Harcèlement de rue à New York : gros coup de pub

par hommelibre
vendredi 31 octobre 2014

Une vidéo a fait son apparition sur le net. Son objet : démontrer le harcèlement de rue qu’une femme peut endurer. Le film est tourné par une équipe comportant Shoshana B. Roberts, actrice inconnue, et une personne marchant devant elle avec une caméra. La caméra enregistre les sollicitations dont la jeune femme est l’objet. Je propose de démonter l'objet. Vous serez surpris du résultat.

Shoshana B. Roberts, qui grâce à ce film vient de gagner une grosse notoriété aux Etats-Unis, marche pendant une dizaine d’heure dans les rues de Manhattan, en particulier le quartier de Soho où ont lieu régulièrement des shootings de mannequins et diverses exhibitions (image 1). Shoshana B. Roberts marche en silence, précédée d’une autre personne portant discrètement - à ce que l’on en croit - la caméra cachée. Le très faible tremblement de la caméra montre que l'on a affaire à des pros bien équipés. Le résultat des dix heures tient en 1’56’’. 

Je mets en doute très nettement ce document, qui bien évidemment présente les hommes comme des harceleurs et des prédateurs dans leur ensemble puisque Shoshana est supposée représenter toutes les femmes.

 

Remarques préliminaires :

1. Les propos des hommes qui sollicitent sont dans l’ensemble plutôt sympas.

2. On pourrait dire qu’il sont les signes d’une belle vitalité masculine, puisqu’historiquement ce sont les hommes qui sollicitent et les femmes qui disposent. Madame Roberts, en ne répondant pas, trouble les codes tout en les jouant. Ne pas répondre c’est ne pas poser de limite et c’est aussi en poser une par l’indifférence.

3. Les hommes doivent tenir compte du fait que si certaines femmes sont flattées par quelques mots dans la rue, d’autres n’apprécient pas du tout, ni le fait, ni la manière. Mais il est difficile de savoir qui acceptera avant d’avoir essayé.

4. Que montre la vidéo ? Une centaine de sollicitations en 10 heures, soit 10 par heure, soit une toutes les 6 minutes. Soit, si toutes les sollicitations sont authentiques et s’il ne s’agit pas d’acteurs, un très faible pourcentage d’hommes actifs. En six minutes on peut croiser des dizaines de personnes, même plusieurs centaines. Faites le compte vous-même dans une rue passante. On peut donc dire qu’environ un homme sur 50, ou sur 100, ou sur 500, a un comportement de sollicitation verbale. C’est très, très peu.

Il est dans la norme des comportements que les hommes et les femmes désirent se rencontrer. Pour cela il faut s’aborder. On remarque que certaines femmes sont beaucoup plus abordées que d’autres. Une jeune femme que je connaissais en ligne se plaignait d’être fréquemment sollicitée : paroles, sifflements. Elle n’aimait pas dut tout. Un jour elle m’a invité sur Facebook. J’ai vu ses photos. Et j’ai compris : elle avait tout du magazine de mode, une séduction à fleur de peau, des vêtements et une manière d’être montrant une forme de disponibilité - ce qui était bien sûr sa liberté, mais ce qui est aussi un code social.

J’ai pris du temps récemment pour examiner nombre de rues, les halles d’un aéroport, les bus et trams. Jamais, pas une fois je n’ai vu ce que cette vidéo montre. Des regards furtifs, plus ou moins rapides, une ou deux approches très cool, oui, mais pas d’approche verbale aussi directe. Cela dit, aux Etats-Unis, le fait de regarder une femme plus de quelques secondes est déjà passible d’une plainte pénale. Merci le féminisme misandre. Hommes et femmes ne sont décidément pas pareils en tout ! Et pourtant on peut voir des terrasses de café à Soho sans le moindre signe de harcèlement envers des femmes (image 2). Et toutes ces femmes qui marchent, toujours dans Soho (image 3), sans qu’un homme ne vienne les solliciter. Où sont les hommes¿

 

Critique du tournage

On a deux personnes (au minimum) dans la rue, en file indienne, et dont l’une porte un foulard sur la tête pour masquer une caméra. Elles marchent exactement au même pas, au même rythme, à la même distance. Celle qui est filmée marche sans but particulier. Ses habits moulants montrent des formes, disons, généreuses.

5. Un tel équipage doit se remarquer et attirer l’attention, donc faciliter la prise de contact. L’équipage pose un biais initial dans la rue. Imaginez deux personnes se suivant fidèlement, en ligne, à même vitesse et distance, toutes deux impassibles et silencieuses : l’expérience est déjà faussée.

6. Une lecture attentive de la vidéo montre que certaines rues de Manhattan sont privilégiées. Elle passe à plusieurs reprises devant des hommes ou groupes d’hommes assis et disponibles. Ils ont possiblement, pour certains, amené eux-mêmes leur chaise, posée devant une vitrine vide qui n'est pas une terrasse. On les voit assister passivement au spectacle de la rue. Leur intervention en fait des acteurs l’espace d’un instant. Mais ces rues-là sont-elles représentatives de l’ensemble de la ville et des comportements masculins ? On n'en sait rien. 

7. On remarquera que pour beaucoup les sollicitations proviennent d’hommes black ou bruns. A Bruxelles, Sofie Peters avait filmé principalement des beurs, ici il y a une importante proportion de noirs : les petites blanches font-elles leur pub sur les minorités de couleur ?

8. La lecture attentive de la vidéo montre à différentes reprises, en arrière-plan, d’autres femmes à l’image. Pas une n'est interpellée ni sollicitée. Etrange non ?

9. A la fin de la vidéo on peut lire un appel aux dons pour l’association Hollaback. Eh bien voilà : encore un groupe d’inspiration féministe qui veut capter de l'argent sur le dos des hommes. De plus, la semaine de la violence faite aux femmes (et pas aux hommes)est pour bientôt. La promo commence. Ces femmes font décidément vendre. Elle squattent beaucoup du temps de cerveau disponible.

La cerise sur le gâteau maintenant. On a lu et entendu des femmes réclamer la possibilité de se promener partout, librement, dans l’habillement qui leur plaît. Elle réclament le droit d’user à leur guise de la voie publique, sans être importunées. Normal. Par contre elles contraignent l’homme et limitent sa liberté quand passe près d'une femme. Ainsi sur le site français de Hollaback on peut lire cette recommandation à l’intention des passants :

« La nuit, n’adressez pas la parole à une femme seule. Changez de trottoir ou éloignez-vous d’elle. Dans un endroit clos (parking, etc) ne vous attardez pas. »

 

Homme, vous l'avez compris : elles veulent contrôler votre comportement. Signe évident d’une domination féminine qui ne se cache plus.

Mais cette vidéo pourrait bien n'être qu'une pub. Car comme l’indiquent les infos à la fin, c’est une agence de pub qui a réalisé cette vidéo : « Rob Bliss Creative », spécialisé dans les vidéo virales et dans les événements à fort pouvoir spectaculaire et émotionnel. La philosophie de Rob Bliss Creative est d’ailleurs très claire et classique de lamanipulation d'opinion :

« Giving people the content they want (donner aux gens le contenu qu’ils veulent). »

« By giving people the content they embrace instead of resist, they have a collective power to promote it far better than any television commercial or billboard can. Instead of trying to force people to watch our messaging, which they then mute or walk away from, we create content that is shared and recommended by the friends and family they trust the most. This audience is of much greater quality to you because they want to participate ; they’re not forced. »

(En donnant aux gens le contenu qu’ils désirent plutôt que de susciter leur résistance, ils disposent d’un pouvoir collectif pour le promouvoir bien mieux que n’importe quelle télévision ou média. Plutôt que de forcer les gens à regarder notre message, qu’ensuite ils oublient, nous créons du contenu qui est partagé qui est partagé et recommandé par les amis et la famille. L’audience est de bien meilleure qualité parce qu’ils veulent y participer ; ils n’y sont pas forcés).

« Donner aux gens ce qu’ils veulent voir... donner aux gens le contenu qu’ils désirent... créer du contenu... » : cette vidéo donne aux gens ce qu’on pense qu’ils attendaient. La vidéo est conçue et réalisée pour montrer ce que le peuple veut voir. Pour info, le directeur de l'agence est également journaliste. Et Shoshana B. Roberts a fait sa pub perso.

 

Ne nous fions pas à ce que nous voyons sans l’avoir analysé en détail. Et, contrairement au racolage en fin de vidéo, ne donnez RIEN à Hollaback.

 

Vidéo 1 avec Shoshana B. Roberts :

 

Vidéo 2 - Shoshana B. Roberts, qui a visiblement inventé la poudre et cherche à le faire savoir, se présente sur son site :


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