La libération (40) : bombarder New-York, ou servir à autre chose ?

par morice
mercredi 13 juillet 2011

Les allemands avaient donc des bombardiers à très longue portée en préparation, et certains déjà construits. Au compte-gouttes, il faut l'avouer, avec l'état de pénurie de matières premières dans lequel baignait le Reich à la fin de la guerre. Le Ju-290 n'a ainsi été construit qu'à 9 exemplaires dont un à part, pour sûr. A quoi cet exemplaire particulier a-t-il pu servir dans les tous derniers mois du conflit, voilà qui est intriguant. Hier, nous avons vu qu'un de ses confrères avait traversé l'Atlantique pour finir à la ferraille. On découvrira tardivement que notre exemplaire particulier s'était envolé vers l'Espagne. Voilà qui devient intéressant...

Pour en revenir au Ju-290, la production au compte-gouttes du monstre s'arrêtait au modèle 9. Or il y eût un modèle (unique) N°9. Réservé à Hitler, l'avion avait au départ une cabine pressurisée qui fut abandonné faute de temps et fut testé au sein du commando spécial de la base de Finsterwalde, la célèbre I/KG200. L'appareil était le Ju-290A-5 W, numéro 110178, marqué extérieurement D-AITR . Un autre appareil, un Ju-90 celui-là, avait aussi un temps servi à Hitler, enregistré chez Lufthansa sous le nom de "Bayern". C'était la preuve par l'exemple que les avions civils de la Lufthansa, tel déjà le Ju-90, D-AURE, dernier à voler pour la Lufhansa, détruit le 9 août 1944 lors du bombardement de Stuggart-Echterdingen, qu'on avait trouvé démesurés, avaient bien un but militaire, au final. Le Ju-290 avait été photographié par les alliés sur l'aérodrome de Tempelhof, comme le montre le cliché ci-dessous :

Or, le 23 avril 1945, 8 jours avant l'annonce du suicide d'Hitler, le commandant du groupe LTS 290 chargé de cette série d'avions dont un exemplaire venait de rejoindre les Etats-Unis s'était enfui avec ce modèle particulier, pour atterri à Barcelone. L'avion avait décollé de Prague avec une bordée de dignitaires nazis à bord. C'était évidemment, du pain béni pour les conspirationnistes qui y auraient vu Hitler à bord, discrètement évacué, un Hitler qui serait décédé plus tard, selon eux, d'une crise cardiaque dans la résidence de Franco le 1er novembre 1947. Une des nombreuses légendes sur le sujet (ce n'est pas ce qui manque en effet). En dehors de ce cas fort particulier ; en 2003, dans son remarquable livre, "La liste noire" et sans même parler d'Hitler, José María Irujo d'El Païs (très au courant par ailleurs des trafics de drogue en Espagne), évoquait les protections dont avaient bénéficié ses hauts dignitaires sous Franco, grâce notamment à l'intercession de Friedhelm Burbach, premier représentant allemand en Espagne qui s'était toujours montré très actif. L'impact économique de la présence de l'or nazi était aussi évoqué. Le choix de la couverture, celle d'une espagne cernée de drapeaux nazis avait été à elle seule un beau pavé dans la mare. Sur la même question ; Jeff Hemmer commettra un beau rapport, lisible ici. Il débute par la fondation du groupe nazi au Portugal... par Friedhelm Burbach ! Une "cinquième colonne" avait bien été préparée pour accueillir les fuyards, qui bénéficiait de l'or qu'ils avaient subtilisé dans toute l'Europe. L'accueil potentiel d'Hitler ayant fui était donc du domaine du possible : tant que l'on ne retrouvait pas son cadavre (et tant qu'on ne l'a toujours pas retrouvé à ce jour !).

Dans cet ouvrage, 104 noms de nazis réfugiés en Espagne sont cités (ou Hitler n'apparaît pas, je le répète). Cela commence dans le journal El Pais par un cas désormais bien "classique" : celle d'un homme passé totalement inaperçu pendant 47 années. Dans le pays ou Léon Degrelle recevait des visiteurs sur son balcon, remarquez.... "la fiche de Franz Liesau Zacharias, un Allemand qui vivait au numéro 52 de la Calle Alcala de Madrid est terrifiante. Il est dépeint en quelques lignes comme ayant en 1945 commis des atrocités nazies. « Cet homme se prétend médecin. Il était en réalité agent du service de l'Abwehr, impliqué dans l'achat d'animaux au Maroc et en Guinée espagnoles à des fins expérimentales en Allemagne, y compris la propagation de l'horrible maladies comme la peste dans les camps de concentration. " Liesau ans est mort à Madrid à la fin 1992. Il avait 84 ans et était accompagné de son épouse, une allemande 24 ans plus jeune. Personne, sauf sa famille et ses amis, ne s'était intéressé à sa mort. Il fut l'un des nombreux agents de l'Abwehr, des SS ou de la Gestapo (police politique de Hitler) qui résidait en Espagne de Franco et dont le rapatriement et l'extradition vers l'Allemagne avait été demandée par les Alliés à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Son nom et celui de 103 autres allemands apparaissent dans un document daté de 1945 et vu par El Pais, qui reprend dans leur intégralité celui des Archives générales du ministère des Affaires étrangères.   Elle est l'une des listes noires célèbres. Il présente 11 folios, et est dactylographiée en anglais. Son titre, "la liste de rapatriement". Il a été rédigé par les services de renseignement des alliés (principalement la France, UK et USA) et envoyés au dictateur pour la demande de l'expulsion de tous ceux qui avaient fait allégeance aux nazis. Qu'est-il arrivé à ces présumés collaborateurs nazis ? Ont-ils finalement été livrés ? Y en a-t-il d'encore vivants ?" L'histoire empoisonne toujours la politique actuelle de l'Espagne. Franco a été bien trop conciliant avec les criminels de guerre, et un bon nombre de responsables de l'administration espagnole ont fait de même. L'or nazi avait attiré bien des convoitises. C'est le juge espagnol Ismael Moreno Chamarro qui avait requis en 2011 contre John Demjanjuk.

Au milieu de l'expansion nazie sur le pays, la Lufthansa jouait en effet un rôle primordial : les vols avaient souvent lieu en JU-52 aux couleurs nazies, entre la Suisse (à Cointrain) l'Espagne. Ou à bord de ce JU-90, des énormes avions civils qui impressionnaient déjà tout avec lesquels Hitler testait ses futurs appareils de transport de guerre (parfois certains les confondent avec le Ju-290, voir ici *) Or parmi les pilotes de la Lufthansa figurait justement Hans Baur, le pilote personnel d'Hitler et le chef de son escadron "Reichsregierung", basé à Oberwiesenfeld, près de Munich, et Max von Müller, pilote personnel de Goering. Enfin, de la Luftahansa, c'est vite dit : à aucun moment durant son existence le groupe (Staffel) de Baur n'a appartenu non plus à la Luftwaffe. Il était en réalité directement sous les ordres de la Chancellerie du Reich et faisait partie du personnel militaire lié au Führer Des personnel navigant et d'autres hauts responsables de la vénérable Deutsche Lufthansa (DLH) occupaient un grade honorifique dans la SS, et portaient des uniformes d'officiers SS. Pendant les années de guerre, Hans Baur créera l'emblème de son groupe, qui consistait en une tête d'aigle avec une couronne de chêne l'entourant et l'inscription "F.d.F". Aurait-il gardé quelques souvenirs de ses vols vers Barcelone ou Madrid pour y mener son patron, expédié incognito chez son ami Franco ? En fait, l'avion personnel d'Hitler, avant le Ju290, fut longtemps le F&W Condor 200 26+00 A0-S9 "Imellman III" (au début du chapitre il en descend). Un avion tout confort, bien entendu :

Le vol supposé d'Hitler en Ju-290 aurait eu lieu le 6 avril 1945, et l'appareil aurait été endommagé, paraît-il, à l'atterrissage en raison du brouillard. Voilà pour le "on dit". Car Hitler étant censé se suicider à Berlin le 30 avril. En l'absence de matériel visible, en ce qui concerne la fuite supposée d'Hitler, on va dire qu'il ne peut donc s'agir que de spéculations sans fondement réel.  Plusieurs témoignages de hauts dignitaires nazis affirment être allés le saluer une dernière fois le 20 avril, Speer affirmant même l'avoir fait le 23 encore : l'hypothèse de sa fuite le 6 est difficilement tenable. Mais l'histoire n'est pas totalement close sur le sujet... Toujours sans cadavre à montrer, toutes les théories peuvent fleurir. On en trouvera d'autres, rassurez-vous. Voilà en tout cas qui fait étrangement écho à une situation actuelle... 

Lui non, donc, mais ses fidèles oui, car les allemands avaient tissé des liens avec les espagnols depuis la guerre civile, on le sait. A ce moment là, la Lufthansa jouait déjà un rôle trouble. "Le 9 août 1936 les autorités espagnoles ont saisi un avion allemand Lufthansa et son équipage à l'aéroport de Badajoz. Le gouvernement allemand a immédiatement exigé que l'équipage et l'avion soit rendu, en affirmant que l'avion avait été utilisé uniquement pour évacuer les citoyens allemands d'Espagne, et a menacé de rompre leurs relations avec le gouvernement de l'Espagne. Il faudra attendre le 15 août pour que les autorités Espagnoles, pressées par le gouvernement français, acceptent de libérer l'équipage et promette de ne pas faire usage de l'avion qui aurait été saisi, alors qu'il était resté entre leurs mains. Les Allemands insistaient sur la libération de l'avion. Les mesures prises par le Gouvernement espagnol offraient aux Allemands une bonne excuse pour retarder la signature d'un traité international de non-intervention, préparé par les Français et les Britanniques. L'Italie et l'Allemagne pensaient que le retard de l'embargo sur les armes à l'Espagne leur permettrait de renforcer les forces nationalistes et affaiblir le gouvernement de Madrid. D'autres complications sont survenues lorsque des navires de guerre espagnols ont commencé à entrer en contact armé avec les navires allemands, et ont ouvert le feu sur le paquebot allemand Kamerun et ont fait monter des hommes armés à bord"

Dès octobre 1936, le ministre italien des affaires étrangères, Galeazzo Ciano, rencontra Von Neurath à Berlin et Hitler à Berchtesgaden. Ensemble, il signèrent un accord qui reconnaîtrait automatiquement les nationalistes de Burgos, dès la chute de Madrid. Aussitôt, Franco s'équipera de machines Hollerith, pour purger sa propre administration des anciens partisans de la démocratie, et les enfermer... avec ses machines IBM, il donnera 6 000 noms de juifs espagnols à Hitler, décrits de façon raciale dans le courrier envoyé à la Chancellerie. Les armes livrées aux nationalistes ne sont pas seules : " Des firmes étrangères telle que Ford et Texaco fourniront également, à crédit, camions et carburant en quantités importantes", note Wikipédia, ce qui n'est guère pour nous étonner (les camions "Blitz" allemands seront des General Motors, ou des Ford, comme je l'ai déjà souligné ici-même).

"En revanche, quelle ne sera pas la surprise de beaucoup de soldats américains à bord de leur camion Ford de se trouver nez à nez avec le même véhicule V3000 en camouflage allemand ! Quelques variantes de cabine par-ci, quelques occupants de plus, par-là, mais c’était bien le même des deux côtés ! !! Même avec des chenilles, en plus, devenu alors le "Maultier", on le reconnaissait aisément !!! Il servira même lors des débandades à la fin du conflit ! Ford et GM avaient travaillé avant guerre pour les deux bords, et la liste des véhicules produits est aujourd’hui effarante à établir. Steyr (en Autriche), Hanomag, Maybach, Horch, Hansa, Audi, Buick-allemagne, Opel, Mercedes, Adler, Wanderer, BMW, DKW, Hanomag, tous avaient fait des Ford ou des General Motors sous licence ou avaient mis des moteurs Ford ou GM dans leurs véhicules ! Même les pick-ups américains avaient été intégrés à la Wehrmarcht !" 

Aussitôt après, l'Allemagne, qui s'était annoncée comme non intervenante dans le confit espagnol, commençait ses livraisons d'armes. Franco avait pris le commandement des troupes au Maroc le 17 juillet, et déjà le 31, une société nommée "Carranza & Bernhardt, transportes en general" avait été créé pour gérer tous les détails opérationnels, elle sera connue plus tard sous le nom d'Hisma (Companía Hispano-Marroquí de Transporta) et de Rowak (pour Rohstoffe-und-Waren-Einkaufsgesellschaft). Enregistrée à Tetuán, c'était officiellement une société espagnole privée, co-détenue par Johannes Bernhardt (envoyé du Reich Maréchal Marshal Herman Göring), et Fernando de Carranza y Fernández de la Reguera, le maire de Cadix.... la suite on la connaît : les allemands se serviront de la guerre d'Espagne pour mettre au point leurs armes nouvelles, dont le Me-109 (via la Légion Condor),   et les techniques de bombardement massifs dont Guernica fit les frais. Le 11 Octobre 1936, la mission Feuerzauber prenait fin : elle avait amené 13 500 troupes 127 canons lourds and 36 canons légers en Espagne, en provenance du Maroc. Quand la Catalogne tombe en février 1939, après une guerre civile épouvantable, Franco est le vainqueur. Mais il décida de rester neutre durant le conflit suivant, ce qui eût l'heur de passablement ne pas plaire à Hitler. Himmler rencontrera alors son homologue espagnol, et la même année, le 23 octobre 1940, Hitler et Franco se rencontraient à Hendaye en France. Mais Franco, qui venait de subir un attentat très certainement pro-nazi contre sa personne refusa à Hitler l'accès à Gibraltar. En 1943, Hitler, toujours remonté contre ce faux-allié, reçut de Donïtz la proposition d'envahir l'Espagne. On le voit, la relation entre les deux dictateurs n'a pas toujours été au beau fixe.  Mais fin 1945, et dans les années qui vont suivre, Franco se souviendra des armes reçues en 1936 (apportées par la légion Condor, comme celui figurant ici à gauche), et ne fit aucun obstacle à recevoir les nazis en fuite (comme les collabos français aussi d'aillleurs !). Les espagnols, en 2005, cherchaient encore après Aribert Heim, l'un des bourreaux de Mauthausen, suspecté s'être réfugié aux îles Baléares. Il avait repris une activité en Allemagne et s'en était enfui en 1962, quand des historiens avaient retrouvé sa trace. En Espagne, le nazisme a fait florès, et il en reste de lourds stigmates, jusque dans les stades de foot... Les "criminels de bureau", comme ceux de Canfranc ou passait l'or nazi, ont fait des petits depuis... hélas !

L'or des nazis, dont au moins 86 kilos ont été répertoriés par hasard à Canfranc par un chercheur occasionnel, tombé par hasard sur des papiers : "Ces papiers, donc ? « Un ami collectionnait les timbres. Alors je récupère une lettre et je vois des papiers datant de 1940 à 1945. J'en prends une poignée. C'est le soir, chez moi, que je découvre sur l'une de ces fiches « lingotes de oro » et là, je comprends qu'il ne passait pas que des voyageurs et des marchandises, que la légende l'or de Canfranc n'en était pas une. J'y suis retourné immédiatement avec mon sac à dos et ma lampe frontale pour récupérer le reste. Personnellement, grâce à certains fragments retrouvés, je pense même qu'il y a eu plus de 86 tonnes » poursuit Jonathan Diaz. Dont la découverte est alors relayée par la presse locale. Mais surtout par Le Temps, à Genève, qu'il a contacté, la Suisse apparaissant dans ces documents. « à partir delà, ma découverte est devenue très gênante. ça a été un vrai « Watergate » pour Madrid. En 1997, l'Espagne s'était auto blanchie quant à l'or nazi avec un rapport ne reconnaissant qu'une centaine de lingots d'origine douteuse. Idem au Portugal. Et là, on parlait de dizaines de tonnes d'or. J'ai reçu des coups de fil menaçants, des gens mal intentionnés voulaient récupérer ces documents car ils révélaient aussi une véritable contrebande d'état, celle du wolfram (le tungstène), dans le dos des alliés » explique le découvreur. Qui poursuit ses recherches, même si « 70 ans après, les témoins se font de plus en plus rares ». Pour lui, désormais, « l'histoire a une odeur… le moisi de ces archives, jetées par terre et qu'on a voulu oublier. » . Il y avait eu au total "86,8 tonnes d'or, au fil de 44 convois ferroviaires qui ont été déchargés là, du 16 juillet 1942 au 27 décembre 1943..." précise l'article. Par train, et lors des derniers jours du Reich, par...avion. Les nazis échappés pouvaient vivre de beaux jours encore.

"Des Ju-290, il n'en restait que trois de complets à la fin de la guerre. L'A-4, numéro 0165, avec son radar au dessous noir, ramené aux USA comme on l'a vu, un reçu par les anglais pour y être évalué, (ces deux exemplaires ont été détruits depuis) ; et le fameux exemplaire espagnol, un A-5, numéro 0178, qui servit après guerre à l'Ecole Supérieure de l'Air à Salamanque. Accidenté au milieu des années 1950, il fut retiré des services (et sans doute scrappé). Les tchèques en héritèrent d'un, issu d'un prototype de haute altitude non terminé, il fut transformé en avion de transport civil sous le nom de Letov L.290 Orel." Le modèle espagnol, je vous en ai retrouvé une photo, plutôt rare, ici en tête de paragraphe : les espagnols ont bien gardé un exemplaire, qui a volé jusqu'à son accident, c'est à dire en 1952. Mais pourquoi donc a-t-il aussi été détruit ?

Un modèle plus grand encore, le Ju-390, à 6 moteurs et 4 trains de toues principaux fut mis en chantier et un exemplaire (sur les deux construits) prit même les airs à Merseburg le 20 octobre 1943 aux commandes du pilote d'usine Junkers, Hans-Joachim Pancherz. Ce dernier, le 15 juillet 1943 était devenu le premier à s'éjecter avec un siège éjectable son appareil Ju 290 SB+QF en ayant été muni... encore une autre innovation pour cet engin à part dont il ne reste rien aujourd'hui. Panchrz, lui, affirmera plus tard qu'il était bien aux commandes d'un 390 qui avait fait demi-tour une fois les tours de Manhattan photographiées...  le 27 août 1943, ce qui n'est pas sans poser d'autres questions. Un photographe du New-York Times qui avait pris la silhouette de l'appareil perdu dans la brume aurait eu son appareil photo confisqué par le FBI. Personne n'a jamais vu le cliché, hélas, et on est toujours dans l'expectative sur cette version des faits. Un avion allemand aurait l'année 1943 fait le trajet aller et retour ? Lors de ses différents témoignages, Panchrz situera un "deuxième" vol vers le 18 janvier 1944 à partir d'une base française (à Orléans-Bricy, là où les français récupéreront un He-277 à quatre moteurs pour essayer leurs futurs chasseurs ?). Orléans, ou plutôt Mont de Marsan, sans doute, où a été vu un Ju-290 à plusieurs reprises. Notamment le numéro A-7 KR+LQ, sorti d'usine Junkers en mars 1944, et en activité jusqu'au moins août 1944 (sur la base du 1/FAGr5). En août ; le groupe de Mont de Marsan avait en effet été dissous et réaffecté au Kommando Nebel. Un autre Ju-290 avait été ici photographié à Tours.

En prime ce grand frère agrandi du Ju-290 qui était en développement, le Ju 390, un énorme hexamoteur géant sorti des cartons des ingénieurs volait à 19 000 pieds (5 791 mètres) et aurait eu une consommation de carburant par moteur de 55 gallons US par heure et par moteur (208 litres !). L'appareil aurait emporté 30 tonnes de carburant en interne pour un poids au décollage avoisinant les 72 tonnes. C'était bien un monstre véritable. Un B-29 en faisait 60 "seulement", et emportait jusqu'à 35 tonnes de carburant. Il semble que deux exemplaires unique aient été construit. Le GH+UK, construit à partir d'une cellule de Ju-290 agrandi (le D-AOKD), et qui a volé pour la première fois le 20 octobre1943, et le RC+DA, à partir du Ju-290 N°J900155, qui aurait volé beaucoup plus tôt. Voilà qui devient.... de plus en plus passionnant ! 

D'autant plus passionnant que ce fameux Ju-390 aurait aussi été réquisitionné pour approvisionner en matériaux stratégiques le Japon ! "La première allusion publique d'une mission de Ju-390 au Japon surgit dans les mémoires de l'ancien ministre de l'armement Albert Speer. "A l'intérieur du Troisième Reich ». Dans son carnet, Speer à noté des vols de Ju-390 à destination de Tokyo "via la route polaire" en 1945. Speer avait peu à gagner en révélant ces vols et en fait, fait le commentaire tout à fait nonchalammant. Speer a aussi mentionné le vol d'un Ju-390 vers Tokyo avec aux commandes des pilotes de test civils qui semblent identifiés comme étant le pilote d'essai de Dornier, le Flugkapitan Quenzler, et le pilote d'essai Karl Patin. En 1995, l'opérateur radio de l'U-234, Wolfgang Hirschfeld a écrit dans son livre « Atlantik Adieu, Das letzte U-boot") que suite à une collision dans le Kettegat entre le Danemark et la Suède avec un autre sous-marin, sous sa surface, l'U-234 a été contraint de se rendre dans un port norvégien pour les réparations en Mars 1945. Hirschfeld a noté que les marchandises avaient un besoin urgent d'être déchargées pour être transportées par avion vers le Japon." Sur ces échanges Japon-Allemagne (dont de l'or, également !), nous reviendrons, rassurez-vous. Nous verrons que le transport par avion n'était pas le plus utilisé, tant les chargements étaient lourds. Un autre moyen de transport inattendu était utilisé...

Tout aussi passionnant, remarquez, était ce qu'on avait fait des engins ramenés dans des caisses et remontés en 14 mois au total. 14 mois, après la victoire alliée en Europe du 8 mai 1945 ? On est alors à peu près rendu en septembre 1946, et les essais pouvaient véritablement commencer. Pour certains, ils ont même débuté avant (voir ici). En plein désert du Nouveau-Mexique, le reste de l'année et le début de la suivante vont être l'objet d'expérimentations tous azimuts d'engins nouveaux, ceux sortis tout droit de l'imagination des ingénieurs allemands. Des avions, comme des fusées. Ce qui ne sera pas sans surprises...

(*) erreur d'interprétation d'une attaque de Ju-90 par un B-26 anglais au large de la Corse. L'appareil est décrit comme étant un Ju-290, ce qui est faux. Il serait intéressant de savoir comment a fini ce JU-90... l'attaque est datée de septembre 1943. Ici aussi, on confond largement les deux.

diaporama du monstre (avec une pénible musique) :

http://www.youtube.com/watch?v=c-cfhTCwbSc&feature=related

Le dossier sur le 3 eme Reich et l'Espagne est ici :

http://www.cultiv.net/cultranet/1128436657thirdreichandspain_relationsbetween.pdf

le site fondamental sur le JU 390 est ici 

http://sites.google.com/site/junkersju390/home


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