La taxe Tobin sent le Sapin...

par VICTOR Ayoli
mercredi 17 décembre 2014

La taxe Tobin, vous connaissez ? Mais si, c'est cette taxe, proposée depuis des années (1972) par James Tobin, ci-devant prix Nobel d'économie. C'est une taxe très minime sur les transactions financières internationales.

 

 La Commission européenne – pour une fois bien inspirée - a présenté en février dernier un projet qui prévoit d’imposer à 0,1 % les actions et les obligations et à 0,01 % les produits dérivés, ce qui pourrait selon elle rapporter jusqu’à 35 milliards d’euros par an. Pas mal, bien que ça n'aille pas chier loin au niveau des taux. Pas de quoi ruiner les banquiers... Mais c'est toujours ça et ces fonds récupérés chez les spéculateurs pourraient servir à relancer la croissance et à désendetter les États.

Il s'agit de la première coopération renforcée entre pays européens dans le domaine de la fiscalité. La France, l'Allemagne, la Belgique, le Portugal, la Slovénie, l'Autriche, la Grèce, l'Italie, l'Espagne, la Slovaquie et l'Estonie en sont les premiers signataires. On pourrait penser qu'un gouvernement « socialiste », en France, devrait sauter sur l'occasion et pousser de toute sa persuasion pour que les partenaires européens signent en grand nombre la mise en place de cette taxe. Tè ! Fume...

Mosco, lorsqu'il sévissait à Bercy, s'est vautré dans la soumission la plus veule en promettant de mener « en concertation avec les acteurs du secteur financier, un travail d’amélioration de la proposition de la commission pour mettre en œuvre une taxe qui ne nuise pas au financement de l’économie  ». En terme clair : enterrer la taxe, selon les desiderata des financiers et banquiers.

Exit Mosco, qui est allé sévir au niveau de l'Europe. Voilà Sapin. Les ministres passent, mais les satrapes élus par personne de Bercy sont toujours là. Ce panier à crabe de « haut fonctionnaires » ultralibéraux fait la pluie et le beau temps dans ce ministère-clé. Et le beau temps, pour eux, c'est celui voulu par les banquiers. Car leur passage à Bercy est pour ces « grands serviteurs de l’État » (? ??) un tremplin efficace, il leur procure un carnet d'adresse prestigieux pour entamer enfin leur véritable carrière : le pantouflage dans le monde feutré, sournois et juteux de la finance où ils pourront jouer pour le privé, contre les intérêts publics.

Exemple ? Le ci-devant Benoît de La Chapelle vient de rejoindre la Fédération bancaire française (FBF), puissant lobby des banques, adversaire farouche de la taxe Tobin. Ce Bercy-boy était, depuis 2010, responsable des « affaires financières et monétaires » à la représentation permanente française auprès des institutions européennes. Il avait à ce titre un pouvoir d'influence conséquent dans les négociations sur la taxe Tobin. Il fut aussi directeur de cabinet adjoint de Jean-Pierre Jouyet, lorsque ce dernier était secrétaire d'État aux affaires européennes.

 

Les décisions des Bercy-boys, spécialement celles de la Direction du Trésor sont édifiantes. Écoutons plutôt Ludovic Lamant, dans Médiapart  :

« 1/ vis à vis des banques : Affaire Crédit Lyonnais, Affaire Crédit Foncier, arbitrages sur l'épargne et l'information financière toujours défavorables à la Caisse des dépôts (publique) et toujours favorables aux banques (privées) les plus spéculatives ; refus, malgré les enseignements de la crise de 2008, de restaurer la séparation indispensable entre banques de dépôts et banques d'affaires ; sabotage constant de la taxe Tobin ; etc...

2/ en matière d'entreprises publiques et de privatisation : refus des nécessaires dotations en capital des entreprises publiques pour assurer leur croissance ; recherche systématique de privatisation ; Vente à perte des licences audiovisuelles, vente à perte des Autoroutes ; etc ... Et çà continue avec l'aéroport de Toulouse et plein d'autres dossiers en instance.

3/ en matière de dettes : assujettissement, contraire à l'intérêt et l'indépendance de la Nation, de la dette publique aux agences anglo-saxonnes de notation, avec refus de faire appel spécifiquement à l'épargne nationale ; refus de consolider la dette des grandes entreprises publiques (dont RFF/SNCF) sur les fonds d'épargne disponibles dans les banques comme à la CDC, afin de pousser à leur privatisation.

4/ en matière de "politique sociale" : appui systématique aux aides imbéciles à "effet d'aubaine" pour le secteur privé dans les domaines de l'énergie, du Logement et de la Santé publique. De multiples exemples peuvent être cités, de l'APL aux aides aux éoliennnes en passant par les remboursements de la SS. »

 

Et Sapin, qu'est-ce qu'il fait ? En complicité avec le Rothschild-boy Macron, le mois dernier, il a proposé une taxe réduite aux seules actions et à quelques contrats d'assurance CDS. Mais surtout pas de taxer l'essentiel de ce qui fait la spéculation, les fameux produits dérivés. La taxe Tobin risque donc d'être enterrée par la France, alors que le candidat François Hollande en avait fait un des axes de son programme...

Depuis, le candidat Franc-çois est devenu le président Faux-çois...

 

Illustration X – Droits réservés 


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