Jean-Claude Michéa : Qui commence par Kouchner finit toujours par Macron !

par Coeur de la Beauce
vendredi 21 décembre 2018

On ne présente plus l’inclassable Jean-Claude Michéa, professeur de philosophie (agrégé !) à la retraite et intervenant régulier sur France-Culture. Son dernier essai , « Le loup dans la bergerie », est un rappel du réquisitoire dénonçant l’abandon des classes populaires par la gauche de gouvernement, au profit d’une partie des classes moyennes aisées. Avant, la gauche c’était le parti des prolos, aujourd’hui c’est celui des bobos.

Kouchner qui engendra Macron par la suite est l’exemple-type de l’ancien gauchiste bon teint converti au libéralisme économique le plus féroce. Un parti socialiste, en fait « parti sociétal », qui ne parle plus qu’aux minorités ethniques et culturelles : antiracisme, lutte contre les « discriminations », discours anti-sécuritaire, qui ont pris le pas sur l’aspiration à la justice sociale et la redistribution des richesses.

Michéa est plus que jamais « orwellien », et rappelle cette « common decency » (ou « morale commune du peuple ») qui associe le monde travail à des valeurs de respect et de morale civique. La crise des gilets jaunes lui donne encore une fois raison : le petit peuple veut travailler et vivre des fruits de ses efforts. L’assistanat et les droits des « minorités » en tous genres, ce n’est pas sa tasse de thé. Le prolo aime le travail bien fait, le football, la bonne bouffe et les belles femmes. L’univers du bobo héritier des valeurs comparables à celle du romain au moment de la chute de l’empire, ce n’est pas celui de la gauche ouvrière.

On peut toutefois nuancer le discours de Michéa. La « gauche libérale » a mis en place les 35h, le retour à la retraite à 60 ans pour les carrières longues. Une partie de ses cadres est encore keynésienne. Mais la réalité est là : depuis les années 1980, elle a abandonné le socialisme, suivant l’échec d’un communisme stalinien à l’est et sans chercher des alternatives à l’économie de marché.

Les détracteurs de Michéa ironisent sur son succès auprès les lecteurs de « Valeurs actuelles », en oubliant que ces derniers sont thatchériens dans l’âme, donc à l’opposé des convictions économiques du philosophe. En fait, le litige idéologique concerne la sécurité, l’immigration et les valeurs sociétales. Il faut rappeler qu’il a quelques décennies, un consensus existait sur ces questions, à l’instar du discours de Georges Marchais à Montigny-les-Cormeilles en 1981 :

Sur ces questions de « culture », on oublie facilement les déterminismes qui peuvent pousser des pays comme la Pologne et la Hongrie à défendre leur identité : l’importance de la religion chrétienne notamment. En France, laicité et capitalisme ont toujours fait bon ménage, puisque l’un autorise l’autre si le premier n’est pas associé au progrès social. Michéa le rappelle avec raison, libéralisme économique, loi de la jungle et déréglementations vont avec le culturel. Qui connait des ouvriers qui militent au PS ou à LREM ? Avez-vous vu autre chose que des bobos distribuer des tracts pour ces partis ? Combien d’anciens gauchistes sont désormais des hussards du capitalisme triomphant ? Autant de vérités rappelées par Michéa, dont les analyses font mouche, plus que jamais.

« Le loup dans la bergerie », Flammarion « Climats », 166 p. , 17 euros en librairire


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