L’interpellé
par Le bateleur
lundi 19 janvier 2009
9h35, gendarmerie de Jarny (54800) : j’ai demandé à être convoqué pour compléter une déposition relative à la verbalisation que je conteste d’un non respect de stop.
Au fil de mes déclarations, j’en viens aux circonstances de mon « contact » avec les gendarmes le jour de la supposée infraction.
« Je gare mon véhicule face à la boulangerie, à la droite d’une camionnette blanche, descend, et me rends compte du fait que la voiture qui me pressait depuis l’entrée du village et semblait vouloir me dépasser était celle de deux gendarmes, et ce, lorsque l’un d’eux m’interpella … »
C’est à ce point de ma déposition que j’encours la fureur du gendarme Txxxxx qui interrompt alors sa frappe.
« C’est complètement faux, vous savez ce que veut dire interpeller ?!!! »
Ce mot l’a visiblement mis hors de lui.
« Si on vous avait interpellé vous auriez été au mis sol et sérieusement malmené » (j’aseptise le propos qui était lui aussi un peu plus musclé.)
Je tente alors de le calmer, d’amender ce que je pense être une erreur un peu vivement réprimandée, doutant alors de ma maîtrise du terme employé.
« J’essaie simplement de relater les faits, avec les mots dont je dispose, dans le sens que je crois pouvoir leur donner. »
Cela ne calme qu’à peine sa colère
« Vous êtes quand même prof, et dans votre métier vous ne pouvez pas dire n’importe quoi . »
Je m’excuse à nouveau, persuadé à présent d’avoir usé mal à propos d’un terme au sens beaucoup trop fort.
« Vous me demandez ma version des faits, je vous la donne du mieux que je peux. Vous êtes, je crois censé l’écrire en l’état. »
C’est à ce moment là que son supérieur lui conseille de taper mes propos comme je les lui donne.
Toute l’intervention du gendarme Txxxxx est à l’image de cet épisode.
A l’image de cette certitude de ma faute alors que, venant (ou situé*) d’une rue en face et en contrebas, il ne pouvait guère évaluer le temps d’immobilisation de mon véhicule. Et alors même qu’il ne semblait se souvenir d’aucun des détails précis de l’événement.
Cette certitude qui m’avait fait lui déclarer, alors qu’il m’affirmait que j’avais « suivi le véhicule devant moi », que je n’étais pas en état de répondre à ses questions, le jour de… l’interpellation.
Aujourd’hui, il a fallu que, en visite chez mes parents dans l’heure qui a suivi cet échange vif, je prenne le vieux Larousse et parvienne à la définition du mot que j’étais supposé avoir employé à tort et en toute irresponsabilité.
1) Interpeller : adresser la parole à quelqu’un pour lui demander quelque chose.
2) Demande d’explication adressée à quelqu’un. (Ici il s’agit de la définition du dictionnaire Hachette 2001, plus récent.
Le gendarme Txxxx avait étrangement confondu avec « interpellation musclée ».
A présent, je ne suis qu’à moitié rassuré.
- Une telle confusion dans l’esprit d’un agent des forces de l’ordre auquel on peut demander d’effectuer une interpellation, est-elle sans conséquence ?
- Malgré tout, pour le reste, que vaut ma parole de citoyen contre celle de celui qui possède autant de verve et d’aplomb même lorsqu’il a tort au point de faire douter celui-là même qui dit la vérité ?
D’autant que si lui a pris, lu et parfois modifié les termes de ma déposition (comme en atteste le vocabulaire spécifique qui est utilisé par endroit) il paraît que, asymétriquement je n’ai pas le Droit de connaître la sienne*.
A trois reprise, m’étant entretenu de mes déboires (avant la déposition de ce jour) avec des amis, des collègues, de simples connaissances, j’ai pu mesurer à quel point tous partageaient ces interrogations, cette inquiétude et même la rancœur éprouvée face à ce qui semble être une machine à piéger et attraper le citoyen moyen, en jouant d’artifices, en gommant les marges et en abusant du poids d’une parole assermentée pourtant susceptible d’erreur au cœur même de son métier, comme on aura pu le constater.
Ainsi, oui, je ne suis pas très rassuré, quelque part au fond de moi ...
ça m’interpelle !
* Il a refusé de me communiquer sa version des faits ...
si c’est la loi, dure est la loi !