L’Amérique couve les germes de son autodestruction

par Abdelkarim Chankou
vendredi 26 octobre 2018

Entre 1861-1865, la guerre de Sécession a déchiré les États-Unis pendant 4 années et fait près de 620 000 morts parmi les combattants, soit bien davantage que des guerres qui ont impliqué le pays, y compris les deux grandes guerres. Ces affrontements fratricides se sont achevés sur l'abolition de l'esclavage, la consolidation des institutions américaines... Celle que prélude cette histoire de colis piégés va-t-elle aboutir à l’affaiblissement des institutions et à la mort clinique des partis politiques ?

« Selon un sondage réalisé en mai par la société Rasmussen Reports, 31% des Américains jugent possible le début d'une guerre civile aux USA d'ici cinq ans. En mars, un sondage similaire avait été mené parmi les historiens et d'autres experts : un tiers d'entre eux s'attendaient au déclenchement d'une guerre dans un avenir proche. » Et le site électronique russe Sputnik qui se positionne comme un fournisseur d'informations alternatives de remarquer dans son édition du 12 juillet 2018 que « ce thème était encore tabou il y a peu, mais il est aujourd'hui évoqué par les principaux médias américains, écrit le quotidien Vzgliad . » Moins de trois mois plus et demi plus tard, Cassandre aura raison. Une longue liste de personnalités opposées à Donald Trump ont été en effet visées par des colis piégés ces dernières 48 heures dont 80 % à New-York. Outre des politiques démocrates tel que les Clinton, Barack Obama, son vice-président Jo Biden ou encore l'ancienne secrétaire d'État Hillary Clinton ont été ciblés mais aussi des médias et des acteurs comme CNN et Robert De Niro sans perdre de vue le milliardaire philanthrope George Soros et l’ex-patron de la CIA John Brennan. Peut-être que l’enquête menée actuellement par le FBI sur l’origine de ces envois conclura ou supposera que c’est un nouveau coup monté des services russes mais toujours est-il que Sputnik a tapé dans le mille. Alexander Soros, le fils du milliardaire d’origine hongroise, a publié une tribune dans le New York Times où il a dénoncé « le climat de violence politique actuel aux États-Unis. » le mot est lâché. « Violence politique ». Et il est loin d’être le seul à qualifier ainsi le climat étatsunien du moment. Les engins « joints » aux colis sont des bombinettes artisanales concoctées par des amateurs et destinées à faire plus de peur que de mal. Mais en plus de provoquer la panique générale au sein d’une population américaine plus que jamais divisée depuis l’arrivée à la Maison Blanche de Donald Trump, cette salve de colis piégés semble également programmée pour créer la confusion générale. Selon NBC, l'engin explosif envoyé à l'ancien patron de la CIA John Brennan comportait également « une parodie d'un drapeau de l'organisation Etat islamique tiré d'un montage humoristique qui circule dans les cercles de droite sur internet depuis 2014. »

ELECTIONS DE MI-MANDAT

Comme l’on pouvait s’y attendre, Donald Trump, trempé jusqu'aux os dans la campagne électorale pour les élections de mi-mandat prévues dans 12 jours et dans le marigot de l’affaire de l’assassinat du journaliste saoudien Jamal Khashoggi dans les locaux du consulat de son pays à Istanbul, ne s’est pas écarté d’un iota de sa rhétorique habituelle. Il a appelé les Américains à s’unir toute en faisant implicitement le lien entre les colis et les élections de mi-mandat que les Républicains craignent de perdre. « Il y a un moyen de régler nos désaccords. Il sera pacifique, ce sera dans les urnes », a dit le locataire de la Maison Blanche lors d’un discours à Mosinee dans le Wisconsin, le 24 octobre. Ceci sans rater les médias qu’il a accusés d’être responsables de ce climat délétère. « Une grande partie de la colère que nous voyons aujourd'hui dans notre société est causée par le traitement intentionnellement inexact et imprécis des médias traditionnels, que j'appelle les Fake News », a tweeté le président américain jeudi matin juste après l’arrivée des premiers colis. Si l’envoi de colis ou de lettres piégé(e)s à des individus identifiés comme adversaires ou des ennemis par les envoyeurs n’est pas une nouveauté dans un pays où les règlements de compte se font souvent à l’arme à feu, il n’en demeure pas moins que cette fois on est devant ce qui semble être un début de guerre civile, peut-être limitée dans le temps et l’espace mais une guerre civile quand-même. Au lendemain des attentats du 11 septembre 2001, on avait affaire à des lettres à l’anthrax. Ces envois piégés au bacille du charbon avaient fait cinq morts et celui qui en 2010 a été désigné par l’enquête comme l'auteur, s'était suicidé. Emportant avec lui son secret. En octobre 2010, en pleine campagne électorale pour la présidence, le candidat Donald Trump avait maintes fois dénoncé des élections truquées Comment ça marche ? , avant même le début du vote. « Ses allégations de fraudes égrenées avant même la tenue du scrutin font redouter que le candidat républicain donne carte blanche à ses supporteurs pour exprimer leur frustration au lendemain d'une déconvenue face à Hillary Clinton » écrit le Point citant l’AFP. Miracle : Trump gagna et la Bourse de New-York monta. Non pas pour saluer l’arrivée de l’ancien acteur de téléréalité mais parce que sa victoire allait calmer les esprits donc le climat des affaires. Entre 1861-1865, la guerre de Sécession a déchiré les États-Unis pendant 4 années et fait près de 620 000 morts parmi les combattants, soit bien davantage que des guerres qui ont impliqué le pays, y compris les deux grandes guerres. Ces affrontements fratricides se sont achevés sur l'abolition de l'esclavage, la consolidation des institutions américaines... Celle que prélude cette histoire de colis piégés va-t-elle aboutir à l’affaiblissement des institutions et à la mort des partis politiques ?

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