François Hollande est déjà battu en 2012
par Grégoire Duhamel
mardi 6 décembre 2011
Comment et pourquoi le candidat va continuer son érosion actuelle.


Les Français sont beaucoup plus nombreux à souhaiter une victoire de François Hollande plutôt qu'une réélection de Nicolas Sarkozy en France l'an prochain, selon un sondage Viavoice pour Libération.
D'après cette enquête publiée le 5 décembre, 46 % des sondés, soit 1 point de plus que le mois dernier, souhaitent la victoire du candidat socialiste contre un faible 29 % pour le président sortant, qui gagne néanmoins deux points.
Voilà qui semble très favorable à François Hollande !
Pourtant, il faut nuancer : pour la première fois depuis 2010, le nombre de sondés voulant une victoire de la gauche à l'élection présidentielle est inférieur à 50 % : 49 %, contre 53 % en août dernier. De même, ils sont 46 % à estimer que "la gauche gagnera l'élection présidentielle de 2012", contre 52 % en août.
En réalité, il se dessine un net rééquilibrage entre les candidatures de Hollande et de Sarkozy, et pour plusieurs raisons. Et pour ces même raisons, il est maintenant très plausible que Hollande perde.
1 / L’erreur stratégique du candidat PS
En 2002 et 2007, les candidats du PS (Jospin, puis Royal) ont mené une campagne plutôt au centre, laissant du coup beaucoup d’espace à la gauche de la gauche. La France est rappelons-le le seul pays européen où le Parti communiste a fait jusqu’à 20 % des suffrages exprimés ! Le territoire à la gauche du PS est très vaste, varié aussi, et le négliger est une erreur technique : c’est exactement celle que reproduit maintenant François Hollande, notamment avec son choix du fade Michel Sapin comme chargé de l’économie dans son équipe de campagne (accompagné il est vrai du “montebourgeois” Aquilino Morelle), ou ses appels du pied discret au centre.
2 / L’erreur stratégique du PS
En 2007, la première primaire du Parti Socialiste - réservée aux seuls militants – désignait l’ultra-favorite des sondages, une candidate finalement peu expérimentée, avec un parcours ministériel modeste, Ségolène Royal. Ce choix “facile”, en cela qu’il entérinait les sondages, qu’on sait friables pourtant, éliminait les deux meilleurs candidats qu’ait jamais eu le PS en terme d’expérience et d’homme, à savoir Laurent Fabius et DSK. Sacrifier ces deux bêtes politiques (DSK étant hors jeu aujourd’hui bien entendu) sur l’autel de la sondagite fut à l’usage une erreur complète, la candidate implosant en route, notamment au chapitre d’un égo dévorant, ce que les français perçurent.
Bien que la candidature de François Hollande soit un cran au dessus sans aucun doute, la primaire “élargie” de 2011 - un grand succès - a reproduit la même erreur : finalement c’est le candidat en tête des sondages qui a été couronné, mais Martine Aubry n’était-elle pas plus à même de rassembler sur sa gauche (condition sine qua non de la réussite) ? En outre son expérience ministérielle est sans commune mesure avec celle de son rival.
3 / La faiblesse (réelle ou inventée) de Hollande
Le candidat Hollande va devoir affronter durant les prochains mois l’accusation de mollesse, assez embêtante pour un aspirant Président, et ceci pour une raison simple : c’est le reproche principal que lui on asséné ses amis dans le passé. En 2005 par exemple, seul candidat, il est réélu premier secrétaire du PS. Il sera alors ouvertement considéré par ses détracteurs comme l'homme de la “synthèse molle”, “fuyant l'affrontement pour au final ne rien décider” (sic). Arnaud Montebourg lui invente le sobriquet de “Flamby” à la suite de ce vote. Plus récemment Martine Aubry parle de “gauche molle” en évoquant son rival. Et que dire de l’ex-compagne de François Hollande ? En septembre 2011 - c'est donc récent - Ségolène frappe carrément : « Le point faible de François Hollande, c’est l’inaction » ou encore « Est-ce que les Français peuvent citer une seule chose qu’il aurait réalisée en trente ans de vie politique ? Une seule ? » Il n’est guère étonnant que la droite et la gauche radicale s’engouffrent dans la brèche : Mélanchon parle de “capitaine de pédalo dans la tempête” la droite lui colle le nom de “Babar”, etc. L’accord PS / EELV, négocié sans lui, vient aussi semer un certain doute. Et plus la crise sera dure, plus il est plausible qu’un homme fort et expérimenté (ou appréhendé comme tel) sera ressenti comme un mal nécessaire par les électeurs.
4/ Le positionnement du candidat
L’offre politique de François Hollande est au fond faible dans le contexte actuel : il ne remet pas en cause le système, il propose juste une candidature “normale”, avec quelques aménagements sociaux, quand il y a le feu au lac, la perte du triple A, l'endettement et les taux d'emprunts qui remonteront, etc.
Pour beaucoup d’électeurs désespérés, il sera plus séduisant de voter au premier tour pour des réels candidats alternatifs, c’est à dire refusant en bloc de continuer (Mélenchon – Le Pen) dans la même direction, fût-ce avec des solutions ultra-risquées ; et rien ne dit que ces électeurs en colère retourneront sagement voter pour Hollande. Si mélanchon fait 8 % et Marine Le Pen 15 %, ça fait quand même 23 % d'électeurs ! Une abstention substancielle de ceux-ci, et c'est Sarkozy qui sera logiquement réélu - d'autant que la crise angoisse les électeurs âgés, soit structurellement la majorité de la population Française.
Pour toutes les raisons exposées, la candidature Hollande semble compromise, sauf évènement surprenant qui peut toujours survenir d'ici 2012.