La majorité centrale de Bayrou est-elle possible ?

par Sylvain Rakotoarison
mercredi 18 avril 2007

Michel Rocard, Bernard Kouchner, Daniel Cohn-Bendit à gauche, François Goulard, des proches de Nicolas Dupont-Aignan à droite... rendent-ils crédible cette majorité si décriée que Bayrou souhaite proposer au pays depuis plusieurs mois ?

Il n’y a plus que quelques jours avant le premier tour de l’élection présidentielle.

Visiblement, beaucoup de désinformations naviguent sur internet sur des pseudo-sondages et autres hoax. Il semblerait qu’elles ont surtout pour but de remobiliser les électeurs de Ségolène Royal qui n’ont plus beaucoup d’espoir de battre Nicolas Sarkozy au second tour.

Ces électeurs, hésitants, devraient se rappeler l’intérêt du « vote utile ». Le vote utile, c’est choisir le candidat dont la force rendra plus efficace ses objectifs. Parmi ceux-ci, l’élection d’un candidat, ou la non-élection d’un autre. À chacun d’être juge de savoir quel est le vote le plus efficace.

Et éviter le vote inutile, celui par exemple qui, en se portant sur Le Pen en 2002, a permis 82% à Chirac. Quel était donc l’objectif de ces électeurs de Le Pen ? Faire réélire triomphalement Chirac ?

C’est pourquoi chaque électeur doit bien imaginer les conséquences de son vote.

Depuis quelques jours, François Bayrou jouit d’une véritable aubaine, celle de la crédibilité de son discours sur la constitution d’un large gouvernement démocrate social et européen dépassant le clivage gauche-droite.

Cette idée, dans notre république actuelle si marquée par la bipolarité des seconds tours, était audacieuse et relativement kamikaze pour le candidat centriste. Plébiscitée par 65 à 71% des Français selon les sondages, sa mise en œuvre est très peu aisée en raison du verrouillage des appareils partisans (de l’UMP et du PS).

L’aubaine, c’est que des brèches viennent de desserrer ces verrous.

À droite, le villepiniste Azouz Begag a rejoint Bayrou sans doute par rancune personnelle contre Nicolas Sarkozy étayée par son dernier bouquin. Le ministre libéral François Goulard, pourtant élu UMP de Vannes, a lui aussi choisi Bayrou le considérant comme le plus apte à redresser le pays. Des proches de Jean Tibéri et de Nicolas Dupont-Aignan lui ont aussi emboîté le pas.

À gauche, plusieurs groupes de socialistes, notamment des hauts fonctionnaires socialistes (Spartacus, Gracques) ont pris position en faveur de Bayrou.

L’historien Jean-Pierre Rioux et Jean Peyrelevade, ancien directeur de cabinet de Pierre Mauroy à Matignon et ancien patron du Crédit lyonnais, aussi.

Évidemment, les prises de position sont aujourd’hui risquées pour ceux qui ne veulent pas se couler dans le moule UMP-PS. Alors, tout le monde attend le premier tour pour se délier la gorge.

Mais ce week-end, les premiers indices à gauche arrivent : Michel Rocard et Bernard Kouchner demandent une union entre Bayrou et Royal pour le second tour. Ils sont d’accord avec cette idée de gouvernement d’union nationale que seul Bayrou propose depuis plusieurs mois. Daniel Cohn-Bendit avait déjà indiqué son soutien à cette démarche.

Parmi les écologistes, Antoine Waechter et Corinne Lepage ont aussi rejoint le candidat Bayrou.

Michel Barnier et Jean-Louis Borloo, à droite, seraient, eux aussi, bien tentés par la démarche si tout n’était pas verrouillé, et l’ancien ministre du Général de Gaulle (l’un des deux derniers encore en vie avec Pierre Messmer), Jean-Marcel Jeanneney, 96 ans, (fils de Jules Jeanneney, président du Sénat, et père de l’ancien ministre socialiste Jean-Noël Jeanneney) a, lui, fait un pas encore plus grand puisqu’il a appelé à voter pour Ségolène Royal.

Et enfin, Dominique Strauss-Kahn, dont les thèses économiques sont très proches de celles de Bayrou, a évoqué, lui aussi, une alliance entre les centristes et les socialistes, sans exclure qu’il pourrait en être l’élément clef.

Bref, toutes ces prises de positions montrent que la majorité nouvelle, la majorité centrale, telle que la propose Bayrou, est possible malgré le refus des appareils partisans, et qu’elle serait une véritable chance pour réformer en profondeur la France.


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