Le Caucase sera-t-il les Balkans du 21ème siècle ?

par Clark Kent
dimanche 27 septembre 2020

On a appris récemment que la Turquie avait recruté quelque 2 000 « rebelles syriens » pour combattre en Azerbaïdjan contre les forces arméniennes qui occupent depuis 1993 le Haut-Karabagh, autrement dit la république autoproclamée d'Artsakh, en Transcaucasie. En 2015, la population était estimée à 148 917 habitants pour une superficie de 11 430 km2. Sa capitale et plus grande ville est Stepanakert.

Pendant la période soviétique, cette terre peuplée à 95% d'Arméniens était intégrée à la république socialiste soviétique d'Azerbaïdjan en tant qu'oblast autonome du Haut-Karabagh. Depuis la dislocation de l'Union soviétique, le Haut-Karabagh lutte pour son indépendance ou son rattachement à l'Arménie. Son « indépendance » qui date du 2 septembre 1991 n'est reconnue par aucun État membre de l'ONU. Les hostilités entre les Arméniens et l'armée azerbaïdjanaise avaient cessé après la trêve négociée par la Russie le 12 mai 1994.

Hier, les forces azerbaïdjanaises et les mercenaires ont lancé leur attaque contre les lignes arméniennes. Un véritable massacre. Deux hélicoptères azerbaïdjanais ont été abattus. Une dizaine de chars et de transporteurs de troupes blindés ont été incendiés. L'artillerie azerbaïdjanaise a endommagé des bâtiments civils à Stepankert. Des drones (turcs ?) ont frappé les forces arméniennes présentes.

 

La tactique azerbaïdjanaise, pays qui considère que ce territoire est une partie de la République d’Azerbaïdjan, semble consister à regrouper des chars en zone non couverte pour inciter les Arméniens à intervenir directement et les accuser d’ingérence. Des troupes russes sont stationnées en Arménie et un soutien supplémentaire important de la Russie a été apporté aujourd’hui. Mais la Russie entretient des rapports pacifiques avec chacun des deux pays et leur demande de négocier un armistice. L'Arménie a mobilisé ses forces et des renforts se déplacent vers le front.

Après la Syrie et la Libye, c’est le troisième pays dans lequel Erdogan tente de combattre des forces qui sont soutenues par la Russie, et la situation pourrait s'aggraver à partir de maintenant. Cela peut paraitre suicidaire étant donnés les échelles et les équipements de chacun des deux pays, mais il s’agit sans doute davantage de remuer la fibre patriotique de la population turque que de conquérir de nouveaux territoires. Les réserves de pétrole de l’Azerbaïdjan sont à Bakou, pas au Karabagh.

Dans les années 1912 et 1913, les Balkans ont été le théâtre de guerres dues à l’émancipation de peuples qui supportaient de moins en moins la domination des Turcs Ottomans et aspiraient à regrouper les populations de même langue vivant encore dans la « Turquie d'Europe ». Mais l'imbrication de ces populations dans certaines zones et le jeu des grandes puissances visant à diviser pour régner ont compliqué le processus qui a servi de prétexte à la déclaration de la première guerre mondiale sans en être la véritable cause qui était la rivalité entre les industriels allemands et français.

L’histoire ne sert jamais le même plat, mais il semblerait quand même que les mêmes causes aient tendance à produire des effets semblables. En tous cas, ces prochains jours, il faut s’attendre à une grande désinformation dans tous les journaux, partout sur la planète.


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