Le clivage Gauche-Droite, instrument du pouvoir

par Croa
jeudi 21 avril 2016

Cet article est une réaction à celui de notre ami Robert Gil nous rapportant les propos de Frédéric Lordon en opposition à Podemos sur la réalité du clivage gauche-droite ou sa dénégation.
Les débats sur ce sujet sont fort anciens mais aussi fort pauvres, essentiellement composés d'idées reçues et ce, probablement parce que personne n'a vraiment fait l'effort d'une analyse de son essence et encore moins de son exploitation à des fins de "communication" (de propagande.)
En cette période où des gens passent ensembles d'entières « nuits debout » en palabres de toutes sortes ces sottes considérations persistent.

Nous passerons rapidement sur les racines historiques du clivage gauche-droite et donc sur les fondements archiconnues et surtout reconnues qui ne peuvent pas être éludées. Notons aussi que ces bases historiques concernent les élus et seulement eux. Les éléments à tirer de ces considérations déjà connues ne correspondent en fait qu'a des étiquettes dont l'origine n'est pas très contrôlée, et c'est rien de le dire, comme de tout ce qui concerne les élus et autres auto-proclamées "élites" de la Nation.
- Pour résumer : c'est à l'Assemblée Nationale que ça se passe. Les députés siègent dans un hémicycle suivant un ordre de gauche à droite. Une fois élus, ils se rangent spontanément plus ou moins à gauche ou plus ou moins à droite dans l'hémicycle en fonction d'une étiquette qu'ils se sont attribuée et c'est tout !
Passons rapidement aussi sur ce que sont ces étiquettes supposées, c'est à dire celle d'une "gauche" supposée plus près des pauvres gens et d'une droite avocate des riches : Si cela était vrai et s'il fallait s'en tenir à cette seule et simplicime définition il faudrait mettre tout ce monde, plus ou moins au seul service de la très haute finance, suivant un constat de plus en plus évident, à l'extrême droite ! Tous, ou presque tous, sauf que d'évidence tout à droite il n'y a pas assez de place pour tout ce monde de pantins ! Bon, officiellement, c'est à dire tel que présenté de manière doctrinaire par nos médias, l'extrême droite serait en fait tout autre chose et vous êtes censés savoir quoi. (Comme les chose ne sont jamais simple ça reste un peu vrai que nos députés sont très majoritairement vraiment d'extrême droite.)

  Et le peuple là-dedans me direz-vous ? Justement c'est là que ça se corse !
(Attention : ceux qui n'auraient pas encore intégré qu'un régime représentatif n'est pas démocratique ne comprendront pas la suite du propos et notamment en quoi le clivage est au centre de l'imposture que serait une supposée représentation du peuple par l'assemblée alors qu'en réalité elle ne représente qu'elle même ; Comme ce n'est pas le sujet tant pis pour eux, je ne réexpliquerait pas ça déjà largement développé ailleur, désolé !)

 Les élus prétendent représenter le peuple. Il leur faut donc un peuple dit de gauche, un autre peuple dit de droite et donc diviser le peuple. Cette division doit correspondre au classement qu'ils se sont choisi pour eux à l'assemblée. En plus tout ça tombe bien puisqu'une division du peuple ne peut qu'asseoir le pouvoir réel nullement démocratique (rappel !) tout en ayant l'air de l'être (démocratique.) Dit autrement nos "élites" vont donc se trouver les clientèles qui leur correspondraient. La chance aidant, ils vont donc se trouver d'évidence cette clientèle dans la structure sociale du peuple mais pas seulement puisque sont également connotés ses formes de résistance au pouvoir.

Précisons aussi que le pouvoir n'étant nullement démocratique, la citoyenneté est forcément également une illusion et que,



-  Le pouvoir n'a donc en face de lui que des sujets, (pas des citoyens)

-  Qu'il y a de bons sujets,

-  Et qu'il y a des sujets rebelles. Ce sont ceux-là que la com classera plus ou moins aux "extrêmes" suivant qu'ils sont plus ou moins rebelles. Pour les distinguer appelons seulement "rebelles" la mauvaise clientèle à mettre tout à gauche. Le terme plus adapté de "perdus" sera attribué à l'autre mauvaise clientèle.

Un petit dessin valant mieux qu'un long discours, voilà un peu comment la com habille son peuple de sujets :
( J'ai, bien sûr, reformulé tout ça. On remarquera que les rebelles sont à rechercher tout en bas.)

J'ai logiquement pré-supposé que la rébellion dite "de gauche" est plus consciente de la réalité du pouvoir. Elle est donc plus directe. La rébellion dite de droite s'égarant à la recherche de boucs émissaires il était plus logique de n'y voir que des sujets plus égarés que dangereux pour le pouvoir, au moins pour un temps. Les perdus sont aussi plus faciles à récupérer puisqu'ils ont déjà leur propres leurres (tous sont récupérables en fait.) Au centre les bons sujets, parfaitement soumis, peut-être parce que ceux-là ne souffrent pas d'une sujetion mal vécue et ce, non seulement parce qu'elle n'est pas consciente mais plus spécifiquement parce qu'une bonne place leur est socialement concédé. Le pouvoir a intérêt à ménager, voire à concéder quelques privilèges à ses bons sujets.

Pour Podemos il n'y a ni gauche ni droite mais un bas (99 % des gens) et un haut (le 1 % restant.) En fait c'est pire que ça, d'abord parce que l'oligarchie c'est moins de 1 % (même les patrons, exepté quelques-uns, ont des comptes à rendre à leur banquier, leurs donneurs d'ordres, etc... ). Ensuite parce qu'en réalité le clivage gauche-droite existe bien tout de même mais s'agissant d'un leurre c'est pire que s'il n'existait pas. Le nier reste toutefois une bonne stratégie de défense et, à tout le moins d'essayer de s'en affranchir. Ce fut la stratégie des Verts des débuts de l'écologie. Ce mouvement engagé dans une lutte pour la survie de l'humanité, avait compris dès le début la nécessité d'une union citoyenne pour ce combat. Cela lui aurait peut-être permis de gagner s'il ne s'était pas laissé noyauter puis submerger par des imposteurs proches du pouvoir en place avec en plus la complicité des médias appartenant à ce même pouvoir. Le « ni-ni » qui caractérisait l'écologie politique a sauté en 1993. Cela a stoppé net les progrès des Verts, alors seuls représentants de l'écologie, également porteurs d'une citoyenneté innovante, preuve s'il en est une que le peuple sait au fond reconnaître ses amis même si ce phénomêne ne pouvait être que très progressif donc trop lent pour les écologistes effrayés. Les Verts d'aujourd'hui sont l'exact contraire de ce qu'était ce mouvement à ses débuts. Les mouvement écologiques alternatifs aux Verts n'ont jamais pu émerger : les chiens de garde du pouvoir ont su les maintenir à l'écart !

  Les rebelles, ainsi que je l'ai expliqué ne sont pas, en ce régime, des citoyens mais des mauvais sujets. Cependant ce sont des mauvais sujets justement parce qu'ils aspirent à être citoyens. En toute logique on ne saurait refuser ça à d'autres. C'est pourquoi la première erreur des rebelles consiste à combattre les perdus plus durement encore qu'ils ne s'opposent à l'oligarchie au lieu de rechercher ce qui pourrait être construit ensembles (à méditer !) puisque le clivage n'est qu'un leurre fait pour assoir le pouvoir en place.

 

Pourtant Frédéric Lordon, bla, bla... diront certains ! Sauf que « Le capital » du grand Karl Marx n'est pas un évangile et qu'il serait grand temps que Monsieur Lordon lise autre chose ! 
Le capital (au sens propre ici) est en train de pousser les hommes à détruire la planète qui les fait vivre, ce en épuisant ses ressources et pire encore en la rendant invivable. Le grand Karl n'avait pas prédit ça que je sache !
Je pense que Frédéric Lordon est un grand journaliste. C'est une des rares plumes encore libres à notre époque mais seul il ne peut détenir et donc révéler toutes les vérités. Là, c'est à dire à propos du clivage, justement il se trompe.
Il y a cependant un aboutissement où tout ce petit monde des intellectuels se retrouve. Quand il se dit que nous devons refonder une véritable démocratie et pour se faire « réécrire une Constitution », là est le point sur lequel Frédéric Lordon rejoint Étienne Chouard et d'autres. Ce travail effectué, il sera salutaire que le clivage gauche-droite entre dans l'Histoire des grandes impostures.


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