« La visite pastorale » à Rome du président Sarkozy, un lapsus de journaliste sur France Inter

par Paul Villach
vendredi 21 décembre 2007

L’intronisation du président Sarkozy comme chanoine de la basilique de Saint-Jean-de-Latran peut faire sourire, que l’on éprouve de la désolation ou que l’on ressente un vif contentement.

Ce rituel paraît si désuet. Mais on peut lui reconnaître une vigueur enviable capable de résister à tous les bouleversements historiques... depuis Louis XI en 1482.

Un journaliste plein d’empathie

Le reporter de « France Inter », admis à suivre la visite du président, en était d’ailleurs tout retourné : dans le journal de 13 heures de jeudi 20 décembre 2007, il en est venu à parler de... « la visite pastorale  » du nouveau chanoine, avant de s’empresser de la corriger en « présidentielle ». Il a même été capable de livrer au monde les mots murmurés par le nouveau chanoine à l’oreille du pape Benoît XVI, qui traduisaient la grande émotion de l’impétrant. Pour recueillir ces paroles précieuses des bouches et oreilles augustes, des micros auraient-ils été agrafés à la cravate de l’un et sur la soutane de l’autre, ou, au contraire, le dialogue figurait-il dans le script du scénario remis aux journalistes ?

Les images édifiantes du président Sarkozy

Le président Sarkozy a désormais habitué son public à déchiffrer les faits et gestes qu’il met savamment en scène : il livre, chaque fois, de façon calculée des images édifiantes, qui sont à la fois des pierres entrant dans l’édification non de son église, mais de sa présidence, et des petits cailloux dessinant un chemin, comme autant de leçons de catéchisme à l’intention des citoyens.
Après Tipasa et Disneyland, voici le président Sarkozy venu au Vatican, capitale de la catholicité, pour recevoir le titre honorifique de chanoine des mains de l’évêque de Rome qui est en même temps le pape de l’Église catholique. Sauf erreur, les présidents Pompidou et Mitterrand avaient boudé cet honneur. Courir le recevoir comporte donc un ou plusieurs messages. On en voit trois.

Trois messages

- Ces images de grande proximité - de bouche à oreille - entre le président Sarkozy et le pape Benoît XVI ne peuvent que combler d’aise l’électorat conservateur qui a élu le premier. Cette entrée dans le chapitre des chanoines, conseil de l’évêque de Rome, est un aveu symbolique d’obédience et une reconnaissance du magistère moral du pape qui ne peut que ravir les tenants d’un ordre moral d’où sont bannis la contraception et le divorce.

- Que le président d’une République, dont la laïcité est un des fondements depuis cent ans, exhibe autant de proximité avec le représentant de la religion contre laquelle cette laïcité a dû combattre pour imposer son existence, montre une relation que l’on veut désormais apaisée au point que le garant de cette laïcité peut revêtir aujourd’hui le camail, voire la calotte sans craindre d’effaroucher quiconque ni d’entendre les fameux cris d’autrefois « À bas la calotte ! ».

- Surtout, ces images paraissent s’adresser aussi au reste du monde pour rappeler le socle de la mouvance ou de l’obédience auquel se rattache la France et qu’il est vain de contester, comme le fait un Khadafi en prophétisant une islamisation prochaine de l’Europe. Le rêve du guide libyen est remis aux calendes gréco-romaines.

On ne peut s’empêcher de rapprocher ces images de celles que la présidence des Etats-Unis avait tenu, elle aussi, à livrer « urbi et orbi » lors de la mort de Jean-Paul II en avril 2005 : le président Bush, entouré de ses deux prédécesseurs républicain et démocrate, son propre père et Bill Clinton, avait devancé tous les autres chefs d’État pour offrir leur agenouillement solitaire devant la dépouille du pape dans la basilique Saint-Pierre de Rome. Il n’était plus question de chamailleries de famille entre protestants et catholiques : le monde entier devait comprendre que la chrétienté était rassemblée.


Nicolas Sarkozy rencontre Benoît XVI
envoyé par Claiborne

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