L’été de la désinformation (6) : l’attrapeur de gogos

par morice
samedi 16 août 2014

Allez, on part dans la Lune cette fois. Pour démontrer qu'on a beau avoir des outils fantastiques d'information, il y en a toujours pour vous les triturer et en sortir autre chose que la réalité. Des faiseurs, des lanceurs d'alertes inutiles, des fabricants de buzz désireux avant tout de se faire mousser pour paraître aux yeux d'on ne sait qui (leur belle qu'ils veulent séduire, leur futur employeur, leurs copains de bistrot ou leurs faux amis de Facebook, qui sait). Voire des ignorants, comme l'exemplaire dont je vais vous parler aujourd'hui. Cette fois-ci, c'en est un qui clame depuis la mi-juillet sur You tube avoir trouvé tout seul la preuve photographique de la présence d'un martien sur la Lune, ou de quelque chose ressemblant à un être humain. Un cosmonaute égaré, errant depuis plus de 40 ans sur l'astre mort (c'est fou les réserves d'oxygène qu'ils emportaient !) ? La foule se précipite aussitôt !!! Depuis en effet que "Wowforrreeel" a mis sa découverte extraite d'un simple balayage de Google Moon en ligne, les gens s'agglutinent en effet sur son site : il y avait déjà 500 000 visionnages au 5 août, selon le Mirror, jamais à la traîne pour faire lui aussi le buzz (il y en a plus de 3 millions aujourd'hui !). Sur Yahoo, ç'est même devenu le sidérant "La NASA a t-elle photographié un extraterrestre sur la Lune ?"... C'est bien la preuve qu'ils ont la mémoire courte, les internautes. Un autre bidule bien plus impressionnant, qui n'a rien d'un être humain ni d'un martien, avait déjà été photographié il y a 47 ans exactement, mais ça, tout le monde l'a déjà oublié. L'internet est décidément un monde d'alzhéimériens.... sans aucune mémoire historique !

Le cliché mis en ligne à de quoi intriguer, certes. Mais c'est plutôt la méthode pour le présenter qui est sujette à caution. Tout d'abord, la "découverte" n'est pas le fait du dénommé Wowforreeel (alias WFR), mais d'un autre bloggeur qui l'a postée avant lui sur You Tube. Un dénommé Jasenko (un "homme à la barbe sexy", selon le drolatique qui l'a posté comme définition d'urban dictionnary à partir de son véritable nom !) dont le patronyme ne pointe plus sur quoi que ce soit, déjà, sur You Tube. Pour quelles raisons, on l'ignore, mais c'est "Wowforreeel" qui en a récupéré les seuls honneurs à ce jour (y-a t-il eu un deal de passé, la précédente proposition de Wowforreeel ayant crevé les scores ?). "Jasenko", dans Google Moon avait déjà dû passablement "travailler" son image pour obtenir celle d'une apparence humaine. Il avait dû nettement orienter le globe lunaire vers le nord- ouest pour obtenir le bon effet. Réorienté en sens quasiment contraire, on obtient une toute autre impression : celle d'un dome effondré le long de son diamètre... et non une allure de "Colosse de Rhodes" comme clamé par la fausse alerte You Tube...(l'ombre donnerait en effet un monstre de plusieurs dizaines de mètres de haut !!). Croire voir des visages ou des formes humaines dans des rochers ou d'autre matériaux, c'est même une forme de maladie psychologique appelée pareildolie. Un zozo a ainsi cru voir un visage dans le fantastique cliché de la comète Churyumov-Gerasimenko rencontrée cet été même ! Dans le même registre, une femme de Miami avait cru ainsi voir le visage de la vierge sur une biscotte (un toast), il n'y a pas si longtemps (on a vu celle du Christ aussi)... du Rorschach au quotidien, en quelque sorte. Chez "WFR", c'est pour lui par exemple un "visage de zombie" qui apparaît accroché à l'ISS : c'est en fait le module Soyouz de ravitaillement et son revêtement de protection !!! Le ridicule est bien présent chez notre homme, qui mélange tout, pourvu que ça attire le chaland !!! Notre phénomène semble y être sensible, donc à ramasser en plus chez les autres tous les bidules du genre : le monstre du Loch Ness prétendu visible sur Apple Maps, mais aussi, on s'y attendait, les inévitables prétendues constructions sur la Lune, dont une "station électrique" chères à d'autres fêlés (là encore emprunté à un autre site). L'inévitable BigFoot figure aussi à son palmarès, ainsi que l'inévitable lumière sur Mars (un bête reflet de soleil sur de la roche), la "chose" près du Soleil (un autre must de l'Ufologie) et toute une ribambelle d'OVNIs, bien sûr (ça vous aurait étonné en effet). A ce tarif-là il ne devrait plus tarder à afficher la face du Christ en nuages prétendument apparue en Ukraine... (grâce à un débutant de Photoshop !). Faire un million de hits avec un bug de Google Maps sur l'Antarctique, il l'a déjà fait, notre amuseur public... en effet, ce qui n'est guère rassurant sur la crédulité humaine, ma foi... il avait récidivé avec une "simple pub pour se marrer" au même endroit qui est montée à 700 000 vues avec des matériels et des bâtiments abandonnés sur la base de MacMurdo ! Et comme il cherche le buzz a tout prix, il lui arrive aussi de poster deux fois la même "découverte" mais en en changeant le titre. Ainsi chez lui le tracé dé glace brisée fait par un bateau au milieu d'un lac en Chine peut devenir altertnativement "Un tunnel vers la surface dans la lointaine Chine " (plus de 35 000 vues) le 21 évrier 2014 et se transformer en un "OVNI sortant de terre" le 27 février qui suit....(n'affichant plus que 5600 vues).Toujours sans chercher en quoi que ce soit à donner une explication, bien entendu !!!

La fameuse "gargouille de Mars", c'était aussi lui qui l'avait abondamment diffusée : indiquée ici comme l'ayant été par un "paranormal researcher"... qui avait valu un commentaire épique signé "Tom Rose" qui avait alors écrit : "la vidéo de gargouille, posté par chercheur en paranormal WowForReeel, prétend que c'est une idée de la culture martienne passée, au lieu de prendre une vue marrante de ce qui semble être juste une anomalie rocheuse. Mais la similitude de statues taillées dans la pierre depuis des siècles par l'homme est indéniable. Des théoriciens étrangers anciens ont longtemps proposé que les visiteurs d'autres planètes ont inspiré quelques-unes des œuvres les plus insolites de l'art dans l'histoire humaine, certains ont créé des milliers d'années. Où sont passés les artistes anciens et où puisaient-ils leurs inspirations ? Il s'ensuit que si jamais il y avait une civilisation sur Mars, similaire à la culture humaine, ils ont représenté leurs propres images et la mythologie en pierre. Les visiteurs martiens auraient pu se propager cette inclination en visitant l'humanité dans les premiers stades de la société." Sidérant de bêtise ! A l'occasion de sa mise en ligne, "WFR" avait cité une de ses références culturelles : ce n'était pas Victor Hugo mais plutôt "Don't Be Afraid of the Dark", film de série Z de 2011 (la première version datant de 1973). Visiblement, on n'a pas affaire à un intello !

Parfois il lui arrive de se lancer et de donner un d'avis : chez lui, alors, les cratères d'effondrement sur Mars sont nécessairement des endroits ou des vaisseaux se sont posés, obligatoirement !!! Bref, notre "Wowforreeel" est un faiseur, un du pire acabit, un suceur de sites pour y reprendre ce qu'il va mettre en ligne sous son nom avec un intitulé plus accrocheur et gagner le jackpot. Pas de texte à fournir, juste fureter, emprunter (voire... piquer) et rebalancer ; rien d'autre à cogiter que le titre pour faire le buzz : c'est tout bénéf pour lui !!! C'est la honte du net que ce genre d'individu qui déforme la réalité et désinforme un jeune public qui prendra son avis au premier degré, s'il ne cherche pas plus loin à se renseigner... son site ouvre sur l'image d'un fake notoire, celui d'un OVNI massif créé de toutes pièces. On le retrouve chez lui dans une vidéo intitulée "Massive UFO sighting Christmas Eve 2013 - a WFR production", qui est visiblement un montage vite torché qui fera plus de 7000 vues. Attaqué par un posteur avocat qui affirme tout de suite se désinscrire de son sa page You Tube à la vue de ce grossier montage, il se révéle tel qu'il (cynique) est en écrivant en réponse : "je sais que c'est moche, mais j'ai eu tant de plaisir à ça mettre ensemble. Muahaha. Désolé : D "... prouvant par la même occasion qu'il retouche aussi ses publications !!! Sur une des vidéos, "WFR" révèle le pot aux roses en indiquant son fonctionnemenr : "si vous avez des images d'OVNI ou d'autres images bizarres et étranges ou des vidéo que vous souhaitez partager sur WFR, s'il vous plaît soumettez-les à wfrdepot@gmail.com ou postez les sur le canal. Si vous avez une vidéo sur votre propre canal que vous souhaitez voir mis en évidence ici, postez-là avec un lien vers votre vidéo donnant la permission d'en montrer une partie, et dites-nous comment vous souhaitez être crédités. Répondra à autant que possible ! Merci Darrell G, Richard, Mary Y. et plus..." C'est en fait une petite PME qui s'est montée avec ces diffusions. Avec ces 146 vidéos trafiquéees et pompées partout, mises en ligne sous son label, le site ramasse en effet entre 167 euros et 1600 par mois, pour un revenu annuel de 2000 à 16 000 euros. Une petite PME qui ne prend pas beaucoup de temps (on lui propose les vidéos et il ne fait que mettre le titre !)... qui possède plus de 13 000 inscrits, et qui à été cliqué plus de 9 millions de fois depuis sa création le 3 février 2012...

A ce rythme, on ne devait donc pas échapper aux sempiternelles soucoupes nazies, vous allez me dire. Bingo le 31 janvier 2013 chez notre gugusse qui affiche en avoir trouvé la base... aux îles Bristol du Sud, le territoire des manchots, montrant pour se faire une image du stock de Panoramio de Google sur une cavité bien connue des géologues ; celle créée par une rivière circulant sous un glacier. Pour lui, il n'empêche, c'est obligatoirement un "Reichsflugscheibe", bien entendu (lire ici les délires du genre et l'article de base sur le sujet), car il a modifié l'image pour y glisser son délire nazifiant. C'est plus que ridicule et ça indique surtout chez "WFR" un très faible degré de connaissance des phénomènes géologiques, pour quelqu'un passant son temps à surfer sur Google Earth... A ce stade, remarquez, c'est plutôt Google Earth qui est coupable, à avoir laissé ainsi intituler ce cliché, un fake, dans sa base avec ce nom scandaleux... son auteur est vite débusqué ; il s'appelle Micky Hennemann, et c'est lui qui a posté la photo, déclenchant des commentaires outragés chez les internautes ("Micky, you're an a$$hole, polluting Google Earth with your bull$hit", "remove this idiotic picture - google earth is not to be used as toy"....) Un procédé honteux et un détournement flagrant de Panoramio qui ne devrait pas être admis, en effet ! Le même viendra saluer la sortie de Iron Sky par un "heyheyhey ! It´s a german one," pour saluer un photo montage de "dinosaures nazis" !!! Décidément !

Des choses étranges photographiées sur la Lune, ça fait près de 50 ans qu'on en a, pourtant. Dont de belles, comme la fameuse "shard" découverte et photographiée par Lunar Orbiter III voici 47 ans maintenant. A l'époque, on n'avait pas su garder la définition exacte des images envoyées par les 5 modules Lunar Orbiter, mais on retrouvera des années après le moyen de le faire, découvrant à nouveau cette étrange bout de rocher surgissant du sol. A l'époque, c'était tout autre chose, ce qu'ignore totalement notre "emprunteur" d'images (le fameux "Shard" ce n'est pas lui qui l'a cité !). La course à la Lune commençait, et il importait avant tout de cartographier le satellite si on voulait aller s'y poser. Aujourd'hui il est amusant de constater combien les américains regardaient par dessus leur épaule pour suivre ce que faisaient les russes. Leur programme Surveyor en rade (les démêlés avec Howard Hughes n'arrangeant pas les choses), c'est Boeing qui hérite du lot du défricheur de surface lunaire en décembre 1963. Au lieu du Surveyor version orbitale prévu, Boeing propose donc un bidule fort marqué par les premières sondes russes type Spoutnik II : à la base un compartiment fermé (les russes y mettront Laïka par exemple) contenant les caméras, avec comme voisins un transmetteur et des batteries, entouré d'un bâti supportant des équipements, en l'occurence ici uniquement les réservoirs de carburant pour freiner la trajectoire en vue de la Lune. Le tout portant à la base 4 panneaux solaires déployables fournissant 375 W de puissance. Deux mâts d'antenne de transmission et l'engin est fait. Vite fait, bien fait. Boeing a réussi un coup de maître en peu de temps : en astronautique c'est souvent la simplicité et la rusticité qui paye, on l'a vu. Si le module avait été un échec, la NASA avait aussi un plan B : le Lunar Mapping and Survey System (LM&SS), un dérivé du fameux sateliite secret "Keyhole" KH-7 muni d'un télescope... dont elle ne tenait pas trop à parler, on la comprend. CIA oblige. Je vous ai raconté ici la saga de sa (gigantesque) famille.

Les photographies montrées par Lunar Orbiter étaient très en dessous de ce qu'on fait aujourd'hui, ou plus exactement ces clichés ont été longtemps mal utilisés faute de moyen modernes de digitalisation. La cause en était non pas la qualité des optiques embarquées, mais plutôt le procédé d'envoi sur Terre des images saisies. A l'époque, pas d'ordinateur de bord sophistiqué et encore moins de mémoire de taille raisonnable pour stocker des centaines de photos. Et surtout aucun équipement radio assez sophistiqué pour envoyer les photos en temps réel. Comme preneurs de vues, les caméras provenaient directement du programme U-2, de très haute qualité, pourtant. Avec elles, se sont donc des photos argentiques qui ont été prises (avec un téléobjectif de 610 mm et une caméra grand angle de 80 mm, munie d'un objectif Xenotar fabriquée par Schneider Kreuznach, en Allemagne), et qui ont été ensuite développées à bord (à la façon de Polaroïd en pressant des couches d'émulsions ensemble), puis scannées et transmises ligne par ligne à la terre. Leur sensibilité était renversante au départ puisqu'elle affichaient l'incroyablement "finesse" de 1,6 ASA !!! La mémoire restreinte embarquée (elle ne faisait que... 128 k !!!) rendait les transmission d'images longues... le scanner saisissant des portions de film de 2,54 mm de largeur sur 55 mm de long seulement ! Cela prenait donc 10 minutes pour faire une image de résolution moyenne et 34 minutes pour une haute ! D'une résolution de départ de 1000 dpi sur le film, au départ, ce scanner de bord fabriquait une image TIFF en niveaux de gris en 8-bits à 300 dpi seulement, pesant la bagatelle de 29 mégas quand même, considérée comme une très faible qualité, donc, comparée à aujourd'hui. A l'arrivée sur Terre, elles étaient reconverties en 16 bits, et le "banding" fabriqué par le scanner retraité et "assoupli", puis sauvegardées sur bandes vidéos, seul support pouvant les contenir à l'époque. Les négatifs ainsi re-fabriqués seront distribués plus tard en grand format de tirages de 50 cm sur 60 cm. On y distinguait des détails de 60 mètres seulement... le tout inscrit sur un film qui faisait 70 mètres de long sur 7 cm de large. Tout cela semble aujourd'hui archaïque, mais ça a pourtant bien marché ! Un passionnant document de 99 Mo décrit ici point par point la technique alors utilisée. Les 5 modules Orbiter lancés raméneront 1654 photos au total, dont 840 destinées à définir les sites d'alunissage futurs d'Apollo. Le tout durant une campagne ayant duré 13 mois, de août 1966 à septembre 1967. C'est aussi Lunar Orbiter qui prendra les 5 et 8 août 1967 la première photo de "clair de Terre" prise de la banlieue lunaire. Si vous cliquez sur la photo, vous constaterez les progrès faits depuis pour restaurer digitalement les clichés initiaux. Pour les afficher en PDF, en 2006, les images ont été re-scannées à 200 points, via un scanner Scitex Eversmart Pro II. Le PDF en faisant des JPEG d'une qualité assez époustouflante. 

Pour arriver à une telle prouesse de définition plus de 40 ans après, on était reparti des clichés contenus sur un magnétoscope Ampex FR-900 analogique où avaient été stockées les images reçues (ici à droite), sur une bande de deux pouces Quadruplex unique à l'appareil. L'engin à lui seul pesait 270 kilos ! Leur remise en état sera toute une histoire. Les bandes enfermées dans des boîtes de fllm scellées (1500 au total !) avaient en effet été longtemps stockées au Jet Propulsion Laboratory (JPL) de Pasadena, Californie, mais en 1986, faute de place, il avait été décidé... de les détruire ! C'est l'archiviste Nancy Evans qui les sauvera, contre l'avis de ses supérieurs ! Ne sachant où les stocker (il fallait une température constante) c'est dans un McDonald's abandonné (mais à la clim toujours au point !) que le projet de l'archiviste et de quelques passionnés avait fini par s'installer : il devint aussitôt le Mac'sMoon. Les pièces manquantes des Ampex étant trouvées... sur e-Bay ! On avait oublié beaucoup de choses depuis, à propos de ces enregistrements historiques. Personne ne savait faire marcher les Ampex car il manquait le démodulateur des clichés d'origine. Des étudiants de l'Astrobiology Academy venus aider à ranger les bandes feront des découvertes étonnantes relatant les difficultés de transmission à la Terre des images : les boîtes marquées "M" iavaient été captées par la station de Madrid, en Espagne, celles en "W provenaient de Woomera, en Australie ; et celles marquées d'un "G" appartenaient au labo de Goldstone, en Californie. Les transmissions étaient si faibles que la NASA avait multipilé les stations de réception. Ce n'est qu'après avoir montré la première image restaurée (celle du clair de Terre !) que la NASA reconnaîtra son erreur en accordant une centaine de milliers de dollars pour continuer l'opération : la ténacité d'une toute petite équipe déterminée avait eu raison de la lourdeur d'une administration incapable de reconnaître les trésors qu'elle possédait et qu'elle avait failli faire disparaître à tout jamais par incompétence et irresponsabilité totale ! La NASA ne cherchait pas à dissimuler quoi que ce soit, en fait, c'était sa gestion archaïque qui avait fabriqué cette gabegie sans nom ! La presse (Time) s'emparera enfin de leur combat de restoration en gratifiant fin 2009 l'image du cratère Copernic, prise par le Lunar Orbiter N°2, le 24 novembre 1966, comme étant "l'une des grandes images du siècle". L'image prise à basse altitude est en effet aujourd'hui encore et toujours fantastique !

Or Orbiter avait trouvé une perle. Le rocher énorme dépassant du sol connu comme "The Shard" photographié par Orbiter III au loin du cratère Bruce qui avait donc été répertorié il y a près de 50 ans maitenant. S'il a beaucoup intrigué et intrigue encore, personne n'en fait aujourd'hui un bout de monument extraterrestre ou un morceau de bâtiment "construit par des aliens". Depuis plus de 40 ans qu'on l'a répertorié, tout le monde s'est fait à l'idée d'une manifestation géologique surprenante (une ancienne "dyke" de lave qui se serait débarrassée de ses cendres, mais par quel moyen il n'y pas d'érosion sur la Lune, de la lave jaillie par un escarpement de failles, car l'activité tectonique y subsiste, les questions demeurent...), et c'est tout. L'amélioration des images de Lunar Orbiter n'a pas apporté plus de renseignements sur l'étange phénomène. Avant le rafraîchissement, l'agrandissement 40 fois de l'image citée donnait une forme singulière d'un rocher se dressant pour certains sur un mile de haut, soit 1600 mètres d'altitude et pour d'autres sur quelques centaines de mètres seulement ; sinon moins encore. Ce qui intrigue plutôt, c'est pourquoi donc la NASA n'avait pas tenté d'en obtenir une image meilleure par la sonde Kaguya, par exemple. Pour faire sa carte de la Lune, Google a en effet utilisé semble-t-il aussi les images de la sonde japonaise "Selene" ("KAGUYA - SELENE - The SELenological and ENgineering Explorer").” Elles sont disponibles ici. On avait pu voir avec cette sonde un superbe lever de Terre, que je vous conseille d'aller voir ici (il faut le télécharger). C'est le LROC qui a permis de vérifier si le "Shard" était toujours là : on trouve une image faite à sa verticale dans l'immense bibliothèque que continue d'emmagasiner le satellite, et que les "buzzeurs" ne daignent pas compulser. On y voit pourtant une ombre immense, dans la pénombre. Celle de The Shard ! L'image à télécharger porte la référence M101017141LE.IMG.

La difficulté avec la Lune, ce sont justement les ombres. Elles varient du tout au tout, et selon l'éclairage du soleil et son inclinaison, on peut avoir une toute autre impression du sol. Un très bon exemple est donné par Google Moon lui-même, avec deux vues de la région du cratère Timocharis (*), la première prise avec un soleil écliarant sous un angle rasant de 2 degrés seulement, un cliché pris pendant la 16eme révolution du module de commande d'Apollo 15 Endeavour. La seconde prise sous un angle de 17 degrès : l'impression change du tout au tout. La cartographie de la Lune avant l'atterrissage des modules Apollo a dû représenter un vrai casse-tête, pour choisir les emplacements les moins à risques !

Wowforreeel, toujours lui, s'il cite néanmoins "The Shard", avait aussi largement répandu l'histoire de l'Hoax de la "construction lunaire" à partir à nouveau de Google Moon. Mais ce n'est pas la connaissance scientifique qui l'intéresse, loin de là. Au début de sa présentation, il avait versé ésotérique d'emblée en écrivant "pour certains, la Lune n'est que le vaisseau spatial qui a amené sur Terre les Anunnaki"... un non tout droit sorti de la "mythologie mésopotamienne"... Un scientifique désireux de mettre fin à ce genre de rumeur ridicule, avait eu l'idée de retourner voir l'image originale de la sonde Kaguya, mise en process par Google Moon, qui avait fabiqué le "glitch" que WFR avait pris pour une "construction". En ligne il avait donné toute la méthode en détail, point par point.... débusquant l'idée de l'OVNI architectural soi-disant découvert par WFR... une démonstration magistrale ; ruinant totalement l'annonce sensationnaliste de WFR !!! L'explication été montée à 25 000 vues. Or l'hoax avait atteint plus de 2 800 000... Une personne seulement sur 100, environ, était allée vérifier les dires de WFR !!! Ce qui fait 99% de crétins prêts à tout gober ! Il y a encore du travail à faire, sur internet, en matière de pédagogie.... dans les commentaires, WFR avait alors affirmé sans sourire "après l’avoir regardé longtemps sur une carte de Google Moon, je peux dire qu’il existe bien, et qu’il ne s’agit pas d’un faux. Je n’ai rien trouvé de tel dans les autres cratères lunaires. Regardez vous-mêmes et dites ce que vous en pensez. C’est l’une des découvertes les plus étranges faites sur Google Moon." sans finalement trop se mouiller... mais en indiquant insidieusement "avoir vu précédemment un objet très similaire sur des cartes interactives de l’Antarctique. Il était aussi de forme triangulaire, un de ses angles faisait précisément 90° et ses dimensions étaient aussi de 125 mètres par 90". L'objet qu'il avait "vu" en premier n'avait pas cette forme (il était rectangulaire !) et c'était une autre imperfection de montage de Google Maps cette fois ! Le second, pour se rattraper, était plus que tiré par les cheveux, à vrai dire.... Dans les commentaires, on avait eu droit cette fois-là à "base spatiale secrète évidente", ou à "base américaine" voire "base russe", (il n'y ont jamais mis les pieds, sur la Lune !) mais le commentaire qui revenait le plus était bien sûr "base extraterrestre"... Il y a vraiment du travail à faire sur le net... beaucoup de travail, à lire les annonces comme celle du mois sur l'allure humaine soi-disant aperçue sur la Lune !!!

Selon Noé Petro, un scientifique de la mission Lunar Orbiter Renaissance (LROC) lancée en 2009 et qui est actuellement toujours en orbite autour de la lune, affirme que l'image provient plutôt des prises de vues faites par les missions Apollo 15 et 17 missions de 1971 et 1972. Le LROC n'a pas montré ce genre d'artefact, aussi selon lui, ce n'est qu'une poussière, un cil, des rayures sur le négatif qui ont provoqué l'apparence de l'être humain ou du géant. "Rappelez-vous, c'était dans les jours pré-numériques et toutes sortes de choses désagréables pouvaient arriver aux films." dit-il dans le MailOnLine. "Scratch", "glitch", sont les termes qui sont évoqués par d'autres spécialistes en efffet. Des ombres étranges, ce n'est pas ce qui manque en tout cas sur la Lune. Tout le monde peut en trouver d'intriguantes, comme celle ici visible au dessus du très beau cratère de Timocharis de 33 km de large, situé sur la face visible lunaire, dans la Mer des Pluies (Mare Imbrium). C'est pris à 100 m d'altitude et ça fait environ 350 m de long. Je vous joints la copie écran de Google Moon, et vous indique la localisation exacte de l'artefact à découvrir : 27°46' 26,97" N et 12°51'21,81" O. Je n'ai aucune idée de ce que ça peut être, mais ne vais pas vous dire que c'est un cosmonaute géant de plus de 300 m qui dort couché sur le côté, ce à quoi ressemble l'image quand on l'oriente fortement vers la droite... comme quoi tout le monde n'a pas la vision biaisée d'un faiseur du net.

 

(*) Timocharis d'Alexandrie (env. 320 av. J.-C. - 260 av. J.-C.) était un astronome et un philosophe grec. Probablement né à Alexandrie, il était contemporain d'Euclide. Aux alentours du iiie siècle av. J.-C., avec l'aide d'Aristillus, il créa le premier catalogue d'étoiles du monde occidental. Plus de 150 ans après, Hipparque comparera son propre catalogue d'étoiles à celui de Timocharis et découvrira que la longitude des étoiles avait changé au cours du temps, ce qui lui permit de déterminer la première valeur de la précession des équinoxesIl fit la première mention écrite de Mercure (Wikipedia).

Pour tout savoir sur Lunar Orbiter et ses fantastiques images :


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