L’ignorance une chance

par ddacoudre
jeudi 11 avril 2019

Curieusement nous avons besoin de Savoirs pour comprendre la complexité du monde et c'est l'ignorance qui nous sauve. Si nous n'étions pas ignorants nous n'aurions jamais la curiosité de comprendre et de déchiffrer le monde qui nous entoure.
Que ce soit par la peur de voir le ciel nous tomber sur la tête ou bien de comprendre comment faire germer la plante nourricière, il nous faut une raison.

Le connu rassure.

Dans notre société, traiter quelqu'un d'ignorant c'est le rabaisser, lui infliger une humiliation. Nous fusionnons allègrement l'ignorance comme synonyme de bêtise ou d'imbécile. 
Ne pas savoir ce que nous aurions pu apprendre est être ignorant. Pouvons-nous tout apprendre non, pouvons-nous tout savoir non. 
Alors pourquoi avons-nous des vérités ? Que cherchons nous la vérité ou la certitude. Nous recherchons la certitude, et lorsque nous faisons une observation qui nous l'apporte, nous affirmons que c'est vrai, et devient vérité.
Ce rapport entre la certitude et la vérité nous rassure. De fait nous n'avons aucune envie, aucun désir de voir cette relation s'emousser, s'amenuiser, être remise en cause parce que par elle nous nous installons dans le déterminisme, dans la normalisation, dans la rationalité.

Dans ce qui est mesurable et dévient connu.

100 ans.

La curiosité de notre existence est que cette volonté ne se vérifie que dans certaines situations. Dans un environnement qui soit propice à son développement, au point que l'on ne puisse pas mesurer l'évolution inévitable de la planète. Pour peu que les cycles se renouvellent régulièrement à notre perception, nous vivrons sans jamais nous en rendre compte, limité en cela par la durée de notre existence.

Les tribus endémiques d'Amazonie sont totalement ignorantes de nos modèles d'existences. Leur monde est vrai car il est durable et certain. Elles n'ont aucun besoin de transformer leur environnement et de ce fait, n'ont aucun besoin de comprendre les fondements de toutes choses car l'on n'apprend pas par curiosité. Ce sont donc des sociétés véritablement stables qui ignorent que l'humain peut vivre au delà de 100 ans.

Et nous pourquoi ?

Intéressante question. Avons-nous été curieux, certainement pas au delà de ce que l'on pouvait mettre à la bouche, toucher, sentir, entendre.
Tous les jours nous en vivons la raison.
C'est par elle que tout est advenu, lentement, puis plus rapide grâce au mimétisme social, d'apprentissage en apprentissage sélectif d'une génération à l'autre. Nous avons écarté les erreurs sans en compter les morts comme aujourd'hui, mais en les enterrant. 
Un signe essentiel que l'humain accédait au savoir. Un pas énorme dans la conquête de cette terre inconnue qu'est le magasin de la méconnaissance comme Edgar Morin qualifie l'ignorance.

Parménide

L'ignorance n'est pas invalidante c'est la terre à conquérir, c'est l'économie des savoirs de demain.
Pour la seule raison que nous sommes ignorants de tout ce qui reste à découvrir et cela est une chance.
Si notre connaissance des choses et du monde était complète nous n'aurions aucune marge de progression, nous en serions arrivés au même stade que les tribus arborigènes. Cela nous porterait à croire que la société dans laquelle nous vivons est irréductible. 
Cette vision de disposer du savoir nécessaire pour se faire une place dans la société où nous naissons, porte à croire que ce qui nous est utile pour nous affirmer et absolument et une vérité intangible.
Depuis Parménide, le mouvement comme objet de toute vie est connu. C'est cinq siècles AV JC. Nous avons fait usage de ces savoirs. La mort, vers un au-dela fait de paradis et d'enfer, le mouvement, un soleil qui tourne autour de la terre.

La fève.

Deux vérités qui auront tenu des siècles avant de tomber en creusant l'ignorance.
Aujourd'hui encore nous nous rassurons de vérités, il y a celles scientifiques qui sont refutables, chacun peut se saisir du protocole et en vérifier l'exactitude.
Puis il y a celles économiques qui sont. Irréfutables, c'est à dire qu à aucun moment en se saisissant du protocole l'on ne pourra en vérifier l'exactitude car elles dépendent de la perception suggestive de chacun sur la valeur qu'il accorde au choses. Je dis souvent les Aztèques accordaient autant de valeur aux fèves que nous à l'or.
Entre les deux pour vivre il est préférable de disposer de fèves.
Cette comparaison montre que ce ne sont pas les valeurs intrinsèques des choses que nous apprécions, mais celle que suggestivement nous lui reconnaissons. Ce n'est donc pas la raisons qui guide l'économie, contrairement à ce que l'on nous assène pour soutenir une vision capitalisme du monde. 
La vision capitaliste du monde n'est pas une vérité, mais seulement le résultat de relations distordues, par la culture et la concentration humaine sur des lieux de productions, en constante évolution. Le capitalisme est pour ceux qui le soutiennent la même situation idéologique que ceux qui soutenaient que le soleil tournait autour de la terre.

L'ignorance une chance.

Imaginons que le magasin de la méconnaissance n'existe pas, nous passerions notre existence soumis à d'autres. Nous le sommes sous divers paradigmes et considérer que c'est une vérité nous soulage, mais nous maintient dans l'ignorance, voire l'imbécilité pour certains.
Ainsi l'ignorance est une chance de pouvoir sortir du capitalisme de faire tourner le travail autour de l'humain et non l'humain autour du travail.

Comment y parvenir.

Par l'enseignement. Du temps de Parménide les initiés instruisaient les initiés car apprendre était un privilège. Cela a duré jusqu'à l'invention de l'imprimerie où le savoir a pu se diffuser.
On lui doit les lumières et le libéralisme bourgeois. Ensuite avec le socialisme l'école de la République ouverte à tous que refusaient les ouvriers car le salaire de leurs enfants étaient nécessaires.

Demain.

Aujourd'hui nous n'avons guère avancé dans la distribution du savoir, il y a les initiés qui vont dans les grandes écoles et se spécialiser à l'Université et ceux qui travaillent et ceux qui consomment du temps libre. Ceux qui ont accès à la complexité du monde et des choses et ceux qui en restent ignorants et croient toujours que le soleil tourne autour de la terre.

Nous avons une étape à franchir, réorganiser l'enseignement supérieur pour le rendre accessible à tous tout au long de l'existence. Et de ces citoyens en sortiront ceux qui puiseront à l'aide de leurs savoirs acquis, dans le magasin de la méconnaissance ou de l'ignorance le monde de demain.

Les être salvateurs ce sont nos parents quand l'on est enfants.

 


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