L’agriculture biologique est-elle durable, pourrait-elle nourrir toute l’humanité à venir ?

par écologie réaliste
lundi 12 mars 2018

L'agriculture bio gaspille le premier bien le plus précieux de tous, de plus en plus rare, la terre !

Du bio ou rien ! réclament les bio exigeants.

Ce pourrait être rien. Parce que l’agriculture bio n'a pas pris la précaution élémentaire de s'assurer qu'elle pourrait nourrir l'humanité, toute l'humanité. On sait pourtant les famines d'autrefois, lorsque tout le monde mangeait bio.

L'agriculture bio est-elle durable ? - L'agriculture bio gaspille la terre

De nombreuses études ont évalué les performances de l'agriculture biologique. Évidemment il faut comparer ce qui est comparable : les rendements pour de mêmes variétés, dans des sols et des climats comparables, avec les mêmes méthodes de culture (avec ou sans rotation de cultures par exemple, qui n'est pas une exclusivité bio), etc. Lorsque cette exigence élémentaire de bonne méthodologie n'est pas respectée – ça arrive – on peut obtenir n'importe quel résultat, ce qui permet à des sites militants d'affirmer n'importe quoi. Mais lorsqu'on compare ce qui est comparable, pas des choux et des navets, on mesure que les rendements bio sont plus faibles que ceux de l'agriculture "conventionnelle".

« L’analyse montre que l’AB souffre d’un handicap de productivité physique (moindres performances agronomiques et zootechniques.) » (Vers des agricultures à hautes performances. Volume 1. - Analyse des performances de l’agriculture biologique, Inra - 2013)

« Notre analyse des données disponibles montre que les rendements bio sont globalement inférieurs aux rendements conventionnels » (Comparing the yields of organic and conventional agriculture - Seufert - 2012)

« Nous avons analysé 362 études comparant les rendements de l'agriculture bio et de l'agriculture conventionnelle ► L'écart est de 20 %, mais diffère selon les cultures et les régions » (The crop yield gap between organic and conventional agriculture - de Ponti - 2012)

Cette dernière étude précise que les différences de rendement dépendent grandement du contexte, et de ce que l'on compare :

« Les différences varient entre des rendements bio inférieurs de 5 % (légumes non irrigués et plantes vivaces sur les sols faiblement acides ou faiblement alcalins), 13 % de rendement inférieur (lorsque les meilleures pratiques organiques sont utilisées), à des rendements 34 % moins élevés (lorsque les méthodes classiques et organiques sont le plus comparables). »

Les différences de rendement selon les cas permettent, en choisissant bien les exemples, à des sites militants de faire croire à d'excellents rendements du bio. Mais la réalité globale est que "lorsque les méthodes classiques et organiques sont le plus comparables", les rendements bio sont inférieurs de 34 %.

L'agriculture bio gaspille le premier bien le plus précieux de tous, de plus en plus rare, la terre.

 

Les vendeurs de bio prétendent que l'agriculture bio préserverait la terre, contrairement à l'agriculture conventionnelle qui la dégraderait. Toutefois, sur cette terre dite dégradée, la réalité est que les rendements de l'agriculture conventionnelle se maintiennent ou progressent, et sont bien supérieurs à ceux de l'agriculture bio.

Ce qui n'empêche pas les vendeurs de bio de demander quand même plus de subventions pour l'agriculture biologique, en raison de ses externalités positives supposées, dont la supposée préservation de la terre.

La même "logique" demanderait de taxer l'agriculture biologique pour ses "externalités négatives" : le bio gaspille la terre, c'est la réalité mesurée – et ce gaspillage aggrave l'urgence alimentaire sur la planète.

Nourrir toute la planète en bio nécessiterait ainsi de nouvelles terres cultivables ; où les trouver ? La terre manque déjà, et manquera de plus en plus pour de multiples raisons :

• Parce que la population mondiale continue de croître. Sept milliards aujourd’hui, neuf milliards bientôt ; il faut donc construire de nouveaux logements, de nouveaux bureaux, de nouveaux commerces, de nouvelles routes... Cinq pour cent des surfaces cultivées disparaissent ainsi tous les dix ans. Il y a peu de siècles, les New-yorkais campaient dans leur tipi au bord de l'Hudson, et les Champs-Élysées furent tracés au milieu des champs et des bois.
Méfions-nous des idées simplistes : ce ne sont pas quelques infrastructures spectaculaires mais ponctuelles, telles que le futur ex aérodrome de Notre Dame des Landes, qui dévorent la terre. Elle est grignotée petit à petit, inexorablement, par les innombrables petits coups de dents des nouveaux petits pavillons, des nouvelles petites résidences, des nouveaux petits quartiers, chacun avec leurs nouveaux accès routiers.

• Parce que le niveau de vie croît également. Ce qui se traduit par une demande encore plus importante, au-delà du seul accroissement numérique de la population 1.

• Parce que nous avons mangé notre pain blanc – ou plutôt nos terres noires, les meilleures, les plus productives ; il faudra donc une plus grande surface de terres nouvelles pour produire la même quantité de nourriture.

• Parce que les biocarburants transforment la terre nourricière en champ de pétrole 2.

Terre arable par personne dans le monde

Source : D'après données Banque Mondiale

La Chine, le Japon, la Corée du Sud, les Émirats arabes unis, etc., manquent déjà de terre, alors ils en achètent ou en louent, en Afrique, en Amérique du Sud, là où il y en a encore. La Chine dispose de 10% des terres arables mondiales pour nourrir 20% de la population mondiale. Elle achète donc des terres – pour nourrir les Chinois, pas pour les gaspiller en bio.

Le défi alimentaire qui s’annonce pour les années à venir est gigantesque 3. Il faudra produire plus de nourriture, comment faire ? Le bon sens seul permet de répondre : en augmentant les rendements ou en augmentant les surfaces cultivées, ou les deux. Le PNUD n'a pas beaucoup de mérite à le confirmer :

« Répondre à la demande alimentaire mondiale croissante impliquera soit une agriculture intensifiée (en utilisant davantage de produits chimiques, d'énergie et d'eau et des cultures et des espèces plus efficaces) ou de cultiver plus de terres. » (Programme des Nations Unies pour l'Environnement (PNUE) - rapport 2007 "Global Environment Outlook" (GEO-4))

• "Agriculture intensifiée" par des espèces plus efficaces. Des espèces plus efficaces ça existe, ça s'appelle des OGM. Mais l'agriculture biologique refuse les OGM – non pour leurs qualités ou défauts, mais pour des raisons idéologiques.
Il ne reste donc que l'autre possibilité :

• "Cultiver plus de terres". C'est une autre façon de dire : "abattre des forêts". C'est déjà commencé ! Dans la forêt amazonienne, en Afrique équatoriale, en Asie...

« En fait, c'est une meilleure science des pesticides qui a permis à l'Amérique du Nord de tripler sa production de nourriture tout en maintenant sa couverture en forêts à un niveau équivalent à celui d'il y a un siècle. » (Comment les pesticides sauvent le monde, dans le journal canadien National Post du 20 avril 2006, par Patrick Moore, cofondateur de Greenpeace, ayant ensuite rompu avec cette organisation)

 

Plus de bio, c'est moins de forêt.
Ce n'est pas durable

http://ecologie-illusion.fr/agriculture-bio-peut-elle-nourrir-humanite.htm

 

1 « On observe aussi durant cette période [entre 1982 et 2003] un décrochage entre l’accroissement de la population et la "consommation" d’espace, traduisant une augmentation annuelle des "besoins" par habitant de 7 m2 : maison individuelle au lieu de l’habitat collectif, surface plus grande des maisons (+ 15 m2 entre 1984 et 2006) et des jardins (510 m2 avant 1974 et 720 m2 après 1999), surfaces en espaces verts et de loisirs, diminution du nombre de personnes par logement entraînant une demande supplémentaire de logements (de 2,9 en 1984 par maison individuelle à 2 en 2006, et de 2,4 en logement collectif à 2) ». (Courrier de l’environnement de l’INRA n° 57, juillet 2009)
Traduction : la petite maison dans la prairie ce n'est pas durable, le petit pavillon grignoteur de terre ce n'est pas durable. Il faut se résoudre à, ou choisir, l'urbanisation verticale.

2 Pour la production de biocarburants [...] d’ici 2020, les pays industrialisés pourraient consommer jusqu’à 150 kilos de maïs par habitant et par an en vue de la transformation en éthanol – à parité avec la consommation alimentaire de céréales dans les pays en développement (FAO - 2011)

3 Voir ce document de la FAO : Une voie étroite pour la sécurité alimentaire d'ici à 2050...


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