L’iceberg François Hollande et la panne de désir

par hommelibre
samedi 28 avril 2012

Les petits mots ne font pas les grandes campagnes. Mais sans eux il y aurait des jours d’insupportable attente : « Où en sont-ils ? Qu’ont-ils dit ? Qu a flingué l’autre ? » Car autant que le programme, les personnalités des candidats conditionnent le choix des électeurs. Au jeu de qui a flingué l’autre Hollande est gagnant.

La presse française a déjà tourné sa veste et choisi François Hollande. Il semble relativement échapper à la critique alors que Nicolas Sarkozy y est constamment soumis. De plus les photos les plus fréquentes de Sarkozy le montrent avec le visage tendu, traits tirés et fatigués, alors que Hollande a repris des kilos et son visage rondouillard marqué de son sourire enfantin semble fait pour inspirer confiance et normalité, comme s’il surfait en eau calme et que la France était une lagune sans un souffle de vent. La presse se couche-t-elle déjà devant son possible nouveau maître ?

Hollande se positionne déjà en président. L’attitude fait le discours. L’habit fait le moine. Au point où on lui demande déjà qui sera son premier ministre. Hollande fait mine de prendre Sarkozy de haut, d’être déjà président comme si l’actuel n’existait plus. Le nouveau monarque s’avance. Quelle impudeur chez ce candidat qui était entré dans la synagogue à Toulouse, le jour de la tuerie dans l’école juive, avant que le président en exercice n’y entre lui-même, et qui plus est avec sa compagne qui ne représentait pourtant rien. Le style affable de Franfrelande cache une bonne dose d'irrespect et d'usurpation de place. L'art de réaliser un hold-up avec le sourire. Et Nicolas Sarkozy, cassé, qui ne sait plus où donner de la tête.

S’il fallait voter sur le style, le sourire poupon de Fanfrelande n’inquiète pas. Il suscite même un réflexe maternel. Mais chez cet homme d’appareil, ce qui est devant ne peut être comme ce qui est derrière. Il a été dans la position de ceux qui intriguent. Il n’a jamais montré d’énergie tranchée, décidée, déterminée. Ce que l’on sait avec lui n’est que le sommet de l’iceberg. La base molle se traite dans les couloirs, négocie des places dans les petites salle à l’abri des regards.



« Le point faible de François Hollande, c'est l'inaction. Est-ce que les Français peuvent citer une seule chose qu'il aurait réalisée en 30 ans de vie politique une seule. » La phrase assassine est de son ancienne compagne Ségolène Royal. Même en ôtant le contentieux personnel entre eux, cette sentence est terrible. L’inaction. Nous avons tous un ou plusieurs mécanismes récurrents, de ceux sur lesquels il faut des années de travail personnel opiniâtre pour les voir perdre un peu de leur emprise. L’inaction semble faire partie de ce genre de mécanismes. Cela ne semble pas étranger au personnage. L’inaction, pour un président et dans la situation actuelle, c’est terrible.

On pourrait se demander si Nicolas Sarkozy vaut mieux. Lui on le connaît. Histrionique, il s’est assez exposé pour que l’on sache par coeur ses tics même les plus détestables. François Hollande, qui jusqu’il y a peu n’arrivait pas à placer des phrases entières, qui avait l’élocution d’un enfant auquel on va couper la parole, arbore le sourire narcissique de celui qui fera tout pour se faire aimer. Un gentil garçon, Fanfrelande. Comme Sarkozy. Au déficit d’attention de Nicolas Sarkozy qui le pousse à se montrer, répond le déficit d’affection de François Hollande qui le pousse à chercher à être aimé.

Deux immaturités. Et d'une manière ou d'une autre les deux candidats sont des miroirs du pays.

Pour se faire aimer Hollande paiera : subventions sélectives, clientélisme, dépenses de l’Etat, promesses. J'ai le sentiment qu'il ne lâchera rien sans faire le calcul de ce qu’il engrange au titre de son aura personnelle. Ce n’est pas par hasard qu’il copie François Mitterrand. Chacun a ses défauts après tout. Mais le double langage, à propos de la vertu par exemple alors que son parti n'en montre pas vraiment la couleur, est particulièrement désagréable. D’autant plus qu’il est pratiqué par le représentant d’un mouvement dont les bons sentiments dégoulinent.

Hollande sera plus Mitterrandien, plus secret. Y a-t-il eu de vrais grands débats au PS quand il était premier secrétaire ? Pas formellement. Les primaires par exemple n’ont pas été des débats, mais des catalogues juxtaposés. Seuls les congrès servaient à lâcher un peu la pression que le reste du temps il maintenait sous le couvercle. Sans toutefois montrer assez de vraie autorité pour discipliner son parti. Et quand je vois cet homme déclarer avec autant d’insistance qu’il est normal, j’ai envie d’aller regarder ce qu’il cache. Image d'un iceberg.

Peut-être faut-il un iceberg, à l'image de ces temps de fracas. Le Titanic est une allégorie d'un temps où la superbe et la puissance affichées font naufrage. Peut-être faut-il que vienne celui qui fera couler le navire. L'image n'a aucune valeur de pronostic politique. Elle traduit surtout une profonde méfiance envers un discours trop lisse et hautain. Cela ne rend pas Nicolas Sarkozy aimable pour autant. Mais il ne cherche visiblement pas à se faire aimer.

 

Cette élection me fait réaliser à quel point l'Europe en général et la France en particulier ont plongé dans la morosité et une sorte de déprime. Comment ranimer le désir ?


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