Hier, gardiens de la paix, aujourd’hui, forces de l’ordre

par Bourricot
vendredi 10 novembre 2006

Organisation placée sous l’autorité du ministère de l’Intérieur, 161 736 (au 1er janvier 2006) fonctionnaires composent la police nationale. Subdivisée en pas moins de douze directions, il reste que la police « quotidienne » est sous le chapeau de la DCSP (Direction centrale de la sécurité publique).

Organisation placée sous l’autorité du ministère de l’Intérieur, 161 736 (au 1er janvier 2006) fonctionnaires composent la police nationale. Subdivisée en pas moins de douze directions, il reste que la police nationale"quotidienne" est sous le chapeau de la DCSP (Direction centrale de la sécurité publique). Elle a pour principale mission d’assurer la sécurité des personnes, des biens et des institutions, et constitue officiellement un instrument important de la prévention, en étant en première ligne contre les violences urbaines et contre l’insécurité routière.


Chaque fonctionnaire de police reçoit avant d’exercer ses fonctions le Code de déontologie de la police nationale, qui subordonne l’exercice des missions de police au strict respect de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, de la Constitution, des conventions internationales et des lois. Alors que pendant longtemps, l’ensemble des acteurs politiques s’accordaient sur la définition du rôle premier des policiers, à savoir la garantie de la sécurité des personnes, des biens et des institutions, alors que la police a longtemps été un corps respectable et respecté, à l’image du corps des pompiers ou des services de secours, voici qu’aujourd’hui l’image perçue par les gens de ce corps de fonctionnaire n’est plus tout à fait aussi reluisante.

En effet, les citoyens ont désormais cette "peur du képi". Trop peu connue, trop peu de transparence, des chiffres de bavures accolés aux chiffres de sanctions disciplinaires qui s’envolent. La police a aujourd’hui pour objectif de faire du chiffre, c’est-à-dire, dans le domaine de la sécurité routière, une production d’amendes avec à la clé des chiffres records de recettes pour l’Etat, et dans le domaine de la sécurité des personnes, une production d’arrestations (sans flagrant délit apparent) autant que possible spectaculaires, au risque de salir au passage la présomption d’innocence (rappelons que l’arrestation de police doit être légitimée par des preuves, ce qui est à ce moment du domaine de la police judiciaire). La police a aussi le sale boulot d’exécuter les expulsions (normalement du domaine de la police des frontières) avec éventuellement des arrestations d’enfants à la sortie d’écoles.

La police ne rigole plus. Elle n’a plus le temps de dialoguer. Désormais la règle de tolérance zéro a été décrétée clairement par N. Sarkozy disproportionnant ainsi gravement les réponses aux transgressions. L’évidence sécuritaire n’est pas tombée du ciel, elle a été construite. L’idée de la continuité entre les petites incivilités et la grande délinquance est rattachée au bon sens, or elle n’a aucun fondement scientifique ; elle permet surtout d’éviter toute interrogation sur la grande criminalité. Inutile de s’interroger sur les causes et les responsabilités, sur la nature de cette insécurité, il suffit de constater qu’elle est là, et de s’interroger sur la manière de la faire disparaître. Pour les partisans de la manière forte, il est clair que seuls des esprits faibles peuvent perdre leur temps à s’interroger sur le pourquoi  ; les réalistes et les efficaces savent bien qu’il faut se concentrer sur le comment ! Pour pouvoir stigmatiser les réactions des pauvres, il faut bien d’abord convaincre qu’il n’y a pas de rapport entre violence et pauvreté. C’est là que la démarche a été habile ; elle a consisté à s’appuyer sur l’affirmation, peu contestée, qu’on ne pouvait pas tout expliquer par la pauvreté, pour inverser la charge de la preuve. En dressant des barrières de protection, la société que l’on construit devient vite invivable.

Aujourd’hui, la Justice est discréditée, la répression est la seule solution entrevue et poursuivie. La criminalisation de catégories de population par la présomption de culpabilité permanente est de plus en plus oppressante, transpire dans les journaux télévisés qui délaissent l’enquête et participent activement à la surenchère de faits divers et à la réaction suivant la gravité. Et les policiers jouent dorénavant le rôle de forces de l’ordre contraintes de jouer dans cette surenchère, pressées par des circulaires et des demandes de résultats, perdant tout leur rôle de prévention auprès de la population.


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