L’Iran veut-il déclencher un conflit régional ?
par Dr. salem alketbi
mercredi 24 janvier 2024
Selon certaines évaluations, l’Iran et ses mandataires terroristes au Moyen-Orient travaillent à l’élaboration d’un conflit régional de grande envergure. Ce conflit servirait leurs intérêts et permettrait à l’Iran d’atteindre ses objectifs stratégiques, ce qui pourrait profiter à la Chine et à la Russie. Mais il est important de faire la distinction entre les objectifs du soi-disant axe de résistance dirigé par l’Iran et les objectifs des adversaires stratégiques des Etats-Unis, tels que la Chine et la Russie. La contradiction entre ces objectifs et la manière dont ils sont atteints est évidente. Le désir du régime iranien d’une confrontation directe avec les Etats-Unis ou Israël reste difficile à évaluer. Les évaluations de la colère iranienne se rapportent principalement aux attaques croissantes contre les mandataires régionaux de l’Iran. Ces mandataires subissent de lourdes attaques de la part des forces américaines et de l’armée israélienne en Syrie et en Irak. Cependant, Téhéran semble indifférent aux pertes humaines dans les contre-opérations, quelles que soient leur importance et leur poids. La priorité du régime est d’assurer sa propre survie et d’éviter les menaces directes qui pèsent sur son destin. Si l’Iran avait été suffisamment irrité pour répondre avec force aux contre-opérations américaines ou israéliennes, il aurait réagi à l’assassinat du général Qassem Soleimani, le commandant des Gardiens de la révolution.
L’Iran a opté pour une réponse mesurée dans ce cas, en prenant des mesures limitées pour sauver la face sans escalader vers une riposte majeure à la mesure de l’importance de Soleimani, qui était un pilier du régime. Certains commandants du CGRI ont considéré l’attaque sanglante du mouvement terroriste Hamas contre Israël, le 7 octobre, comme une vengeance pour l’assassinat de Soleimani. L’Iran a ensuite rapidement démenti cette déclaration, bien qu’elle ait été faite par le porte-parole officiel des Gardiens de la Révolution, un homme qui sait exactement quoi dire, quand le dire et dans quel style.
Cette déclaration est donc probablement un message que Téhéran voulait transmettre à toutes les parties concernées, en supposant qu’il ait pris l’initiative de la démentir après s’être assuré qu’elle était bien parvenue à l’adresse. Il s’agit d’une tactique bien connue utilisée dans de telles circonstances.
L’Iran considère le conflit stratégique avec les Etats-Unis et Israël comme une lutte à long terme, et la confrontation directe ne fait pas partie des options sur la table de décision. Téhéran est conscient qu’un conflit militaire direct n’est pas dans son intérêt et que, contrairement aux conflits non conventionnels, il est peu probable qu’il débouche sur des gains opérationnels tangibles. L’Iran veut utiliser les conflits non conventionnels pour saper les capacités des armées israélienne et américaine.
La guerre par procuration sur laquelle s’appuie l’Iran pourrait également sonner le glas, en tout ou en partie, des milices terroristes iraniennes. Israël éliminerait la plupart des capacités opérationnelles du groupe terroriste Hamas à Gaza d’ici la fin de la guerre actuelle.
Il pourrait neutraliser la menace du Hezbollah libanais pour sécuriser le front nord et ramener les habitants de ces zones dans leurs foyers.
Le comportement prudent du Hezbollah pendant la guerre de Gaza, l’équilibre délicat entre l’action et l’escalade, qui pourrait nécessiter une réponse israélienne globale, expliquent cela. Le Hezbollah sait qu’Israël a décidé d’éliminer les menaces venant du nord et du sud, et l’escalade est une bonne justification pour se tourner vers le nord après la guerre de Gaza. Les dirigeants israéliens ont évoqué la dévastation de Gaza comme le sort probable des territoires libanais si le Hezbollah ne renonce pas à menacer la sécurité d’Israël.
Le Hezbollah est le bras terroriste le plus important et le plus puissant de l’Iran au Moyen-Orient. Il est la clé de voûte de la stratégie iranienne en Syrie et au Liban pour dissuader Israël et faire chanter l’Occident dans le cadre des relations complexes avec les Etats-Unis et ses alliés de l’OTAN. Il est peu probable que l’Iran engage délibérément le Hezbollah dans une bataille dont il sait qu’elle n’est pas comparable à la guerre de Gaza ; d’autres parties, en particulier les Etats-Unis, s’impliqueraient, et l’Iran ne bénéficierait pas de la sympathie régionale et internationale dont jouit la guerre de Gaza parce que le Hezbollah opère en tant que force échappant au contrôle de l’Etat libanais.
Nous pensons que le comportement du Hezbollah est l’indicateur le plus important des intentions de l’Iran à l’égard d’Israël. Si le Hezbollah a récemment intensifié ses tirs de roquettes sur Israël, affirmant qu’il s’agit d’une réponse initiale à l’assassinat du chef du Hamas, Saleh Al Arouri, sur le sol libanais, il est difficile de considérer cette escalade comme la prémisse d’une escalade à grande échelle. Il s’agit plutôt d’une tentative de fixer de nouvelles règles du jeu et de dissuader d’éventuelles opérations israéliennes contre d’autres chefs terroristes, qu’il s’agisse de mouvements palestiniens ou du Hezbollah lui-même. Ce qui se passe actuellement est un délicat exercice d’équilibre entre Israël et les mandataires de l’Iran, sous la direction et le patronage directs de Téhéran. Le Hezbollah est convaincu qu’après avoir éliminé la menace terroriste à Gaza, il sera le prochain domino à tomber. Aux yeux d’Israël, l’élimination de la menace du Hezbollah a la même priorité que celle du mouvement terroriste Hamas. Ainsi, dissuader cette pensée pro-créative au sein du gouvernement Netanyahou peut être considéré comme l’un des principaux objectifs de l’escalade calculée des milices du Hezbollah dans le nord, même si elle semble se manifester en représailles de l’assassinat d’al-Arouri. L’Iran ne prendrait certainement pas le risque de plonger le Hezbollah dans une confrontation plus large avec Israël. Une telle décision serait une aventure à l’issue fatale, compte tenu de ce que l’Iran a investi dans la construction et le déploiement de ces agents terroristes depuis des décennies.
Cette confrontation pourrait être la dernière à éradiquer ces marionnettes de la terreur. Cette issue aurait un impact considérable sur l’influence de l’Iran et sur sa position régionale et internationale, en grande partie à cause des pratiques de ses mandataires et de leur capacité à répandre le chaos et l’agitation dans la région.