La fin de la lutte des classes

par C’est Nabum
lundi 4 juin 2012

Une illusion bien commode.

Ils ont l'art et la manière de prétendre effacer toute trace d'idéologie. Eux, ils représentent le camp de la modernité, de la France, de la responsabilité, du travail face à la plèbe, les moins que rien, les pauvres (con)damnés de la terre. Ils se parent de la certitude d'agir au nom de tous, d'effacer les barrières immondes de la lutte des classes. Ils s'élèvent au dessus des mesquineries de conceptions archaïques, de bataille d'arrière garde pour défendre un monde révolu.

Belle manière de noyer le poisson, belle façon d'endormir la bergère. Ils se pensent la glorieuse force qui a détruit définitivement l'héritage de mai 1968, qui s'attaque aux derniers acquis du Conseil National de la résistance et qui espère rendre caducs tous ces archaïsmes issus de nos révolutions. La France doit se débarrasser des dépouilles d'un passé agité pour ouvrir grands les bras aux réalités de la compétition économique.

Fermez le ban, le discours est au point, plus d'idéologie, plus de classe laborieuse, d'exploiteurs non plus. C'est si facile de prendre ses délires pour une réalité. Niveler par le bas, ôter toute culture. Ils sont les défenseurs d'une modernité pragmatique. Ils sont de plein pied dans les exigences d'un monde lancé dans un combat économique qui se fiche des représentations anciennes.

Et pour cela, il faut que l'argent ne soit plus un problème mais la solution. Il faut glorifier la réussite individuelle, le talent qui se monnaie, encenser les vainqueurs et mépriser les perdants. Rassurez-vous, ça, ce n'est pas de l'idéologie, c'est la dure loi du marché, c'est le si commode principe de réalité pour justifier les pires différences entre les humains. Je ne vois pas bien la différence car cette forme de pensée clive autant que la lecture ancienne d'une situation qui n'a pas vraiment changé.

Mais ces braves gens sont convaincus de la pertinence de leur conception. Chacun a sa chance, chacun peut se retrouver du bon côté de la frontière qui sépare les glorieux des odieux. Le travail, les efforts, la qualité individuelle, le courage sont les ingrédients qui ouvriront les portes de la fortune à tous ceux qui veulent vraiment s'en donner les moyens. Et c'est ainsi que la lutte des classes n'a plus aucun sens.

Pire même, ils se trouvent des ouvriers ou des employés pour rêver à leur tour d'appartenir au camp des heureux, des jouisseurs sans retenue, des profiteurs de la générosité d'un système qui sourit, leur dit-on, aux audacieux. Ils viennent rejoindre les rangs de ceux qui sont effectivement du bon côté de la machine à créer de la distinction par l'argent, machine qui ne choisit pas en fonction de la naissance, machine dépourvue totalement de l'idée de classe sociale.

Forts de ceux qu'ils ont ainsi bernés, bercés d'une douce et vaine espérance, ils font de ce pays une nation qui est viscéralement du côté de la réaction, du conservatisme, du mensonge. Ils profitent de leur rengaine maligne pour continuer ainsi à jouir sans entrave d'une inégalité de classe qui elle, existe vraiment, est parfaitement observable, mesurable et déplorable.

La lutte des classe est abolie ce qui leur permet sans état d'âme ni conscience de s'accorder des revenus cent, mille fois supérieurs à ceux de ces pauvres gens sur lesquels ils puisent leurs ressources. Mais, pas d'injustice, pas de situation inique, pas de classe dominante qui se gave sur la classe opprimée, non, pas de ces explications d'un autre temps. Ils sont l'élite de la nation et profitent largement des dons qui doivent être les leurs.

Toujours pas de luttes de classe, toujours pas de réflexes de clan, pourtant ils se préparent à fuir le pays, à mettre à l'abri ces biens si mal acquis. Ils s'apprêtent à partir en exil, à fuir parce que la démocratie a donné un résultat contraire à leur idéologie. Ils nous laisseront au fond de la classe, ils abandonneront la lutte, iront continuer à jouir sans entrave fiscale. Si ce n'est pas une lutte des classes privilégiées contre le bien public, qu'est-ce alors ? Vite, expliquez-moi, je ne comprends vraiment rien.

 

Marxistement leur.


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