La confiance contre le complot

par Caleb Irri
lundi 5 juillet 2021

Que ce soit l’abstention, le covid, le climat, la justice ou les médias… notre monde traverse des problèmes qui se succèdent et se superposent les uns aux autres sans s’arrêter. Le fait qu’ils soient liés entre eux ne fait aucun doute et le point commun à toutes ces catastrophes se retrouve in fine (fatalement j’ai envie de dire) dans le capitalisme et son fonctionnement. Mais je ne m’attarderai pas ici sur ce fait qui n’est pas celui qui m’intéresse aujourd’hui. Car il est un autre point commun à tous ces problèmes, et ce point c’est la confiance…

La confiance est la croyance qu’on peut fier à l’autre : en France on peut dire qu’elle a pour l’essentiel disparu.

Nos politiques sont nombreux à critiquer, voir à insulter les nombreux citoyens qui pour les uns ne vont pas voter, pour d’autres refusent le vaccin, pour certains ne croient pas au dérèglement climatique ou d’autres encore qui refusent de croire en la justice. Ils prennent au mieux ces gens pour des imbéciles à qui il faut tout expliquer (la fameuse pédagogie), et au pire pour un ramassis de complotistes à qui il faut imposer la vérité sans l’expliquer (parce qu’ils seraient trop cons pour comprendre)

En réalité cet état d’esprit de nos décideurs marque bien le mépris, la déconnexion et l’indécence de leur vision de ce qu’ils appellent avec condescendance « le peuple ». Ils sont tellement éloignés de la réalité du quotidien qu’ils ne sont même pas foutus de s’apercevoir que le problème ne vient pas des citoyens mais d’eux-mêmes. Et ce problème n’est pourtant pas un petit problème ! C’est même un problème majeur que celui de la confiance. La confiance est ce qui permet aux gens de supporter ce qu’on leur dit de faire car ils espèrent, ils croient que leurs sacrifices ou efforts conduiront à une amélioration substantielle de leurs conditions d’existence. Sans cette espérance ou cette foi, comment continuer à se projeter positivement dans le futur (le sien et celui de sa descendance) ? Si on ne croit plus les journaux, si on doute de la parole scientifique, si on refuse de croire le gouvernement, comment envisager un future serein et apaisé ? Or cette confiance est rompue, et le gouvernement actuel a fini de briser les espérances d’une grande partie de la population.

A l’heure où l’information est la plus largement partagée et diffusable,disponible en continu partout et tout le temps, nous avons le plus grand besoin de « fact-checking », mais pourtant même les factcheckers se retrouvent soupçonnés ou accusés d’être des agents à la solde de la propagande des uns ou des autres. Comment en sommes-nous arrivés là ?

Aujourd’hui les gens n’ont plus confiance ni en nos hommes politiques et leurs promesses sans cesse abandonnées, ou perverties ou mensongères ; ni en nos médias dont les propriétaires (9 milliardaires pour 90 pourcents de l’offre médiatique en France) ont déjà tant et tant de fois menti, censuré ou triché ; ni en les laboratoires tant de fois condamnés et n’hésitant jamais à mentir pour vendre ; ni en la justice qui condamne vite et fort les « petits » et rarement, des années après, les « grands »…

En réalité si les citoyens aujourd’hui ne font plus confiance aux institutions établies ce n’est pas la faute des citoyens qui seraient trop cons pour comprendre mais bien parce qu’ils sont justement suffisamment intelligents pour s’être rendus compte qu’on se foutait de leur gueule depuis si longtemps que c’est continuer à leur faire confiance qui serait une folie.

Le complotisme n’est donc pas le fruit d’une dégénérescence du citoyen français comme happé par un virus du complot mais bien la conséquence des mensonges et complots tant de fois répétés dans l’Histoire, par ceux-là mêmes qui vous reprochent d’être complotistes. Comment en serait-il autrement ? Les affaires sont si nombreuses et la corruption (petite ou grande) est tellement généralisée que la position la plus logique et cohérente n’est certainement pas la confiance aveugle mais bien le doute raisonnable. Au moins dans un premier temps. Comment ne pas être sceptique sur l’utilité du vote quand il est constaté par tous que la politique choisie n’est au mieux pas réalisée, et au pire produit le contraire de l’intention de départ ? Comment faire confiance à des laboratoires après les nombreux scandales montrant à quel point la vie des gens les intéressait moins que leurs profits ? Comment accepter la vision offerte par des médias dont on sait que les patrons ne les financent que pour y faire leur propagande en censurant peu ou prou des faits qu’ils considèrent ne pas être dans leur intérêt, ou contestant leur idéologie ? Comment ne pas douter de la bienveillance de multinationales quasi monopolistiques qui nous « offrent » en échange de nos données des services dont le bienfait n’est pas encore à ce jour prouvé (et même plutôt le contraire) ?

Ceux qui dirigent notre monde sont pour la plupart des menteurs, des tricheurs et des voleurs qui nous demandent de ne pas mentir, de ne pas tricher et de ne pas voler. Les preuves en sont que les riches sont de plus en plus riches et les pauvres de plus en plus pauvres, et que toutes les promesses de liberté, d’égalité, de justice, que toutes les promesses de lendemains qui chantent se sont toutes avérées fausses et pire encore, sans compter ce qui arrive sur nous. Ils n’ont réglé ni le chômage ni la misère ni le climat ni l’éducation ni la sécurité, et la situation générale empire d’année en année, sauf bien sûr pour ceux qui nous font ces promesses qui ne s’appliquent qu’à eux-mêmes, dont la situation s’est effectivement largement améliorée.

Si vous voulez que les gens aient confiance en vous, il ne faut tout simplement pas les trahir.
Qui se sentira morveux se mouche

Caleb Irri
http://calebirri.unblog.fr


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