L’éducation au bonheur

par Taverne
vendredi 18 novembre 2011

Je sais qu’un tel titre va surprendre. Mais je l’assume. L’éducation est au centre de toutes les attentions et de toutes les critiques. Chacun a sa propre conception. La dernière idée dans l’air, c’est l’uniforme pour tous les élèves. Personnellement, je trouve que cette idée n’est qu’un pis-aller qui témoigne de l’échec de l’école. En effet, l’école devrait évaluer les aptitudes au bonheur de chaque enfant et l’aider à les développer.

Si cette mission était menée à bien, il y aurait peu d’enfants malheureux d’être privés de marques et les frimeurs en seraient pour leurs frais.

Plus généralement, le bonheur est absent des salles de classes. Quand on peut éviter l’exclusion et la violence, on est déjà satisfait. Pourtant, le bonheur est une valeur et, bien plus, une aptitude. Certains acquièrent cette aptitude par une longue expérience et deviennent heureux à…60 ans…70 ans. C’est trop long ! Le bonheur devrait s’acquérir bien avant. Et l’école doit y aider.

Le droit au bonheur est rarement reconnu de façon officielle. La constitution des Etats-Unis parle néanmoins de droit pour chacun à poursuivre son bonheur, le Bouthan mesure officiellement le niveau de bonheur du pays comme pour le PIB. Les régimes totalitaires prétendent savoir ce qu’est le bonheur et l’imposent par la force. La société occidentale en exploite l’idée à des fins exclusivement mercantiles. Il y a aussi des religions qui déversent leur opium, certaines affirmant qu'il n'y a nul bonheur sur terre et qu'il n'existe que dans les cieux que l'on gagne dans la douleur, par le martyr ou par d'autres voies rédemptrices et glorieuses. Enfin certains croient pouvoir à eux tous seul réenchanter le monde. Je n’ai pas cette prétention et je me contenterai d’évoquer l’éducation au bonheur. De plus, le bonheur ne me semble pas être un droit dispensé d’en-haut, c’est aussi le résultat d’un effort personnel. On n’a rien sans rien. Mais chacun mérite d’être aidé dans sa quête de bonheur.

Dispenser des savoirs est une chose, aider à l’épanouissement de l’individu dans la société en est une autre. Nous constatons que le minimum n’est plus satisfait quand la vie même n’est plus respectée : taux de suicide chez les enfants, viols, tortures, montée des IVG… Or, qu’est-ce que le bonheur sinon le respect de la vie ? La route de l’éducation au bonheur est longue donc mais je crois néanmoins qu’elle mérite d’être creusée.

Il est urgent de ralentir, de restaurer une dimension à taille humaine de l'existence, de prendre du recul au lieu de courir après la réactivité, de choyer notre environnement, de recouvrer l'estime de soi qui passe davantage par l'activité et l'entraide (on n'est pas heureux tout seul) que par la possession et la mise en avant narcissique de sa personne.

Il est urgent de développer la sagesse. C'est ce que disent les gens quand ils se ruent sur les oeuvres des nouveaux philosophes ou quand ils courent regarder "Intouchables" au cinéma. La sagesse est une condition essentielle du bonheur. Je connais des pauvres ou des personnes handicapées qui sont heureux. Vous en connaissez aussi. Ces personnes ont travaillé leur aptitude au bonheur au travers d'une certaine sagesse.

Je dis que l'aptitude au bonheur peut s'enseigner. Il faut y mettre les moyens, dans l'école. Mais ce n'est pas qu'une question de chiffre. La réponse n'est ni dans les quotas de suppressions de postes ni dans les promesses mirifiques de recrutements d'enseignants. La réponse est dans le qualitatif, dans le choix de société que nous voulons pour nos enfants.


Lire l'article complet, et les commentaires