Il n’y a plus de trotskistes en France

par Jean Dugenêt
vendredi 22 mai 2020

 

1. La lutte pour le socialisme

La lutte pour le socialisme est plus que jamais à l’ordre du jour.

La pandémie du coronavirus vient de nous donner une préfiguration de ce que pourrait être la barbarie destructrice de l'humanité engendrée par le capitalisme arrivé à son stade de putréfaction. Les épidémies (coronavirus, vache folle, sida, virus Ebola...) constituent un risque tout aussi grave, voire plus, que le réchauffement de la planète dont les éventuelles causes sont aussi hypothétiques que la validité de certains symptômes. Mais ce risque permet de faire tellement de beaux discours et, accessoirement, de privilégier l'énergie nucléaire voire d'augmenter le prix des hydrocarbures.

La barbarie, ce n'est pas seulement ce que nous risquons de voir dans peu de temps : des petits épargnants spoliés, de multiples faillites d'entreprises, le chômage qui explose, les fonctionnaires sans salaire qui rentrent chez eux ; plus de transports, d'eau potable, de poubelles ramassées, d'infirmiers et de médecins dans les hôpitaux. C'est la généralisation des épidémies qu'un tel système sera incapable d'endiguer ou les explosions nucléaires déclenchées par des chefs d'état psychiquement instables. Ce sera à terme la survivance d'un résidu d'humanité ou sa disparition.

La préfiguration de la barbarie est bien là. C'est le naufrage du capitalisme en guerre contre les exploités. Quand ceux-ci résistent et se révoltent contre cette politique d'austérité dont nous voyons aujourd'hui les ravages, les politiciens lancent tout leur arsenal de répression.

A l'opposé, le socialisme est lui aussi à portée de main. Ce serait la mise à disposition de l'humanité entière des ressources de la planète avec une gestion qui viserait le mieux-être de tous plutôt que la recherche effrénée du profit pour le bénéfice de quelques-uns. Cela se ferait, dans un premier temps, dans le cadre des nations. Les exploités ayant pris le pouvoir dans quelques pays développés donneraient un exemple pour tous les pays du monde. Rapidement les peuples feraient des accords sans plus jamais se considérer comme des concurrents, des adversaires ou des ennemis mais toujours comme des partenaires. Chacun trouverait chez l'autre ce qu'il ne peut pas facilement avoir par ses propres moyens. Les hommes seraient très vite amenés à exploiter les ressources des mers du sud avec toutes les protéines qu'elles peuvent fournir et des sources d'énergies quasiment infinies et non polluantes (vents et courants) ...

Pour passer à cette politique au service du bien collectif, il faut que les exploités prennent leur destin en main. Il faut qu'ils prennent le pouvoir.

L'espoir d'une construction du socialisme reste parfaitement réaliste. Il s'agit de construire une société sans exploiteurs et sans exploités. Ce n'est pas parce que les avancées qui ont été menées jusqu'à maintenant dans ce sens ont échoué et parfois abouti à des dictatures que cela est inéluctable. Il en va à ce sujet comme de la construction du capitalisme. Entre la révolution de 1789-93 et la réalisation avec la 3ème république d'un état "capitaliste démocratique", il aura fallu beaucoup d'échecs (2 empires, 2 restaurations, 2 formes de monarchie celle de droit divin et la monarchie constitutionnelle de Louis Philippe, la Commune de Paris). Cela fait beaucoup d'échecs, pendant près d’un siècle, avant la réalisation de ce qui correspondait à peu près aux idées des révolutionnaires de 1789. Il aura aussi fallu des échecs avant que le socialisme soit victorieux. Cependant, le capitalisme pourrissant nous mène tellement vers des catastrophes que nous sommes toujours face à cette alternative annoncée depuis plus d’un siècle par Rosa Luxemburg : SOCIALISME OU BARBARIE.

 

2. Le combat des bolcheviks

Il nous faut reprendre et continuer le combat engagé par Marx et Engels et dont les bolcheviks ont été les glorieux continuateurs. Lénine et Trotsky font encore trembler les bourgeois qui n’ont de cesse de les salir. Ceux qui, pour le compte des milliardaires exercent le lucratif métier de calomnier toutes les révolutions s’en donnent à cœur joie à l’instar de Stéphane Courtois. Les bolcheviks seraient pour eux des dictateurs. Ils assimilent les bolcheviks avec la dictature mise en place par Staline. Mais cela n’a rien à voir. Pour établir sa dictature Staline a exterminé les bolcheviks. Parmi les bolchéviks qui ont participé à la révolution d’octobre 1917, seule une poignée de renégats a survécu aux purges de Staline. Je ne dénombre que cinq survivants. Pour être précis voici leurs noms : Molotov, Kalinine, Jdanov, Vorochilov et Kaganovitch. Que ceux qui en connaissent d’autres n’hésitent pas à me le faire savoir ! Précisons d’ailleurs que Kalinine et Jdanov ont certes échappé aux grandes purges staliniennes mais il n’est pas certain qu’ils auraient survécus à Staline. Ils sont morts respectivement le 3 juin 1946 et le 31 août 1948. Or, Staline, décédé le 5 mars 1953, a poursuivi ses répressions politiques jusqu’à sa mort. L’affaire du « complot des blouses blanches » battait son plein au moment de son décès. Ils ne sont donc que trois à avoir survécu à Staline. Sur le même thème, Pierre Broué a écrit  : « Sur les millions de détenus libérés des camps de concentration après la mort de Staline, (...) les trotskystes survivants peuvent se compter sur les doigts d'une seule main ? ». Notons que les trotskistes dont parle Broué n’étaient pas nécessairement des anciens de la révolution d’octobre.

Les 3, 4 ou 5 bolcheviks de la révolution d’octobre 1917 survivants aux massacres de Staline sont tous des hitléro-staliniens à l’instar de Molotov dont le nom reste associé au fameux pacte Hitler-Staline qu’il a négocié avec Ribbentrop. Les spécialistes auront sans doute compris qu’il me plait de les qualifier d’hitléro-staliniens car les purges de Staline ont été justifiées en France par le PCF qui expliquait qu’il s’agissait d’éliminer des « traitres hitléro-trotskistes ». Or, avec le recul du temps, il est évident qu’il n’y a jamais eu d’hitléro-trotskistes mais il y a bel et bien eu des hitléro-staliniens à commencer par Staline et Molotov.

Les bolcheviks n’avaient rien de commun avec "la dictature". Ils étaient épris de liberté et ils voulaient la paix. A peine au pouvoir, ils ont signé un compromis avec les allemands (traité de Brest-Litovsk) qui a permis aux russes d’être les premiers à sortir de l’infâme guerre de 1914-18. Ils se sont battus pour abattre la dictature du tsar et pas pour en créer une autre. Ils ont combattu toutes les puissances capitalistes d’Europe qui avaient envoyé leurs ouvriers s’entretuer en 1914. Les grandes puissances capitalistes n’ont pas pu mobiliser suffisamment de forces pour liquider cette révolution. Ils ont été limités par la résistance des prolétariats de toute l’Europe qui ouvraient de multiples mouvements révolutionnaires. Les bolchéviks ont gagné la « guerre civile » qui était en fait une guerre contre toutes les puissances capitalistes car celles-ci appuyaient les armées blanches. En ce sens la révolution d’Octobre est une victoire du prolétariat de toute l’Europe. Cette révolution était la hantise des capitalistes. Les exploiteurs d’Europe étaient les premiers à vouloir exterminer les bolcheviks mais, finalement, ce ne sont pas eux qui l’ont fait. C’est Staline qui s’en est chargé plus tard pour mettre en place sa dictature.

La haine à l’égard des bolcheviks et de la révolution d’octobre est la pure expression de la conscience de classe des capitalistes. De tout temps, depuis les révoltes des esclaves spartakistes jusqu’à nos jours, les exploiteurs n’ont cessé d’exprimer leur haine contre les exploités qui se révoltent. C’est pourquoi ils calomnient toutes les révolutions et tous les révolutionnaires. Leurs discours sont toujours les mêmes : laissez-nous jouir de votre plus-value. Transpirez pour nous. On veut vous faire crever au boulot (Tiens ! Si on faisait une réforme des retraites...). Soyez soumis et dociles. Si vous vous révoltez, il y aura plein de morts. Ce sera atroce et ce sera de votre faute. C’est vous qui aurez commencé. Vous l’aurez bien cherché...

Il faut bien qu’ils placent les bolcheviks et la révolution russe dans leurs immondes calomnies habituelles.

 

3. Les trotskistes assurent la continuité du marxisme

Après la mort de Lénine, la révolution russe a dégénéré essentiellement parce qu’elle est restée isolée. Elle a été suivie de puissants mouvements révolutionnaires dans toute l’Europe : révolution en Hongrie en 1919, guerre civile en Finlande, mutinerie dans la Mer Noire puis dans plusieurs grands ports d’Europe... C’est d’ailleurs par une mutinerie de marin que débute la révolution spartakiste en Allemagne en 1918. Mais, ces autres révolutions ont été écrasées (en Finlande, en Hongrie). C’est principalement les défaites en Allemagne (en 1918 puis 1923) qui ont été la déception des bolcheviks lesquels comptaient que la révolution se propage sur toute l’Europe. C’est dans ce contexte que Staline l’a emporté sur Trotsky et a théorisé cet isolement de la révolution russe en prônant le « socialisme dans un seul pays » ce qui est une aberration.

La dégénérescence de la révolution russe a engendré sous Staline, une infâme dictature. C'est donc Trotsky qui en s’opposant à Staline a assuré pendant un temps la continuité du combat pour le socialisme. Mais, après sa mort, les trotskistes décimés par la répression conjuguée du fascisme et du stalinisme étaient trop faibles pour assurer la continuité. Néanmoins, le courant animé par Pierre Lambert a, bon an mal an, pendant une trentaine d’années résisté à la capitulation devant le stalinisme prônée par les principaux dirigeants du trotskisme peu de temps après la Libération. Pablo, Mandel et Frank voulaient en effet dissoudre les organisations trotskistes dans les puissants partis staliniens. Ainsi, Pierre Lambert, Stéphane Just, Gérard Bloch et Daniel Renard, qui ont tous les quatre été poursuivis pour atteintes à la sureté de l’Etat pendant la guerre d’Algérie, peuvent être considérés comme les glorieux représentants du dernier carré de trotskistes.

Le groupe de Lambert a fini lui aussi par capituler avec l’arrivée de Mitterrand à la présidence de la République. Ils avaient fondé l’OCI (Organisation Communiste Internationaliste) qui, avec plus de 5 000 militants implantés dans les syndicats CGT, FO, FEN et l’UNEF dont ils avaient conquis la direction, pouvaient jouer un rôle majeur dans la lutte des classes. Je ne reprendrais pas ici ce que j’ai expliqué à ce sujet dans mon livre « De François Mitterrand à Jean Luc Mélenchon ». En fait leur principale contribution aura été de fournir une quantité de cadres au PS à commencer par Jospin et Cambadélis. A l’évidence, il n’y a plus de trotskistes en France. Parmi ceux qui se réclament du trotskisme nous en voyons qui votent pour Mélenchon d'autres pour Macron. Certains sont contre le Frexit, d'autres crachent sur les gilets-jaunes et, bien sûr, quelques-uns cumulent.

Pourtant, après la capitulation du groupe de Lambert, il en est resté un qui a tenté d’assurer la continuité du combat révolutionnaire. Il s’appelait Stéphane Just. Il fut le dernier des « bolcheviks ». Il aura finalement échoué. Dans mon article : « Les révolutionnaires qui votent pour Macron et l’extrême-gauche européiste » j’ai déjà un peu évoqué la politique réactionnaire de ceux qui osent se présenter comme les successeurs de Stéphane Just tels Vincent Présumey et Pierre Salvaing.

 

4. Les renégats votent pour Chirac et Macron

Ils ont appelé à voter pour Chirac au deuxième tour des élections présidentielles en 2002. Ils ne sont pas les seuls et nous n’en parlerions pas s’ils ne l’avaient pas fait au nom du trotskisme et de Stéphane Just. La position des marxistes est pourtant claire. Elle a notamment été exposée par Trotsky à propos de la prise du pouvoir par Hitler précédée par l’élection présidentielle de 1932. La page de la Wikipédia consacrée à cette élection explique l’essentiel. Pour « barrer la route à Hitler » les Présumey et autres Besancenot de l’époque appelaient à voter pour Hindenburg « en se bouchant le nez ». Un an plus tard, se bouchant le nez à son tour, Hindenburg offrait la direction du Reich à Hitler. Trotsky écrivait  :

"La social‑démocratie a livré à la bourgeoisie la révolution prolétarienne de 1918 et sauvé ainsi une fois encore le capitalisme déclinant. C'est elle, et elle seule, qui a ainsi donné à la bourgeoisie la possibilité de s'appuyer à l'étape suivante sur le banditisme fasciste. Descendant de marche en marche à la recherche du « moindre mal », la social‑démocratie (NDLR menant la politique des Présumey et Besancenot de l'époque) a fini par voter pour le feld‑marschall réactionnaire Hindenburg, lequel, à son tour, a appelé Hitler au pouvoir. Démoralisant les masses ouvrières par les illusions de la démocratie dans le capitalisme pourrissant, la social-démocratie a privé le prolétariat de toutes ses forces de résistance."

La similitude est totale avec la situation actuelle. Quelle différence y-a-t-il entre Macron et Le Pen pour ceux qui sont derrière Macron (Bernard Arnault, Xavier Niel…) ? Dans les circonstances de 2017 c’était le Macron qu’ils ont fabriqué qui leur convenait le mieux mais ils sont prêts à le changer avec Le Pen ou un(e) autre si les circonstances l’exigent pour sauver l’UE et tout leur système d’exploitation. Voter pour Le Pen ou Macron c’est voter pour le même camp. Ce n’est pas, ce ne sera jamais le camp des révolutionnaires qui ne veulent surtout pas "priver le prolétariat de toutes ses forces de résistance."

Car après avoir voté pour Chirac en 2002, Vincent Présumey a appelé à voter pour Macron le 7 mai 2017. Il l’a expliqué dans un style alambiqué tout en ayant l’amabilité d’exclure tout opprobre envers les pauvres militants comme nous qui avons refusé de le suivre. Apprécions le style du faux cul qui n’ose pas dire clairement ce qu’il demande. Dans un article en date du 2 mai 2017, il écrit :

« En fait, dans des millions de familles, de cercles amicaux, de groupes militants, on discute, froidement et passionnément à la fois, de ce qui serait le scenario le moins mauvais, étant entendu que tous deux sont mauvais, le 7 mai au soir. (…) Bref l’intérêt de la classe salariale est qu’elle (Marine Le Pen) soit battue. Cela, en excluant tout opprobre envers les larges couches qui vont, en effet, s’abstenir… »

Je ne peux pas faire mieux sur cette question des élections que de citer Pierre Broué qui écrivait le 28 avril 2002 :

« Entré à l'hôpital pour une opération au lendemain du premier tour, je découvre en sortant que des camarades que j'estime ont jeté par-dessus bord idées et principes et appellent à voter Chirac ! J'avoue avoir reçu ce coup en plein visage et en tituber encore. Mon fils Michel m'offre de m'aider matériellement à exprimer mon point de vue. J'accepte.

Je vais être brutal. Ces derniers jours, dans mon état semi-comateux, ne me récupérant que par morceaux, je me suis cru en août 14. Je ressens l'attitude de ces camarades, et notamment ceux de la Gauche socialiste (dont je ne suis pas et n'ai jamais été), comme un coup de schlague, une humiliation, une initiative très grave. Je suis trop fatigué pour écrire un vrai texte mais je vais essayer d'énoncer des repères.

  • Il n'y a pas de problèmes français. C'est guignolesque d'expliquer que ce vote Chirac deviendra un référendum contre Le Pen. Nous sommes dans le monde et ce que nos concitoyens du monde apprennent, c'est ce que disent leurs journaux : "Les démocrates se rangent derrière Chirac." C'est grave, une vieille du goulag, une hija argentine, me demandent comment c'est possible… et mes amis d'Algérie.
  • J'affirme que la plupart de vos arguments (je m'adresse à ceux qui veulent voter pour Chirac) relèvent de l'épicerie. Ce ne sont pas les totaux de voix qui comptent mais la création, les manifestations, les réunions, les prises de parole, autrement dit la solidarité, l'élan, la ténacité et l'attachement au monde du travail : je n'oublie pas celui qui m'a dit, quand j'ai quitté l'hôpital : "Il faut dire à Jospin qu'on l'aime." Se cracher les uns sur les autres, même si on a raison dans sa rogne, cela ne profite qu'à Chirac et Le Pen. Il faut s'abstenir de violences verbales sans renoncer au débat et à la critique.

Marx et Ledru-Rollin, Trotsky et Hindenburg.

  • Déjà, Marx refusait le vote pour Ledru-Rollin et Trotsky celui pour Hindenburg. Honnêteté et courage. Vous qui dénoncez l'escroc et le super-menteur et qui avez de jeunes enfants, vous le leur dites comment, que vous votez pour lui ? Je crois que, dans votre désarroi, vous cherchez désespérément à gagner… du temps."
  • On ne gagne rien à se renier. Il faut marcher de l'avant, faire un Premier Mai grandiose, aider la jeunesse à renouer avec les traditions qu'elle cherche. Michel écrit qu'il appelle à voter Chirac, " la rage au cœur ". Dans le mien, mes camarades, il n'y a pas de rage, mais nos espoirs, nos rêves, ce monde nouveau que vous voulez et qui sera vôtre, les jeunes, et toute l'amitié et l'amour qu'on a pour vous, connus ou inconnus.

Et même nos amours mortes et celles qui n'ont pas pu éclore. Non, on ne va pas se masquer pour combattre.

Dans les yeux, face à face, s'il vous plaît, et tête haute.

Bulletins blancs ou nuls !

Vive la vie ! »

Je considère, pour ma part, ce texte de Pierre Broué comme son testament politique. Au même titre que le testament de Lénine, il permet aujourd’hui d’identifier les renégats. Voici une autre citation de Pierre Broué parlant de ceux qui l’ont exclu de l’OCI, il déclarait  :

« Je dirai simplement que, venant d'hommes qui se réclament de Trotsky, ils sont à vomir- littéralement- et que je ne les lis plus »

 

5. Les renégats défendent l’Union Européenne

Je voudrais pour finir réconcilier virtuellement Pierre Broué avec Stéphane Just. Ils furent sans doute, avec Gérard Bloch, les derniers trotskistes français. Ils se sont opposés mais ils détenaient tous les deux une part de vérité. Ils ont essayé en vain de léguer l’héritage du trotskisme. Stéphane Just décédé en 1997 n’a pas connu l’épisode de 2002 qui a amené tant de reniements. Il n’y a aucun doute sur ce qu’aurait été sa position.

A propos de l’UE, il s’était plusieurs fois prononcé contre les accords de Maastricht. Il avait regroupé des militants qui éditaient le bulletin « Combattre pour le socialisme ». C’est à ma connaissance pour la dernière fois en 2000 que ce bulletin rendait compte de la position de Stéphane Just sur l’UE. Il s’agissait du bulletin du n°1 de la nouvelle série faisant suite aux bulletins édités précédemment par Stéphane Just lui-même. La tendance à la capitulation sur la question de l’UE y était signalée dans ces termes :

« L'abandon (…) des mots d'ordre du Comité sur la question de l'Europe a été officialisé par ses supporters dans leur bulletin d'octobre 2000 qui publie un article volumineux sur l'Union Européenne sans qu'y figure aucun des mots d'ordre définis par Stéphane Just : "A bas l'Union Européenne, à bas les traités de Maastricht et d'Amsterdam, à bas l'Euro" »

Quelle misère ! Loin de reprendre les mots d’ordre de Stéphane Just, ceux qui se prétendent ses héritiers, se font le relais de la propagande la plus réactionnaire contre le Brexit et contre le Frexit. Tout cela en ayant « jeté par-dessus bord idées et principes » lorsqu’ils ont voté pour Chirac puis pour Macron. Vinvent Présumey écrit « le Frexit non merci » et Pierre Salvaing m’écrit dans un mail du 17 avril 2020 « Le "Frexit", pas davantage que le "Brexit", n'est pour moi en rien une revendication ouvrière. ». Et il ponctue son mail d’un « Il est donc inutile que tu cherches à discuter avec moi.  » En effet ! Ils ont aussi craché leur haine et leur mépris sur les gilets-jaunes (Voir le Supplément à CPS n°71) autant que l’avait fait Daniel Gluckstein que j’avais dénoncé à l’époque dans deux articles. Ajoutons au tableau qu’ils se sont réjouis qu’un groupe de soi-disant historiens ait contesté que Walter Hallstein fut un nazi de premier plan. Ils se sont en effet empressés de publier leur torchon. Quel bilan ! Ils votent pour Macron, crachent leur mépris sur les gilets jaunes, défendent l’UE au point de nier que Walter Hallstein était un nazi.

Ils défendent maintenant une politique réactionnaire au nom du trotskisme, de Stéphane Just et de Pierre Broué.

Décidément, il n’y a plus de trotskistes en France.

Il est certain que ceux qui ne se battent pas pour le Frexit ne sont pas trotskistes. Il est certain que ceux qui ont couvert le mouvement des gilets jaunes d’insultes et de calomnies ne sont pas trotskistes. Il est certain aussi qu’il faut pour le Frexit ne pas hésiter à se battre aux côtés de tous ceux qui veulent libérer la France de l’emprise de l’OTAN, de l’UE et de l’Euro. Il s’agit ni plus ni moins de construire un nouveau CNR. Les gauchistes et les sectaires qui veulent paraître purs et durs en refusant d’emprunter cet indispensable pont n’ont en fait nullement l’intention de passer sur l’autre rive. Ceux-là non plus ne sont pas trotskistes. Ce sont des révolutionnaires de la phrase dont l’attitude a été stigmatisée par Trotski lui-même dans le programme de transition :

« Ils piétinent sur place, se contentant de répéter les mêmes abstractions vides. Les événements politiques sont pour eux une occasion de faire des commentaires, mais non d'agir. (…) Dans la politique pratique, les sectaires s'unissent à chaque pas aux opportunistes, surtout aux centristes, pour lutter contre le marxisme. »

De fait, les sectaires appellent le plus souvent à voter pour des adversaires du Frexit (FI, NPA ou LO), quand ce n'est pas, ni plus ni moins, comme Vincent Présumey, pour Chirac ou Macron.

 

6. Avec l’AGIMO, pour la révolution socialiste

Avec l’AGIMO (Avant-Garde Internationaliste du Mouvement Ouvrier), nous ne pouvons pas prétendre assumer la continuité du trotskisme, avec notamment sa dimension internationale, mais nous sommes assurément les seuls à pouvoir encore prétendre lutter pour la révolution socialiste.

 

 Jean Dugenêt

 


Lire l'article complet, et les commentaires