Il faut réformer l’orthographe

par Saltz
mardi 16 février 2016

Les conservateurs de l'orthographe actuelle ont beau se raidir sur leur position et invoquer l'étymologie pour justifier les règles de l'écriture, ils devraient se rappeler que le mot orthographe faisait ortografie en ancien français et qu'il venait du latin orthographia et du grec ancien ὀρθογραφία, « écriture » et « droit, juste, correct ».

Or comment expliquer la justesse de l'écriture des mots suivants ?

Pourquoi Asseoir avec un « e » ? Asseoir comporte une voyelle muette, le « e ». Il vient du latin sedere. Mais assis en est privé alors qu'il vient du même verbe latin. Pourquoi cette discrimination ? Les voyelles muettes, par définition, ne se prononcent pas. Alors pourquoi les écrire ?

Bonhomie n'a qu'un « m » alors qu'il vient de bonhomme. On aime ou on n'aime les « m », mais il faudrait choisir.

Boursoufler n'a qu'un « f » alors que « souffler » en a deux. Le plus simple serait de supprimer les doublements de consonnes mais je parie que les conservateurs exigeront le doublement généralisé.

Le chariot a un « r » esseulé. Le nom chariot vient du latin carrus en passant par l’ancien français cheriot. Dans ce cas la graphie avec un seul r se justifie étymologiquement, nous dit Le Petit Robert 2010. Dans l'esprit de simplification, et bien qu'en France on ne les roulent plus, la réforme de 1990 préconise de doubler les « r » pour continuer à utiliser un deuxième « r » inutile dans les mots de sa famille comme « charrier », « charrette », « charrue », « carriole » et « carrosse ».

Peut-être s'apercevra-t-on que le mot « char » n'en possède qu'un et qu'on devra écrire « charr » pour harmoniser toute la famille, en prenant garde de ne pas ajouter un « e » final afin d'éviter la confusion avec le charre de « arrête ton charre » ou de « faire un charre », qui signifie « faire une blague », que l'on retrouve aussi dans « charrier » (se moquer de quelqu'un, le mener en bateau).

Combatif a perdu un « t » alors qu'il vient de « combattre ». Pourquoi ? Il l'a laissé à celui qu'il a combattu ?

Echec et mat devrait s'écrire « échec est mat » puisque échec vient persan « schah » et signifie « roi » et mat de l’arabe mata (tuer) qui signifie « mort ». « Echec et mat » veut dire « le roi est mort ».

« Huile » vient du latin oleum et a été pollué par du « h ».

« Huit » vient de octo qui n'a jamais pris de « h », lui.

« Huître » vient de ostreum, qu'on ouvrait avec un couteau mais pas avec une « h ».

Imbécillité vient de « imbécile », comme vous l'avez deviné parce que vous n'en êtes pas un. L'imbécillité de l'orthographe ici est accentuée par la prononciation habituelle de « ill » en /ij/

On trouve la même incongruité dans dans « mille » /mil/, « ville » /vil/ et « tranquille » /trɑ̃kil/)

« Millionnaire  » est riche d'un « n » de plus que le « millionième » !

L'oignon s'écrit avec un « i » parce qu'en ancien français, le graphème -ign- notait le n palatal (\ɲ\), comme dans besoigne (« besogne »), estraigne (« étrange »), montaigne (« montagne »). Nous gardons trace de l’ancienne notation dans seigneur et oignon. Les rectifications orthographiques de 1990 recommandent d’écrire ognon sur le modèle de agneau ou rogne. Encore une fois les recommandations se sont perdues. Mais je conseille aux conservateurs anti réformes de 1990 de revenir aux « besoigne » et autres « montaigne ».

Au passage, je dois dire que je m'amuse d'entendre de braves gens prononcer à tort /wa/ comme dans oie ou toi : une graphie stupide provoque une prononciation erronée.

Persifler vient de « siffler » et a laissé tomber un "f".

Poids vient du latin « pensum » sans « d » et non pas de « pondus », mais des pédants se sont trompés d'origine et l'ont alourdi d'un « d ». Et depuis trois siècles nous devons reconduire cette erreur.

Prud’homal vient de prud’homme. On aime ou on n'aime pas, mais encore une fois ça fait désordre.

Le mot relais s’écrivait relai sans « s » au 18ème siècle. En 1976, l’Académie française recommandait de revenir à l’ancienne graphie, par analogie avec « délai » ou « balai ». Quarante après, la recommandation n'a pas encore été suivie. Patientons.

Alors les partisans du statu quo, toujours convaincus de ne rien changer ?


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