La Chute de Macron

par Ariane Walter
samedi 11 janvier 2020

 

9-1-2020

 

Je ne vous cacherai pas la vérité : mon genou en inox m’interdit toute cavalcade dans les rues. Je ne suis donc d’aucune manifestation, me cantonnant, comme les dieux d’autrefois, à observer de mon Olympe cosy. Pourtant, hier, un de mes amis de la CGT allant à Marseille, me posant cette question : « Viendras-tu », je répondis : « Oui. »

Marseille baignait dans une de ces luminosités qui viennent d’un autre monde. C’était « l’immense été » dont parle Aragon, mais aussi l’immensité de la foule, deux cent mille personnes, qui transformait le bitume en serpent de fête mexicaine. Et les cris, la musique, les visages, l’espoir ! J’ai fait la Mairie-Les Réformés, puis les Réformés- Le Vieux port où je me suis abattue dans un bar.

Je garderai toujours ces instants dans ma mémoire. La poésie du monde venait de me tomber sur la tête. Je n’aime pas Marseille et pour une fois j’y étais bien. Cette ombrière en inox que je déteste, soudain je la trouvais vivante avec des mouettes qui se dédoublaient sous ses miroirs. Les nuages formaient une couronne qui jaillissait sous les pieds de Notre-Dame et encerclait les eaux électriques du Port. 

Mais ce que je ressentais était au-delà de cette beauté qui me piquait le cœur.

 C’était une émotion, comme celle que tant d’hommes et de femmes ressentaient en ce moment en France : la certitude que tout commençait, que l’union pour un juste combat s’ancrait dans les têtes et dans les cœurs et que naissait une volonté d’arracher notre Histoire de peuple libre à toutes les histoires de peuples malheureusement esclaves. 

Et il fallait dire merci à ce pitoyable Macron qui avait le mérite d’éveiller la Belle au bois dormant, la France. Oui, nous étions affalés dans une mollasserie morose de consommateurs et tout à coup les vrais bonheurs, la connaissance des uns et des autres, la fierté d’avoir près de nous les danseuses et les chanteurs de l’Opéra, les avocats qui balançaient leurs robes à la tête de Belloubet, les chœurs de Radio-France qui étouffaient les discours convenus sous les notes magiques de « Va pensiero », et tous ces dockers qui venaient de bloquer le port de Marseille, comme tout cela donnait envie de revenir et de ne jamais partir de cette ville héritière de tant de prodiges et ouverte à un avenir HUMAIN. 

Etait-ce trop demander : « de l’humanité » ,quand on appartient à l’espèce des Hommes ?

À Marseille, pas un flic à l’horizon. Mais partout ailleurs le carnage destiné à faire peur. 

Mais ce jour-là, je sentais dans cette lumière-là, que naissait partout, non pas la peur mais le désir, pour toujours ancré, de balayer le mal de quelques-uns pour que vivent mieux tous les autres.

Peuple de France, peuples de notre petite planète, l’empathie, le désir de créer qui est notre raison de vivre, le refus de se soumettre à des facilités cruelles et destructrices, tout vibrait en nous. 

Nous venions d’entrer, sans le savoir, dans un autre monde. Celui de l’espérance et du juste combat.

Stratèges, à vous.


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