Le CCNE fait du « et en même temps »

par Rémy Mahoudeaux
jeudi 15 septembre 2022

L’avis n° 139 du CCNE est tombé1. Il donne son blanc-seing au législateur qui ouvrirait la voie à une aide active à mourir. C’est nouveau et contredit le précédent avis n° 121. Ce n’est pas à proprement parler une surprise, la servilité du comité ayant déjà été largement démontrée par le passé et commentée ici.

Avant toute chose, il convient de remercier ses membres qui n’ont pas souhaité approuver cette volte-face et ont émis un avis dissident. Ces personnes sont : Gilles Adda, Michel Badré, Sophie Crozier, Annabel Desgrées du Loû, Emmanuel Didier, Sylvie-Anne Goldberg, Marion Muller-Colard et Dominique Quinio. Merci, sincèrement merci à eux.

Et puis il faut remercier tout le CCNE pour la moitié de cet avis n° 139. Ses recommandations sur les soins palliatifs en jachère faute d’une politique volontariste semblent pertinentes et complètes. Les volets formation dans les facultés de médecine, recherche, interdisciplinarité, accompagnement, subsidiarité, évaluation périodique, sensibilisation des personnels concernés et de la population en général, la prévention du suicide sont abordés et il ne semble pas au béotien qui écrit ces lignes qu’il y ait des trous dans la raquette. Et surtout, cet avis insiste sur l’aspect impératif de cet effort demandé en matière de santé publique.

Vu la déliquescence en cours du système de santé publique largement accompagnée par nos ministres intègres et leurs féaux fonctionnaires, il est possible d’émettre un doute raisonnable sur la volonté de l’état de se conformer à cette recommandation.

Mais c’est magique le Macronisme et son abracadabra infaillible, le fameux « Et en même temps ». Malgré ses précautions sémantiques bien présentes pour tenter d’éluder sa responsabilité, la prétendue autorité éthique justifie l’homicide avec un tour de passe-passe. L’assistance au suicide serait acceptable et ce serait inégalitaire de refuser à ceux qui ne peuvent pas pousser le piston de la seringue une mort anticipée. Sacro-sainte égalité, que de bêtise le législateur commet en ton nom ! Bien sûr, les barrières sont érigées par le vertueux CCNE : cadre strict, collégialité, liberté, pérennité de la demande, clause de conscience, etc. Elles tomberont, comme elles l’ont fait en Belgique. Il suffira de décider que la dépression, la trisomie, la pauvreté sont des maladies graves et parfois incurables et létales engendrant des souffrances réfractaires à tout traitement.

Petite question incidente sans doute due à ma curiosité malsaine : pourquoi les intervenants auditionnés par le groupe de travail ne sont pas personnellement identifiés quand ils viennent des Grande Loge Féminine de France, Grande Loge de France et Grand Orient de France ?

Le petit soldat CCNE a bien travaillé, il a ouvert la porte, les progressistes vont s’y engouffrer. Il nous faut tenter de la bloquer. Les jours où l’homme ne sera plus considéré qu’à l’aune de son utilité comme producteur, de sa solvabilité comme client, s’approchent. A nous de préserver le peu de dignité de l’homme qui nous reste, et les lambeaux de civilisation qui vont avec.

(Publié chez Boulevard Voltaire auparavant)

1http://www.ccne-ethique.fr/sites/default/files/2022-09/Avis%20139%20Enjeux%20%C3%A9thiques%20relatifs%20aux%20situations%20de%20fin%20de%20vie%20-%20autonomie%20et%20solidarit%C3%A9.pdf


Lire l'article complet, et les commentaires