La Défense de François Hollande

par Alain Roumestand
lundi 23 mai 2016

La politique de Défense va être au coeur du débat pour la présidentielle de 2017. Quel est l'état réel de la Défense de la France ?

Un Mistral à Saint Nazaire commandé par la Russie et jamais livré

Tous les observateurs tombent d'accord pour juger la politique économique et sociale de François Hollande calamiteuse.Mais rares sont les analystes qui décortiquent sa politique de Défense avec sévérité.

Des manquements qui interpellent

L'armée de l'Air manque d'argent pour la formation de ses pilotes ! Dans l'opération Barkhane pour un territoire grand comme l'Europe 3500 hommes sont engagés ! Le contrat opérationnel qui devait être dans un laps de temps de courte durée est largement dépassé, ce qui inquiète les troupes. A Niamey, au Niger, plus de Mirage, restent les drones !

Les ventes d'immeubles appartenant au ministère de la Défense ne sont toujours pas effectuées alors qu'elles devaient être un élément de financement. De nombreuses dépenses ne sont pas financées, certaines ne sont même pas comptabilisées. On trouve même 3,8 milliards de factures non payées. Qu'en est-il des 2 milliards supplémentaires qui devront être injectés chaque année pour moderniser l'arme nucléaire ?

Les radars utilisés sont vieux, le matériel qui revient d'opérations ne peut entrer en maintenance, faute de moyens. Des fusiliers-marins démissionnent vues leurs conditions de vie et de travail. Une surchauffe opérationnelle oblige d'annuler des opérations en Méditerranée pour faire face à une présence russe dans le Golfe de Gascogne. Les actions de la marine contre la piraterie en mer ne peuvent être menées à bien car les bâtiments de surveillance maritime manquent.

L'armée est mise à contribution depuis janvier 2015, dans le cadre du plan Sentinelle, pour rassurer la population, alors que la gendarmerie et la police devraient être utilisées pour la sécurité intérieure. Ce qui, par contre-coup, fait que l'armée est entravée pour des théâtres d'opérations extérieures.

Une ligne directrice et une volonté politique ferme manquent depuis 4 ans. Alors que dans les grands pays la Défense irrigue, comme aux USA, en Russie ou en Chine, l'ensemble de l'économie. Les banques ne suivent pas les directives gouvernementales pour assurer les financements et une fiscalité abusive touche de plein fouet les PME liées à la Défense, comme d'ailleurs l'ensemble des PME.

Et ce ne sont pas les ventes DCNS à l'Australie, qui ne doivent rien d'ailleurs au gouvernement, qui doivent cacher le marasme.

Une Défense sans ligne directrice et sans Europe

La Défense au 21 ème siècle se doit de faire partie de vrais projets d'ensemble. Car la France est en état d'urgence avec la menace djihadiste de Daech et les actes terroristes et en état de guerre engagée sur de nombreux théâtres d'opérations extérieures.

Le nouvel ordre mondial fait apparaitre de multiples désordres. La politique menée par le président Obama a entrainé un désengagement au Moyen-Orient. Les observateurs attentifs n'ont pas oublié que l'utilisation d'armes chimiques en Syrie était un casus belli pour les USA ; or il n'y a eu aucune intervention. Et la Syrie en Méditerranée et dans la zone d'influence de l'Europe, a mis sur les routes des milliers de réfugiés, provoquant une explosion migratoire sans précédent. Pourquoi l'Union pour la Méditerranée a-t-elle été abandonnée ? Seule la Russie est intervenue avec vigueur dans la zone. Et les ambitions de la Russie, la question ukrainienne, qui les traite au fond, actuellement au gouvernement ?

La France se retrouve régulièrement seule depuis 4 ans dans ses interventions extérieures. Au Centrafrique l'intervention française, circonscrite à un temps donné, est maintenant continuelle pour séparer musulmans et chrétiens. L'Organisation des Etats Africains aurait dû intervenir massivement au côté de la France. De même pour le Mali. Une coalition est nécessaire. Lors de l'éviction du colonel libyen Kadhafi en 2011, qui voulait anéantir physiquement son opposition, une coalition avait été montée avec l'Angleterre, des pays arabes et avec l'aval des grandes organisations internationales, avec un mandat international.

Il y a nécessité de mener constamment des alliances, bilatérales, trilatérales, par exemple avec l'Allemagne, l'Angleterre. C'est le b.a-ba de la politique. Et non de tenter, comme cela a été fait, en vain, au début du présent quinquennat, de diviser l'Europe en voulant prendre la tête d'une pseudo-Europe du Sud contre l'Europe du Nord.

L'Europe ne peut être ignorée comme elle l'est présentement, alors que, avec la fin de la Guerre Froide, elle a commis l'erreur de réduire son effort de défense, considérant être à l'abri de toute menace stratégique. Les actions à mener profitant à la sécurité de tous les européens, une participation opérationnelle et financière de l'Union Européenne à ces actions est indispensable. Le traité de Lisbonne prévoyait la mise en place d'une coopération structurée permanente. Où en est cette coopération ?

Il n'y a en matière de Défense aucune relance européenne impulsée par la France. Comment pourrait-il en être autrement quand les initiatives européennes de la France sont dangereusement absentes,quand dans un rapport remis à l'Assemblée Nationale notre pays est jugé non crédible en Europe ( 0 résultat, 0 réforme). Les Européens rappellent que précédemment l'exceptionnelle crise financière de 2008 avait été résolue grâce au rôle moteur de la France, de même qu' avaient été créés le mécanisme européen et le fonds de stabilité européen sous l'impulsion de la France.

Et que dire de l'absence de politique envers les migrants arrivant en France, alors que des pays comme l'Espagne ont réussi à endiguer le flot migratoire par une politique de coopération positive avec la Mauritanie, le Maroc et le Sénégal.

Priorité à la Défense dans la campagne présidentielle

La Défense Nationale est prise en charge par un ministère régalien, de plein droit, qui doit préserver la sécurité des français à l'intérieur et défendre les intérêts du pays à l'extérieur. Elle sera donc un enjeu essentiel de la campagne présidentielle qui va s'ouvrir. Les citoyens sont en droit de demander aux candidats un cap, une direction précise, une vraie politique déterminée, non pas un programme basé sur des lois de programmation étalées dans la durée et rarement respectées, mais des engagements concrets et vérifiables pour le quinquennat qui vient.


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