Hollande-Drucker : de la comédie du pouvoir à la société du spectacle

par Daniel Salvatore Schiffer
mardi 17 janvier 2017

Hollande-Drucker :

de la comédie du pouvoir à la société du spectacle

 

Que François Hollande, actuel président de la République, fût-il « sortant », assiste publiquement à la dernière d'une représentation théâtrale de Michel Drucker, par ailleurs lui aussi en bout de course dans le jeu médiatique, au moment même où les candidats de gauche à la présidentielle débattent autour de leur programme comme de leurs idées, en dit long sur le mépris qu'il affiche ostensiblement à leur égard. La plupart des commentateurs, au sein du petit monde politique français, y auront d'ailleurs vu, en filigrane, un soutien implicite, de sa part, à Emmanuel Macron, longtemps son protégé et qui, malgré sa récente « trahison », demeure manifestement son favori en ce qui concerne la prochaine élection à la tête de l’État.

 

BOUFFI AU BOUFFES PARISIENS ET MITTERRAND EN MACHIAVEL

Fin tacticien, donc, Hollande, un peu à l'image, dans un passé encore relativement proche, du machiavélique Mitterrand au regard de son propre clan, autoproclamé « socialiste » ? Peut-être, quoique Hollande chez Drucker pendant que Valls et Cie se répandent en inutiles et pathétiques palabres sur une chaîne privée, ce soit plutôt, en l'occurrence, Bouffi aux Bouffes Parisiens : jamais théâtre, qui aura pourtant vu défiler sur ses légendaires planches bon nombre de vaudevilles, n'aura aussi bien porté, d'antique mémoire, son nom !

Reste que, face à cette patente comédie du pouvoir, ces mêmes commentateurs politiques, ceux-là mêmes qui, bavards aussi narcissiques qu'invétérés, ne cessent de squatter les plateaux de télévision du haut de leurs analyses pourtant aussi prévisibles qu'insipides, en prennent sérieusement, eux, une nouvelle fois et désespérément, pour leurs grades, par ailleurs largement surestimés tant les faits leur donnent souvent, a posteriori, tort.

 

POSTURES ET IMPOSTURES DU « POLITIQUEMENT CORRECT »

Car c'est peu dire que, engoncés dans leurs prétendues certitudes comme en un costume étriqué, bercés jusqu'à l'endormissement par l'ennuyeux, répétitif et puéril ronron de leurs médiocres mais obsessionnels « politiquement correct » et autre « bien pensance », ils se seront, ces derniers mois, trompés, par-delà l'incroyable aplomb de leurs (im)postures, tant dans leurs observations que dans leurs prévisions : de l'émergence du Brexit à la victoire de Trump, en passant par le triomphe de François Fillon pour les candidats de droite à la présidentielle, ils n'ont rien vu venir, en effet, du nouveau monde, des mentalités à venir ou des sociétés en train de se (re)construire. Affligeant !

Quant aux différents et multiples instituts de sondage, ils se seront eux aussi, et sur les mêmes invariables sujets, tout aussi lamentablement fourvoyés. Du vent, et encore du vent, qui ne sert qu'à brasser, dans un vide sidéral, pour ne pas dire sidérant, l'ampleur de leur propre incompétence, sinon de leur seule outrecuidance. Ridicule !

 

DU GENERAL DE GAULLE A JEAN-EDERN HALLIER

Le regretté Jean-Edern Hallier, dont on commémore ces jours-ci le vingtième anniversaire de la mort, et qui, à la fin de sa vie, m'honora de son amitié, avait, pour qualifier cette fâcheuse mais quasi indéfectible propension à l'erreur au sein de l'Hexagone, un aphorisme dont on ne pourra qu'apprécier, à l'instar de ceux qu'Oscar Wilde proféra à la face des Anglais, la fulgurante pertinence tout autant que l'humour cinglant : « Les Français sont des moules, ils restent accrochés à leur banc de sondages et prennent les marées de l'opinion publique pour le retour des eaux vives1 ». Presque aussi mémorable que les historiques mais peu flatteurs « veaux », pour décrire là encore ce « mal français » dont on ne sait s'il faut davantage plaindre l'insistance ou l'arrogance, de feu le général De Gaulle !

 

LE BÛCHER DES VANITES

Comme quoi cette « société du spectacle » que fustigea naguère Guy Debord, à juste titre, a encore devant elle, hélas pour les plus lucides et honnêtes des citoyens français, de beaux jours à vivre. Sauf qui peut : « Vanité des vanités, tout est vanité » déplorait déjà, dans sa grande et biblique sagesse, l'Ecclésiaste !

 

DANIEL SALVATORE SCHIFFER*

 

*Philosophe, auteur, notamment, de « Requiem pour l'Europe – Zagreb, Belgrade, Sarajevo  » (Éditions L'Âge d'Homme), « Critique de la déraison pure – La faillite intellectuelle des 'nouveaux philosophes' et de leurs épigones  » (François Bourin Éditeur) et « Le Testament du Kosovo – Journal de guerre  » (Éditions du Rocher).

 

1Jean-Edern Hallier, Fulgurances, Michel Lafon, Paris, 1996, p. 15.


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