Je t’interdis de dire « les oiseaux » !

par Roland Gérard
mardi 7 mars 2023

- Je t'interdis de dire « les oiseaux » !

- Quoi ? on peut dire « les oiseaux » quand même !

- Non, on ne peut plus dire « les oiseaux ».

- Ha, mais pourquoi ?

- Parce qu'avant, quand on disait les oiseaux, c'était un ravissement, c'était foison, c'était chanson … des bouvreuils, des chardonnerets, des mésanges, des troglodytes, des accenteurs, des verdiers, des serins partout... et toutes ces hirondelles... Si on allait un peu plus loin dans les champs, c'étaient les bruants, les alouettes... tellement d'alouettes, et des cailles... paye tes dettes, paye tes dettes, paye tes dettes...c'était foison … nous étions dans un bain d'oiseaux... Il suffisait d'avoir les oreilles à peine ouvertes pour vivre sa journée dans un concert... les yeux à peine ouverts, ça allait, ça venait, s’envolait, se posait... d'un arbre à l'autre, d'un buisson aux cultures... les yeux à peine ouverts pour assister à un ballet... Ce qu'on vit aujourd'hui, c'est puissance -10... Si les oiseaux étaient un corps chaud et vivant, volant, migrant, revenant... aujourd'hui il ne reste qu'un squelette... Mais le problème c'est qu'il est dans le placard le cadavre... personne ne le voit... si peu nombreux, si vieux maintenant sont ceux qui ont assisté à la danse...

- Faut dire quoi alors ?

- Il faut dire « les oiseaux qui restent »

- ???

- Tu sais que tous les oiseaux que tu vois autour de toi, ce sont des survivants, tu sais que ce sont des héros.Tu sais combien meurent tous les ans sous les griffes des chats, combien avalent des pesticides et en crèvent, combien se font descendre avec du plomb, combien se prennent une baie vitrée, combien se font percuter par une carlingue ou un pare brise, combien s’emmêlent dans des plastiques dans l'océan et se noient ? On ne peut plus dire qu'une chose « les oiseaux qui restent »... Et pleurer... Et se battre pour eux, il faut ! Ne serait-ce que pour soigner notre colère.

 


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