamais été invité sur France-Inter.
Patrick Cohen lui répond de façon méprisante : "à moi il ne me manque pas".

 

lien vidéo

 

 

Épisode 2 : François Asselineau mentionne l'exemple Patrick Cohen lors de sa conférence de presse

 
Le 10 Mars 2017, fort des 500 parrainages qu'il vient d'obtenir, François Asselineau donne une conférence de presse pour officialiser sa candidature à l'élection présidentielle.
La journaliste de France-Inter Valérie Letesse interroge François Asselineau au sujet de sa volonté d'assurer "davantage de pluralisme dans les médias". Dans sa réponse, François Asselineau mentionne l'existence de la Charte de Munich de 1971 sur la déontologie du journalisme (dont la journaliste semble avoir oublié l'existence), et il mentionne également l'exemple de Patrick Cohen dont j'ai parlé précédemment.
 

lien vidéo (entre 1h 14m 40s et 1h 20m 45s)

 
 

 

Épisode 3 : Patrick Cohen diffuse un montage visant à discréditer François Asselineau

 
Le 13 Mars 2017 à 7h43, Patrick Cohen diffuse une petite chronique de 2 minutes dans laquelle il commente un montage d'extraits hors-contexte d'interventions de François Asselineau. Son ton ironique et les rires des autres intervenants visent à discréditer le candidat en le faisant passer pour un hurluberlu, justifiant au passage la censure qui lui a été appliquée sur France Inter.

 

lien vidéo

 

 

Les faits

 
Le montage volontairement décousu des extraits sélectionnés par Patrick Cohen peut donner l'impression à un auditeur non-averti que les propos de François Asselineau n'ont aucune justification. Et pourtant, il est intéressant de revenir sur chacune de ses affirmations.
Les sources que je vais donner n'ont évidemment pas pour vocation d'être exhaustives. Mais elles sont en tous cas largement suffisantes pour montrer que les citations d'Asselineau ne peuvent pas être balayées d'un revers de main et méritent discussion. Les liens que je vais donner prouvent donc sans ambiguïté la mauvaise foi manifeste de Patrick Cohen.
 
 

"(...) pour donner tout pouvoir à l'empire Euro-Atlantiste dirigé depuis Washington pour dominer l'univers"

 
source : article Slate

[...] c'est le président François Mitterrand. Au crépuscule de son ultime mandat, il confiait à Georges-Marc Benhamou une observation que le journaliste retranscrirait dans son livre Le dernier Mitterrand :
 
« La France ne le sait pas, mais nous sommes en guerre avec l'Amérique. Oui, une guerre permanente, une guerre vitale, une guerre économique, une guerre sans mort apparemment. Oui, ils sont très durs les Américains, ils sont voraces, ils veulent un pouvoir sans partage sur le monde. C'est une guerre inconnue, une guerre permanente, sans mort apparemment et pourtant une guerre à mort. »

 
 

Zbigniew Brzezinski a été conseiller du président Lyndon Johson de 1966 à 1968, puis conseiller à la sécurité nationale de Jimmy Carter (de 1977 à 1981), et a été à ce titre un artisan majeur de la politique étrangère de Washington. En 2007 il soutient la candidature de Barack Obama. Ce dernier dira de lui que Brzezinski est "one of our most outstanding thinkers".
Il est l'auteur du livre "The Grand Chessboard : American Primacy and Its Geostrategic Imperatives" (1997). Dans cet ouvrage, Brzesinski explique que suite à l'effondrement du bloc soviétique, les Etats-Unis sont desormais la seule super-puissance planétaire, et que pour maintenir cette position de domination mondiale incontestée ils doivent coûte que coûte empêcher l'émergence de tout rival potentiel sur le continent eurasiatique.
Extraits du livre : "The Grand Chessboard"
 

The last decade of the twentieth century has witnessed a tectonic shift in world affairs. For the first time ever, a non-Eurasian power has emerged not only as the key arbiter of Eurasian power relations but also as the world's paramount power. The defeat and collapse of the Soviet Union was the final step in the rapid ascendance of a Western Hemisphere power, the United States, as the sole and, indeed, the first truly global power.
 
[...]
 
it is imperative that no Eurasian challenger emerges, capable of dominating Eurasia and thus also of challenging America.
 
[...]
 
America's global primacy is directly dependent on how long and how effectively its preponderance on the Eurasian continent is sustained.
 
[...]

 
In that context, how America "manages" Eurasia is critical. Eurasia is the globe's largest continent and is geopolitically axial. A power that dominates Eurasia would control two of the world's three most advanced and economically productive regions. A mere glance at the map also suggests that control over Eurasia would almost automatically entail Africa's subordination, rendering the Western Hemisphere and Oceania geopolitically peripheral to the world's central continent see map on page 32). About 75 percent of the world's people live in Eurasia, and most of the world's physical wealth is there as well, both in its enterprises and underneath its soil. Eurasia accounts for about 60 percent of the world's GNP and about three-fourths of the world's known energy resources (see tables on page 33).
 
[...]
 
Two basic steps are thus required :
 * first, to identify the geostrategically dynamic Eurasian states that have the power to cause a potentially important shift in the international distribution of power and to decipher the central external goals of their respective political elites and the likely consequences of their seeking to attain them ; and to pinpoint the geopolitically critical Eurasian states whose location and/or existence have catalytic effects either on the more active geostrategic players or on regional conditions ;
 * second,  to formulate specific U.S. policies to offset, co-opt, and/or control the above, so as to preserve and promote vital U.S. interests, and to conceptualize a more comprehensive geostrategy that establishes on a global scale the interconnection between the more specific U.S. policies.
 
[...]
 
In brief, for the United States, Eurasian geostrategy involves the purposeful management of geostrategically dynamic states and the careful handling of geopolitically catalytic states, in keeping with the twin interests of America in the short-term preservation of its unique global power and in the long-run transformation of it into increasingly institutionalized global cooperation. To put it in a terminology that hearkens back to the more brutal age of ancient empires, the three grand imperatives of imperial geostrategy are to prevent collusion and maintain security dependence among the vassals, to keep tributaries pliant and protected, and to keep the barbarians from coming together.
 
[...]
 
Moreover, as America becomes an increasingly multicultural society, it may find it more difficult to fashion a consensus on foreign policy issues, except in the circumstances of a truly massive and widely perceived direct external threat.

 
 
 

"Les pères de la construction européenne ont été financés par la CIA"
"L'euro est une invention américaine"

source : article Daily Telegraph (voir traduction)

DECLASSIFIED American government documents show that the US intelligence community ran a campaign in the Fifties and Sixties to build momentum for a united Europe. It funded and directed the European federalist movement.

The documents confirm suspicions voiced at the time that America was working aggressively behind the scenes to push Britain into a European state. One memorandum, dated July 26, 1950, gives instructions for a campaign to promote a fully fledged European parliament. It is signed by Gen William J Donovan, head of the American wartime Office of Strategic Services, precursor of the CIA.

The documents were found by Joshua Paul, a researcher at Georgetown University in Washington. They include files released by the US National Archives. Washington's main tool for shaping the European agenda was the American Committee for a United Europe, created in 1948. The chairman was Donovan, ostensibly a private lawyer by then.

The vice-chairman was Allen Dulles, the CIA director in the Fifties. The board included Walter Bedell Smith, the CIA's first director, and a roster of ex-OSS figures and officials who moved in and out of the CIA. The documents show that ACUE financed the European Movement, the most important federalist organisation in the post-war years. In 1958, for example, it provided 53.5 per cent of the movement's funds.

The European Youth Campaign, an arm of the European Movement, was wholly funded and controlled by Washington. The Belgian director, Baron Boel, received monthly payments into a special account. When the head of the European Movement, Polish-born Joseph Retinger, bridled at this degree of American control and tried to raise money in Europe, he was quickly reprimanded.

The leaders of the European Movement - Retinger, the visionary Robert Schuman and the former Belgian prime minister Paul-Henri Spaak - were all treated as hired hands by their American sponsors. The US role was handled as a covert operation. ACUE's funding came from the Ford and Rockefeller foundations as well as business groups with close ties to the US government.

The head of the Ford Foundation, ex-OSS officer Paul Hoffman, doubled as head of ACUE in the late Fifties. The State Department also played a role. A memo from the European section, dated June 11, 1965, advises the vice-president of the European Economic Community, Robert Marjolin, to pursue monetary union by stealth.
It recommends suppressing debate until the point at which "adoption of such proposals would become virtually inescapable".

 
Pour aller plus loin, voir également ces quelques liens :

 

"Daesh et Al-Quaida ont été créés par les États-Unis"

source : Hillary Clinton
Hillary Clinton reconnait que les Etats-Unis ont créé Al-Quaida (voir extrait video), ce qui est de notoriété publique.
 
source : article Daily Express

'CIA created ISIS', says Julian Assange as Wikileaks releases 500k US cables

 

source : COMPTES RENDUS DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ETRANGERES, DE LA DEFENSE ET DES FORCES ARMEES

le 17 décembre 2014, Débat en séance publique sur la prolongation de l'opération Chammal en Irak - Audition du Général de division (r) Vincent Desportes, professeur associé à Sciences Po Paris

[...]

Daech dispose d'équipements militaires nombreux, rustiques mais aussi lourds et sophistiqués. Plus que d'une mouvance terroriste, nous sommes confrontés à une véritable armée encadrée par des militaires professionnels.

Quel est le docteur Frankenstein qui a créé ce monstre ? Affirmons-le clairement, parce que cela a des conséquences : ce sont les Etats-Unis. Par intérêt politique à court terme, d'autres acteurs - dont certains s'affichent en amis de l'Occident - d'autres acteurs donc, par complaisance ou par volonté délibérée, ont contribué à cette construction et à son renforcement. Mais les premiers responsables sont les Etats-Unis.

 
 

 

"Si nous avons procédé à l'élargissement des pays de l'est, c'est parce que les Etats-Unis l'ont exigé"

source : The Brookings Institution

For all the differences between the foreign policies of the Bush administration and the Clinton administration, policy toward NATO enlargement has been one area of significant continuity. The core of the Clinton strategy was to promote peace and stability on the European continent through the integration of the new Central and Eastern European democracies into a wider Euro-Atlantic community, in which the United States would remain deeply engaged. A revitalized NATO was an important tool for the maintenance of American engagement and leadership, and its expansion to the new democracies—especially given the delays in their efforts to join the European Union (EU)—was a key part of the strategy.

 
source : Libération

George Bush en visite en Pologne.
Il est favorable à l'extension de l'UE et de l'Otan à l'est.
[...]
Dans son discours, M. Bush s'est livré à un vibrant plaidoyer pour l'élargissement des deux grandes institutions européennes : l'Otan et l'UE. « Mon gouvernement estime que l'Otan doit s'élargir. Nous pensons que personne ne doit être exclu en raison de l'histoire ou de sa géographie. Nous pensons qu'aucun pays ne doit avoir un droit de veto sur qui est accepté » dans l'Alliance, a dit le Président faisant allusion à la Russie, opposée à l'entrée dans l'Otan de tout pays de l'ex-URSS.

 

source : American Presidency Project (APP), discours de G. W. Bush 15th june 2001

All of Europe's new democracies, from the Baltic to the Black Sea and all that lie between, should have the same chance for security and freedom—and the same chance to join the institutions of Europe— as Europe's old democracies have.

 

 

"L'objectif des redécoupages territoriaux, avoir la même granulométrie que les États-Unis d'Amérique"

La remise en contexte de ces déclarations est suffisante pour montrer la pertinence de cette analyse.
Pour cela, on peut se référer à la présentation du programme présidentiel de François Asselineau, dans lequel il fait le lien entre la réforme territoriale actuellement à l'oeuvre, la politique promue par l'European Free Alliance et le discours de Philippe Seguin à l'Assemblée Nationale le 5 mai 1992.

 

extrait vidéo entre 1h 8m 17s et 1h 26m 0s

 
 

 

"Renationaliser TF1"

Il n'y a pas grand chose de choquant là-dedans. Comme le disait assez justement François Bayrou il y a 10 ans :
source : Acrimed

« La loi votée il y a vingt ans (...) stipulait qu’il fallait vérifier que les engagements pris par les chaînes, notamment en matière de programmes culturels, étaient tenus. Ces rendez-vous fixés par la loi n’ont jamais été honorés. Et l’on a prolongé, sans que personne ne s’en aperçoive, les concessions sans la moindre discussion. Ce n’est pas juste. »

 
 
 

"Le Dalaï Lama est un agent américain"

source : Libération

 

Le dalaï-lama a été financé par la CIA
Dans les années 60, la CIA versait 180 000 dollars par an (1 million de francs) au dalaï- lama, rapporte dans son édition d'hier le Los Angeles Times, en citant des documents secret défense récemment déclassifiés par le département d'Etat. Au total, c'est 1,7 million de dollars que le mouvement tibétain en exil recevait annuellement des services de renseignement américains, au titre de leur effort de déstabilisation des régimes communistes, en pleine guerre froide.

 

 

"Nicolas Dupont-Aignan n'a jamais dit un mot sur le rôle joué par les Etats-Unis dans la construction européenne".

C'est un fait.
 
 

"Qui a financé le Front National entre 1985 et 1992 ? C'est Mr Pierre Ceyrac, qui était membre de causa-international, le bras financier de la secte Moon. Causa-international, c'est la CIA et la famille Bush qui est derrière"

 
source : France3

Avec les zones d'ombre, combines et petits arrangements entre amis d'un parti décidément pas comme les autres : argent, barbouzeries, tractations avec la secte Moon, communauté d’intérêts avec François Mitterrand et rendez-vous secrets avec Jacques Chirac...

 
source : France3, extrait du documentaire "Le diable de la République" :


Qui finançait le Front National dans les années...

Pour aller plus loin :

 

 

Conclusion

 

Les quelques liens que j'ai donnés montrent de façon claire la mauvaise foi de Patrick Cohen.
Que penser de l'absence de réaction de la part de ses pairs journalistes, de la part des organisations de "surveillance" ou de "critique" des médias, et au sens plus large de la part des intellectuels de ce pays ?

Cette affaire a le mérite de montrer l'absurdité de la situation politique et médiatique dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui en France : pour discréditer un candidat à l'élection présidentielle qui dit la vérité, il suffit qu'un journaliste fasse un montage de 2 minutes en prenant des citations hors-contexte, le tout agrémenté de petites piques et du gloussement stupide des quelques commentateurs qui sont autour de la table. La plupart des auditeurs sont tellement désinformés et tellement intimidés qu'il ne leur viendrait même pas à l'esprit vérifier par eux-mêmes. C'est fascinant !

Mais paradoxalement, la candidature de François Asselineau peut constituer un formidable révélateur du niveau de verrouillage médiatique et idéologique de la société française. La candidature d'Asselineau peut susciter une prise de conscience salutaire chez nos compatriotes qui accordent encore une confiance démesurée dans les principaux médias de ce pays. Les faits. Les faits, et leur formidable éloquence.

 

Tout le monde à le droit de se tromper. Mais à partir du moment où l'on prend conscience de son erreur, la situation change. Une personne qui continue à se tromper tout en sachant qu'elle se trompe, n'est plus une personne qui se trompe... c'est une personne qui ment.

 

Si j'en crois Wikipedia :

Un obscurantiste prône et défend une attitude de négation du savoir. Il refuse de reconnaître pour vraies des choses démontrées. Il pose des restrictions dans la diffusion de connaissances.

Patrick Cohen est un obscurantiste. Ceux qui en ont pris conscience mais qui choisissent de garder le silence sont complices de la situation.

 


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