Jouyet, Fillon, et le troisième homme

Mais d'abord, qui est donc ce fameux Antoine Gosset-Grainville, jusqu'alors personnage totalement inconnu pour le commun des mortels. Déjà pour commencer, c'est un ami des deux ex amis, Fillon et Jouyet. Dans le langage populaire on dirait qu'il est, à l'insu de son plein gré, assis le cul entre deux chaises, ce qui n'est pas très confortable vous en conviendrez. Mais cet homme là n'est pas n'importe qui, d'ailleurs dans ce monde là on ne mange pas avec n'importe quoi, le couvert est toujours en argent. M. Gosset-Grainville est de ces personnalités qui possèdent un CV éloquent presque aussi long qu'un anaconda.

ENA, Inspection des finances, conseiller pour les affaires économiques de Pascal Lamy à la Commission européenne et ensuite directeur adjoint de cabinet du 1er ministre François Fillon.

Un homme qui compte dans l'ombre et qui aujourd'hui est projeté malgré lui dans la lumière des phares de l'actualité. Mais le témoin clé de se déjeuner pourrait bien apporter quelques éclaircissements. Les yeux dans les yeux, comme Cahuzac, dans le bureau d'un juge.

Le Point, qui a peut-être ses habitudes dans ce lieu proche de l'Elysée, prétend que les trois hommes sont rentrés par la porte principale pour s'installer ensuite dans un salon privé. La discrétion n'était donc pas de rigueur puisque François Hollande ne voyait pas d'objection à cette rencontre amicale. Par contre, nous avons des versions contradictoires des deux principaux intéressés sur qui est à l'origine de ce rendez-vous. Pour l'un c'est l'autre et pour l'autre c'est pas lui, c'est pas clair en tout cas ! Et Gosset-Grainville reste bien silencieux sur ce sujet pour l'instant. Mais on peut légitimement s'interroger sur les motivations de l'homme qui a lancé l'invitation. Avait-il une petite idée derrière la tête.

Ensuite était arrivé le moment fatidique où François Fillon avait demandé au secrétaire général de la Présidence de la République, son intervention dans l'affaire Bygmalion pour accélérer les procédures judiciaires et "taper vite" sur Sarkozy pour lui "casser les pattes" et empêcher son retour. Manoeuvre vaine et prise de risque inutile, on connaît la suite. Mais à cet instant précis, peut-être que Fillon "s'est tuer" politiquement comme s'il s'était mis un révolver sur la tempe. Car Jouyet, surnommé Gaston Lagaffe à l'Elysée, avait plus tard appuyé sur la détente avec l'aide des journalistes du Monde.

Mais où était Antoine Gosset-Granville lorsque ces paroles avaient été prononcées ?

Car le témoin du repas nie la véracité des affirmations de M.Jouyet. Mais était-il seulement présent pendant cet échange de propos.

Et c'est là que la fiction entre en jeu, car comme Monsieur tout le monde, Gosset-Granville aurait très bien pu s'absenter quelques minutes pour satisfaire une envie pressante. Simple hypothèse d'une banalité extraordinaire, mais l'occasion et quelques verres d'un bon vin font parfois le larron. A moins que ce besoin d'aller aux toilettes ne soit prémédité pour laisser les deux convives seuls et faciliter leurs confidences. Dans ce cas qui des deux aura été l'initiateur du complot de la pause pipi ?

Bien sûr ce scénario est purement fictionnel, et toute ressemblance avec des faits réels serait forcément fortuite. Mais le spectacle auquel nous assistons jour après jour n'est-il pas digne d'une triste et lamentable parodie que seul un metteur en scène fou aurait pu imaginer.