L’événement du 2 août 1914, dont les médias français se gardent bien de parler

par Thierry SALADIN
lundi 4 août 2014

Il est bien connu, surtout des lecteurs d’Agora Vox, le média citoyen, que les médias classiques sont aux ordres. Aux ordres, c’est-à-dire qu’ils ne véhiculent qu’une information conforme à ce qu’il est convenu de dire, une information conforme à la pensée dominante qui, elle, est exclusive. Une information choisie en fonction de critères divers dont la géopolitique et l’intérêt marchand ne sont en aucun cas étrangers. C’est ainsi que l’on manipule les masses, et c’est pourquoi, ici un marchand d’armes, là un empire de la construction d’ouvrages, pour ne parler que de notre pays, la France, se sont empressés dans les années quatre-vingt d’acheter ce que l’État avait décidé de privatiser afin de pouvoir transmettre "la bonne parole".

Ainsi, nous vivons une époque dans laquelle tout se passe comme si ce dont on ne parle pas n’existait pas. Et pourtant...

Et pourtant, mis à part les lecteurs d’Agora Vox, qui saura que le 2 août 1914 débutait un événement de portée mondiale à Paris, la Ville lumière ?

Un de mes amis, Pierre Dieumegard, a rédigé un article que j’estime nécessaire de porter à la connaissance des lecteurs du média citoyen. C’est ainsi qu’avec son autorisation je vous le soumets tel quel.

Août 1914 à Paris : le congrès qui n'a jamais eu lieu.

Le début du XXe siècle était une période optimiste, avec le développement de l'électricité, du téléphone, du commerce international, et du progrès en général.

Ce n'était pas encore l'époque du tourisme de masse, ni des séjours Erasmus dans des pays étrangers, mais les gens voyageaient en Europe, que ce soit pour le plaisir, pour des motifs professionnels, ou bien pour des motifs politiques et sociaux. Les congrès Solvay réunissaient les plus grands spécialistes en physique et en chimie depuis 1911. Le premier congrès international syndicaliste avait eu lieu à Londres à l'automne 1913. Le dixième congrès socialiste international devait s'ouvrir à Vienne (Autriche) le 23 août 1914.

La France aussi avait sa part de congrès internationaux. Depuis 1905, les congrès internationaux d'Espéranto réunissaient chaque année plusieurs centaines de participants désireux de faire avancer la cause d'une meilleure compréhension internationale au moyen d'une langue neutre et fraternelle, l'espéranto. En 1913, le congrès de Berne (Suisse) avait réuni 1200 participants, ce qui était dans la moyenne haute des années précédentes. Pour 1914, le Congrès Universel (Universala Kongreso) devait avoir lieu à Paris du 2 au 10 août, et plus de 3700 personnes venant d'une cinquantaine de pays s'y étaient inscrites, soit trois fois plus qu'à Berne !

Ce devait être grandiose. Le lieu du congrès était le Gaumont-Palace, le plus grand cinéma du monde. Paul Painlevé, futur ministre de l'Instruction publique et Président du Conseil pendant la Grande Guerre, devait faire un discours inaugural.

Fin juillet, Ludwik Zamenhof, l'initiateur de l'espéranto, était parti en train de Varsovie, où il habitait et exerçait la profession de médecin spécialisé en ophtalmologie. Fin juillet aussi, les grandes puissances européennes décrètent la mobilisation générale, puis la guerre le premier août.

Le train de Zamenhof et sa famille a été bloqué à Cologne, en Allemagne, puisque le passage de la frontière avec la France était interdit pour cause de guerre. Ils n'ont pas pu revenir à Varsovie, faisant partie de l'empire russe, puisque la Russie était aussi en guerre contre l'Allemagne. Il leur a fallu plusieurs semaines pour réussir à revenir chez eux en passant par la Suède.

Pendant ce temps, à Paris, la séance inaugurale du dimanche 2 août a été de pure forme, pour les 900 congressistes présents. Après quelques allocutions consacrées à l'actualité internationale, elle ferme ses portes deux heures plus tard, chacun essayant de rentrer chez soi. Les congrès internationaux d'espéranto ne reprendront que vers 1920.

Cent ans après, en 2014, la paix est elle plus solide qu'en 1914 ?

N.B. : Ce soir, le 2 août 2014, se termine le Congrès Mondial d'Espéranto à Buenos-Aires, en Argentine. L'an prochain, le centième Congrès Mondial d'Espéranto se tiendra en France, à Lille, du 25 juillet au 1er août 2015. (Lille Grand Palais)

N.B. : http://www.lve-esperanto.org/lille2015/fr/congres/index.htm


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