La Résistance Animale

par Vegan Folie’s
mardi 8 mars 2016

Et si on parlait de la résistance animale ?

Vegan Folie’s a organisé et animé une conférence sur cette thématique à Paris, le 15 février 2016.

(https://youtu.be/U36Mcw75YJ0) 

 

Si le spécisme* est omniprésent dans notre société, sa réponse l’est également : la résistance animale. En effet, chaque animal qui souffre résiste. Comment ? 

Ce que j’appelle la résistance passive consiste à ne pas faciliter la tâche de son agresseur (éleveur, dresseur, tueur…) : refuser de bouger ou au contraire se débattre, grogner…
La résistance active, beaucoup plus visible, est une attitude offensive. Les animaux se battent physiquement et s’évadent de leur situation d’emprisonnement (élevage, abattoir, prison…).

Tout comme pour les humains, la résistance animale prend donc différentes formes (J. Hribal et S. Best).

 

Dans les pays anglo-saxons, des chercheurs de disciplines différentes se sont intéressés à la question. Citons entre autres : Jason Hribal et Erica Fudge (Histoire), Sarat Colling et Dinesh Wadiwel (Sciences sociales), Marc Bekoff (Ethologie), Chris Wilbert et Chris Philo (Géographie), Steven Best (Philosophie).

 

L’impact de la résistance animale sur notre société spéciste est multiple : 

A partir des années 60-70, la stratégie de l’industrie de la viande a été de devenir invisible en mettant à distance les abattoirs des centres villes. L’idée était d’éviter que les animaux qui s’évadent se trouvent nez à nez avec leurs consommateurs. (S. Colling) Citons les abattoirs de Vaugirard (Paris), de la Villette (Paris) ou encore de Toulouse (devenus « le musée des Abattoirs »).

Les technologies de la pêche ont été mises au point pour contrer la résistance des poissons (résistance par l’évitement : ils sont insaisissables à la main) : l’hameçon, les filets ou l’aquaculture (D. Wadiwel).

Le maintien de la loi du plus fort sur les animaux a été confié aux cowboys aux Etats-Unis dont le rôle premier était de dominer et de maîtriser les (animaux) « sauvages » qui s’évadaient des élevages. Désormais, c’est la police qui joue ce rôle.

Il existe deux types de réactions de la part des consommateurs face à la résistance animale : être solidaire des animaux en devenant végane ou ne pas changer ses habitudes et essayer de justifier ce phénomène en se convaincant que c’est une exception (« cette vache-là voulait vivre »).

 

Dans le mémoire qu’elle a consacré à la résistance animale, Sarat Colling réalise une analyse sémantique des articles de presse publiés sur le sujet. Le vocabulaire utilisé est très souvent péjoratif (« sauvage »), avec un ton humoristique (rubrique Insolite), la résistance de l’animal en question n’est pas prise au sérieux (« fugue ») et tout laisse à penser qu’il s’agit d’une exception (« Marguerite ne voulait pas finir en bifteck »).

 

Tyke ou le symbole de la résistance animale

Cette éléphante a mené plusieurs attaques dans les cirques où elle a été emprisonnée. Mais c’est à Honolulu à Haïti qu’elle s’est connaître. En 1994, elle s’est évadée en plein spectacle après avoir piétiné son dresseur. Elle s’est alors retrouvée dans les rues de la ville poursuivie par des policiers. Tyke a été tuée par 86 balles sous les regards horrifiés des passants.

 

La résistance animale doit être ajoutée à l’argumentaire de base en faveur du véganisme : 

les animaux souffrent physiquement

les animaux sont des êtres sentients (émotions)

les animaux ont une conscience (volonté de vivre) (cf. Déclaration de Cambridge signée en 2012)

les animaux résistent : comment peut-on manger un individu qui agit physiquement pour survivre ?

 

Nous, véganes et antispécistes, il est de notre devoir de parler de la résistance animale, de raconter les histoires de résistance de Tatiana, Tyke, Marguerite, Queenie ou Molly**, exactement comme on parle des « grandes femmes et des grands hommes ». Le devoir de mémoire s’applique aussi à la résistance animale, même si sa particularité est que le massacre des animaux n’a pas encore cessé. Peut-être est-ce une raison supplémentaire pour en parler ? En parler oui, mais utiliser un vocabulaire adéquat est essentiel (champ lexical de la résistance : courage, évasion, risquer sa vie, oser, liberté…). Enfin, il est urgent de bannir de notre langage tout discours qui rend les animaux passifs (objets) : « les sans-voix », « ils ne peuvent pas se défendre »…

 

Comme l’écrit Jason Hribal, « résister n’est jamais futile » et Tyke en est la parfaite illustration. Car oui, Tyke a payé de sa vie pour sa liberté. 

Mais Tyke a fait clairement bougé les lignes : elle a alimenté le débat autour de la captivité. Combien d’articles de presse sur Tyke ont été publiés ? Combien de JT ont relayé cette tragédie ? Et combien de procédures judiciaires ont été lancées lors de son assassinat (contre la ville, contre le cirque…) ? Tyke a également permis de faire évoluer la législation sur les cirques en Californie. Et même des artistes se sont emparés de son histoire (musique et documentaire) !

 

Car après tout, chaque fois qu’un animal résiste, notre système spéciste se fissure et la question de la justice sociale pour les animaux est posée. Humains, soyons solidaires de la résistance animale !

 

 

* Le spécisme est la volonté de ne pas prendre en compte les intérêts des animaux non humains au bénéfice des humains. En pratique, le spécisme est l'idéologie qui justifie et impose l'exploitation et l'utilisation des animaux par les humains de manières qui ne seraient pas acceptées si les victimes étaient humaines.

 

**  Toutes ces histoires sont à écouter sur la vidéo de la conférence du 15/02/2016 : https://youtu.be/U36Mcw75YJ0

 

 

​Pour aller plus loin (par ordre d'apparaition dans l'article) :

 HRIBAL J. (2010) Fear on the animal planet : The hidden history of Animal resistance.

 COLLING S. (2013) Animals without Borders : Farmed Animal Resistance in New York.

 WADIWEL D. (2015) Do fish resist ?

 BEKOFF M. (2010) The animal manifesto et (2009) Les émotions des animaux.

 PHILO C. et WILBERT C. (2004) Animal spaces, beastly places.

 PHILO C. (2002) Entanglements of Power : Geographies of Domination/Resistance.

 BEST S. (2011) Animal Agency : Resistance, Rebellion and the Struggle for Autonomy.

 HRIBAL J. (2007) Resistance is never futile, http://www.counterpunch.org/2007/04/17/resistance-is-never-futile/

 


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