Le Bouddhisme c’est de « la Mer.. », ou la réhabilitation de celle-ci…
par Guy Raynaud
lundi 10 octobre 2011
Le 7 octobre j’ai fait paraître un article intitulé : « La loi de la jungle existe telle ? », dans lequel je me référais au Bouddhisme, et un commentateur a écrit ce message qui n’a pas été publié par la Rédaction d’Agoravox mais que j’ai reçu par mail : « le Bouddhisme c’est de la merde… ». Il à voulu, par ce mot, dévaloriser cette doctrine ! Car « la merde » c’est sale et ça pue. Par ce mot nous voulons caractériser ce qui est dégradant, humiliant, impur…
Mais la merde est une matière plus noble qu’on le pense, c’est pour cela que je ne me suis pas offusqué par le dit commentaire, il m’a fait plutôt rire…
Car si l’on prend quelques distances avec nos conditionnements la merde n’est pas une matière si « impure » que cela, bien au contraire. Si nous n’en fabriquions pas nous ne vivrions pas. La merde fait partie du cycle de la vie, dans celui-ci elle participe à la fabrication de l’humus qui alimente les plantes qui ensuite nous alimentent…
Nous sommes dans une civilisation ou tous ce qui concerne notre fonctionnement physiologique est plus ou moins tabou, on ne veut pas le voir, il en est ainsi de la digestion est des manifestations qui l’accompagnent comme nos excréments… Ce comportement est relativement récent, jusqu’au 18em siècle « La merde avait sa place dans l’ordre des choses. Ce n’était pas encore une sécrétion honteuse : elle faisait partie du cycle de la vie, de la mort et de la naissance » (Michael CAMILLE, historien d’art). Jusqu’à cette période déféquer était naturel, chez les Romains les toilettes étaient collectives et mixte, il en est ainsi chez d’autres peuples, comme les chinois (ceux qui sont encore non occidentalisés) ! Aujourd’hui dans nos sociétés occidentales qui s’enorgueillissent de leur mode de vie il faut « chier » seul(e) dans un lieu fermé et privé et on n’en parle pas, on le cache comme quelque chose de honteux. Pourtant cela c’est à la vie, comme manger, boire, marcher… C’est Antonin ARTAUD qui disait, « Là où il y a la merde il y a l’être ».
On n’en parle pas sauf si l’on veut injurier, dévaloriser quelqu’un : « tu n’es qu’une merde », « c’est de la merde »…
Et pour en revenir au Bouddhisme, voici une petite histoire du Chan (le zen chinois). Un jour un disciple demanda à son maître : « Qu’est-ce que Bouddha ? Le maître répondit : un bâton de merde ! ». En chine à cette époque (8em siècle), on se servait d’une spatule en bois pour se nettoyer. Le maître voulait montrer que l’enseignement de Bouddha nettoie notre esprit de ses illusions, de son ignorance, de ses conditionnements, etc., comme la spatule nettoie cette partie du corps !
Voici une histoire humoristique pour illustrer ce qui vient d’être écrit. « Un jour les organes du corps décidèrent de se choisir un roi parmi eux. Evidemment tous se disputèrent ce titre. Le cerveau disait « cela me revient puisque c’est moi qui contrôle tout », le cœur lui répondit qu’il ne pourrait rien faire sans le sang que lui-même lui envoyait, « c’est donc moi qui doit être le roi ». Ainsi tous les organes se prévalaient de leurs fonctions pour réclamer le titre. Puis une petite voix timide se fit entendre : « c’est moi qui serait roi », c’était l’anus (dans l’histoire telle qu’elle m’a été racontée ce n’était ce mot qui était employé, mais un autre plus « cru ») qui revendiquait le titre. Tous les autres organes s’éclaffèrent et se moquèrent : « tu t’es vu, sais-tu à quoi tu sers, ce qui passe à travers toi ? ». Mais ce petit organe persista et dit « puisque vous ne me voulait pas comme roi, j’arrête de fonctionner, je me ferme ! ». Ce qu’il fit. Au bout de quelques temps plus aucuns organes ne pouvaient fonctionner correctement, tous étaient au bord de l’asphyxie et ils supplièrent l’anus de s’ouvrir et de fonctionner de nouveau. L’anus répondit je veux bien mais à condition que vous m’élisiez roi. C’est ainsi que ce délicat petit organe devint le roi du corps !!! Sa fonction est donc aussi noble que sont titre !
Pour finir je me permets de signaler que la revue mensuelle « Silence », revue « écologiste, alternative et non-violente » qui a publié dans son numéro 387 de février 2011 une étude intéressante sur ce thème intitulé « Et merde ! ». Cette revue n’est distribuée que par abonnement ou sur certains lieux associatifs ou militants. Les citations que j’ai écrites sont extraites de cette revue, en voici une autre : « Si nous acceptons de considérer nos excréments non comme des déchets mais comme des maillons de la chaine de la vie, nous leur rendons alors un statut de matières s’inscrivant dans un cycle naturel .Des matières qu’il est possible de réutiliser ou de recycler. Dès lors, la merde n’est plus un déchet mais une ressource qu’il convient d’apprendre à gérer ».
Donc dire « le Bouddhisme c’est de la merde… », n’est donc pas une injure !
Guy RAYNAUD