L’hyperprécaution : le syndrome pandémique de H1N1

par Yannick Comenge
samedi 25 juillet 2009

« De la gestion hypochondriaque de la pandémie dite du siècle » : Voilà probablement comment les générations futures analyseront le traitement de H1N1 par notre société. Alors que le progrès scientifique a fait des grands bons, il est amusant de relever l’hystérie collective qui s’est emparée de nos politiques, médecins et médias. 

La grippe porcine née dans des régions d’élevage intensif au Mexique a déjà montré en quelques mois combien la santé mondiale pouvait être fragile. Au niveau organisationnel, au niveau communication, au niveau statistique, cette grippe pandémique doit être analysée d’un regard acéré pour éviter que demain une pandémie plus dure ne puisse causer des ravages étant donné les défauts déjà repérés.

Cette grippe donc a montré des failles importantes au sein des Etats, au sein de l’OMS et également dans la gestion pré-pandémique en France. Je propose une évaluation, à la veille de la vague annoncée, de tout ce qu’on peut constater à ce jour.

 

I – La crise de l’OMS et des statistiques.


On peut d’abord souligner la lenteur de la mise en alerte pandémique. Ainsi, alors que l’OMS a fait part de son inquiétude à la fin avril. De nombreux articles anglo-saxons pointaient du doigt la légèreté de la mise en alerte mexicaine qui a réagi lentement. Savoir si c’est l’OMS qui a fait l’autruche ou le Mexique... Il est difficile de dire mais à la fin avril, alors que Mexico se couvrait de masques, on comptait selon des sources de presse américaine environ 23000 cas de malades… L’OMS clamait à la même époque environ 3000 cas avérés. Ce terme est d’ailleurs grossier. On parle de cas avéré si un médecin d’état a pu qualifier les symptômes puis vérifier le virus sur des échantillons. Donc le duel entre chiffre avéré et chiffres réel est une problématique lourde. Prenons le cas de l’Argentine qui est au banc des coupables. A la suite des élections de fin juin, le nombre de cas est passé de 3000 à 100 000 du jour au lendemain. Mais l’OMS a continué avec ses chiffres largement atténués, jusqu’aux journaleux de l’AFP qui reprenaient sans se poser de questions les statistiques de l’instance mondiale. Il aura fallu que le quotidien espagnol « El Pais » rompe la chanson monotone de l’OMS pour que certains critiquent enfin cette désinformation. En effet, difficile d’expliquer que Buenos-Aires pouvait être en état d’urgence, difficile d’expliquer que les hôpitaux soient pris d’assauts sans revoir le nombre fictif de malade à la hausse. Idem pour le nombre de morts… 200 cas en quelques semaines selon des groupes de Médecins du Monde qui ont du être tancés pour avoir trop parlé. Le cas Argentin montre combien la politique peut être néfaste en terme de santé publique car Kirchner s’est conduite de manière totalement cynique organisant des meetings alors que les cas de grippés commençaient à se « voir ». Je parle donc d’un manque de vraie transparence, pas celle qui suppose d’un service sanitaire national qu’il communique avec un autre. Je parle de responsabilité globale vis-à-vis des citoyens. En effet, de quel droit une communauté médicale pourrait contenir des informations sans les divulguer ? Où est donc la démocratie dans ce cas précis ? D’autre part, ne doit on pas exiger quel que soit le niveau culturel, le niveau social une simple vérité. Au lieu de cela, l’OMS et les Hautes autorités sanitaires communiquent des statistiques foireuses qu’on peut remettre en cause simplement en se branchant sur Facebook ou Twitter ou sur les médias anglo-saxons. Là, la vérité remonte, les journalistes ne sont pas à la botte des médecins ou des ministres et font un job carré sans tomber dans une autocensure toute droit sortie d’un autre temps... J’insiste. Sur les sites communautaires, la vérité sort de toute manière. L’Argentin dira ce qu’il voit, le Londonien crie son incompréhension et le Français se demandera pourquoi on le laisse partir en vacance alors qu’il risque d’être mis en quarantaine au bout…


Donc, nous avons un problème de démocratie sociale, de transparence globale et de responsabilisation des citoyens. Au lieu de cela, on infantilise, on sacralise le politique, on piédestalise des médecins empêtrés dans des conflits d’intérêts sur lesquels je reviendrai. Il y a le souci de communication intense concernant les chiffres avérés et réels…


A l’antipode de nos pratiques de santé publique qui montre le médecin hospitalier ou le mandarin comme le seul apte à gérer l’information médicale et qui contingente le malade au seul devoir de se taire et d’accepter tout sans palabrer, nous avons le modèle anglo-saxon. Là, on parle sans problème des nombres de cas, de la probable ampleur du problème. On donne des fourchettes de l’hécatombe et surtout on se ravise si on convient que la pandémie n’est pas aussi robuste que prévu. La Grande Bretagne annonçait ses milliers de cas alors que la France évoquait ses enfants en voyage scolaire. Elle assumait ses centaines de milliers de patients dès mi-juillet et continuait à laisser faire la presse. Tout était donc clair. Aux USA, au Royaume Uni, et en Espagne, toute information nouvelle se retrouvait sur les sites de presses et se retrouvaient dans les journaux dans la demi-heure qui suivait. Donc un vrai travail sérieux. Des péripéties particulières comme les 21 « Marines » de l’USS Iwo Jima qui avait été mis en quarantaine sur leur vaisseau. La cinquantaine de militaires espagnols alités à Kaboul et aussi l’histoire du premier bébé ayant succombé à Houston après avoir été traité pendant plusieurs jours sans succès par une équipe de médecins aguerris. La presse française doit donc se demander pourquoi elle resterait encore une fois à la botte de quelques éminences de l’HAS (Haute Autorité de Santé)…

 

II- la tragi-comédie française :


Le ton a été donné d’emblée. L’Alerte de l’OMS faisait l’effet d’une bombe dès la fin du mois d’Avril. La blogosphère aussi ne parlait plus que de cela. Mais on a pu trouver une forme de nivellement médiatique. Tout le monde blablatait dans le même sens. Curieusement aussi, des nouveaux blogueurs, très bien positionnés ont émergés. Habituellement, on ne trouve pas des émergences aussi nettes et aussi à l’unisson… Les sites du gouvernement et des autorités de santé se sont trouvés en couverture de chaque recherche effectuée par mot clef… que ce soit avec « grippe », « flu » ou « swine flu »… Curieux effectivement car en vieux routier de la Toile, je n’ai pas retrouvé ceux qui habituellement étaient réputés pour leurs analyses gênantes. Ainsi, l’info livrée sur les journaux et sur la Toile ressemblait à un « pré-maché » pathétique… rien de discordant… un unisson qu’on a l’habitude de voir sur le google chinois ou sur le cyber-espace iranien… voilà donc un premier souci qui m’est apparu de manière risible.


L’autre point problématique est la prise de décision politique en regard de l’impact de la pandémie. Dès le départ, la messe était dite. La grippe porcine faisait des enrhumés mais peu de morts. Le virus lui-même qui est déjà repassé au porc récemment selon des sources Argentine n’a pas été muté en abominable « mass killer ». On est donc en face d’une grippe classique et seuls les gens fragiles devraient être mis en « cloche de protection ». Je veux dire pour certains des masques suffisent, d’autres le tamiflu voire quelques antiviraux peuvent éviter les complications de la grippe… des surinfections qui auraient été plus mortelle que le H1N1. Donc, face à ce virus galopant, nous avons vu Mr Houssin et Mme Bachelot monter une triple ligne Maginot (masque FFP2, tamiflu, vaccins). Et surtout des dépenses sans fins… On a vu une Pasteurienne hagarde sortie d’outre tombe ou de son sommeil venir prôner la vaccination de toute la population… idéal pour remplir les caisses d’Institutions particulièrement vénales qui profitent également de la manne financière de ces vaccins. On a vu l’Etat acheter 94 millions de doses vaccinales à trois laboratoires puis racheter encore des doses à une autre firme qui sûrement a dû piaffer pour faire de l’argent facile… Nous sommes un des rares pays à vouloir ainsi réagir de la sorte. On évitera peut-être quelques décès… mais l’adjuvent fait si rapidement pour ce vaccin si peu testé ne va-t-il pas causer d’autres problèmes sanitaires ? Certains se posent la question… Au delà de ce point, on peut soulever le souci de cette proximité lamentable du politique et du milieu médical et pharmaceutique. En effet, les choses sont telles que François Sarkozy travaille au sein d’une firme qui produira massivement ces anti-grippes disponibles… Le souci serait risible si le prix de cette vaccination pouvait être double : le prix effectif qui endette nos systèmes de santé, les effets secondaires d’un vaccin mis au point trop vite…

Certains parleront d’un coût économique pour une nation paralysée par les grippés.

L’argument est virtuel. En effet, à quoi servirait d’avoir un pays « en ordre de bataille » et sans grippés face à un monde globalisé totalement paralysé par des malades éternuants ou fiévreux. Oui, on en est là. Nos gouvernants ont en mémoire la canicule et ses morts. Ils réagissent de trop et ouvrent la voie de l’hyper-précaution mal gérée.


Plus grave, nous monopolisons des ressources qu’il faudrait économiser pour des pandémies plus sérieuses… comme celles qui pourraient venir en cours de route d’un « drift » du H1N1 et qui le transformerait en vrai « global tueur ». Nous aurions alors notre ligne Maginot ou ligne « Bachelot » qui empêcherait le H1N1 de passer mais pas le nouveau virus « drifté voire shifté (mutation lourde) ». On notera aussi la bêtise d’autres « spécialistes » adoubés. Ainsi Pecresse et son lampiste-crétin qui n’est autre que son directeur de l’INSERM se promenait récemment en clamant que la recherche était coalisée face au virus… en connaisseur, je dirai qu’alors ce sera un beau bordel si les chercheurs INSERM s’y mettent ; on risque de les voir se chamailler autour de la paternité de brevets pendant que le virus fera des siennes… Plus sérieux, les vrais scienteux du CNRS ne sont pas compromis dans ces tirades puériles... Moins de communication, moins de vent et plus de sérieux… le CNRS et les gens de Sauvons la recherche ne sont pas tombés dans les prétentions typique d’un gouvernement devenu paradoxalement cacophonique…


La France est donc atteinte d’une maladie imaginaire et devrait soigner ses politiques, ses médecins voire ses médias. Un peu de démocratie à ce jour pourrait permettre des économies et des préparations sérieuses à des difficultés prévisibles ou durables. La pandémie approche, elle est assez tranquille en terme de mortalité. Nous en faisons trop. J’ai d’ailleurs un souci pour la méthode. Car si l’hystérie médicale que nous observons est répandue, alors il suffit de trois ou quatre pathologies pour comprendre les raison du trou de la sécurité sociale. En parallèle, nous verrons des élus et responsables supprimer des veinotoniques aux personnes âgées alors que selon les experts ces produits sont largement utiles et efficaces… Après le principe de précaution fort louable, nous pouvons dénoncer le syndrome actuel : l’hyper précaution. Au sommet de cette tendance, un quarteron de bras cassés : Fillon, Pecresse et Bachelot et leur pléthore de lampistes médusés qui les accompagnent partout.


En conclusion. On constate des problèmes de l’OMS en terme de gestion pandémique et d’alerte. On peut se questionner sur les conflits d’intérêts globaux qui font que politiques et médecins n’arrivent pas à faire émerger une réponse cohérente face à une pandémie. Il y a une défaillance médiatique typiquement hexagonale mais dont la responsabilité est la puérilité de nos politiques. Nous avons pour l’instant une chance d’avoir un virus peu robuste. Le problème est qu’il peut muter et là, nous aurons déjà baissé notre garde.


Lire l'article complet, et les commentaires