Il faut repenser la politique en cette époque de blues démocratique

par Bernard Dugué
vendredi 23 décembre 2016

Les événements politiques en Europe et aux Etats-Unis témoignent d’une crise de la démocratie qui doit être élargie à l’idée d’une crise de la politique et par voie de conséquence de la pensée politique, sans oublier la civilisation. Ce constat vaut pour le bloc occidental, celui dans lequel nous vivons et que nous connaissons le mieux à travers les médias et les livres savants publiés. Le monde est plus vaste. La globalisation est pour certains le phénomène responsable des crises en Occident, dans la mesure où elle ouvre les marchés et déstabilise notre système social en favorisant le chômage. Cet alibi est trop facile. On aurait presque oublié qu’il y a 50 ans, une crise germait dans un contexte de plein emploi et de croissance à 5 points. Ce qui n’a pas empêché mai 68 ni tous les mouvements sociaux en Occident. Le blues démocratique en 2016 fait écho à une absence de pensée politique.

Il y a plus de deux millénaires, la pensée politique classique s’est constituée en Occident grâce aux fulgurantes philosophies proposées par Platon et Aristote. Je ne pense pas que ces penseurs aient sorti d’un coin de leur esprit ces brillantes théories politiques. La république de Platon ou la cité de Aristote ont été conçues sur la base d’une expérience politique déjà bien riche. Mais il est sans doute plausible que les régimes n’aient jamais fonctionné comme cela a été écrit dans ces traités philosophiques. La thèse la plus probable étant que les conceptions philosophiques ont été extrapolées de l’expérience en les idéalisant pour ce qui est des « bons régimes » ou en les caricaturant savamment afin de rendre proéminents certains traits dans les « mauvais régimes ».

La philosophie politique a radicalement changé à partir de Machiavel, Hobbes et tous les philosophes de la modernité. Leo Strauss a écrit des pages éclairantes permettant de situer les différences fondamentales entre une conception philosophique classique et une conception moderne de l’organisation politique qui du reste a évolué pour devenir une théorie de l’Etat après avoir été une pensée de la cité. Cette évolution a été influencée par les avancées dans la philosophie du sujet et la conception de l’homme. Sans oublier la philosophie de l’Histoire. Les philosophies politiques modernes se sont diversifiées avec des divergences remarquables, comme entre le libéralisme et le communisme. La domination du marxisme a bloqué l’imaginaire politique à l’université française. En plus de Strauss, quelques auteurs américains méritent une attention, Voegelin ou Lasch. Une chose est sûre, la situation est actuellement bloquée pour diverses raisons.

(1) Les intellectuels, sociologues et universitaires français façonnent des travaux et théories en étudiant les textes passés et surtout en se jaugeant les uns les autres. Le professionnalisme les éloigne de la vie des gens et de la science qui a sa place, ainsi que l’anthropologie. Pourtant, quelques recherches sont innovantes, en architecture ou en ethnologie par exemple.

(2) Les politiques sont devenus des vendeurs de solution avec chacun leur boîte à outils. Les primaires se déroulent comme une battle de représentants de commerce, chacun vantant sa came et dénigrant celle du concurrent. Les politiques ont plein de solutions mais ils ne connaissent pas les problèmes et ne savent pas les hiérarchiser.

(3) Diverses inerties empêchent la société de changer. Les mauvais plis ont été pris il y a trente ans ou plus. A ces travers sont venus s’ajouter des problèmes nouveaux qui n’existaient pas il y a une décennie. Le nouveau terrorisme et les nouveaux migrants. On comprend la difficulté à envisager sereinement l’avenir avec des moyens financiers se réduisant.

(4) Il faut réinventer le politique. Je n’en dis pas plus, ayant dépassé la capacité d’attention du lecteur moyen. Faites quelques commentaires pertinents, ce sera un cadeau collectif. Et bonnes fêtes à tous !

(Pour info, les 500 ans de la Réforme vont être célébrés en 2017. Il est temps d’envisager une nouvelle Réforme dans tous les domaines et de passer à quelque chose de plus prometteur que les choses modernes maintenant datées et inopérantes. Pour cela, il faut revenir à l’Histoire. Mieux que les indignés, les nouveaux protestants !).


Lire l'article complet, et les commentaires