Le Coran, la religion et l’Argent

par Henri Diacono
lundi 23 avril 2012

La Tunisie dite nouvelle, et par là même la majorité de son peuple, sont en passe de découvrir, avec une certaine stupeur compte tenu de leur foi et des qualités modernistes de ses élites, l’utilisation de certaines sourates du Livre Saint que font sur leur propre territoire des musulmans comme eux.

 Ainsi selon le site local « Kapitalis » en date du 21 avril et sous la signature d’Imed Bahri, il est révélé qu’un important investisseur saoudien a été reçu récemment en audience privée par l’actuel premier ministre du gouvernement provisoire, Hamadi Jebali issu de la mouvance islamique Ennhada actuellement majoritaire dans le pays.

 A cela rien de bien exceptionnel, sinon qu’avec le Qatar, l’Arabie Saoudite, principale alliée moyen-orientale de qui vous savez, courtise abondamment cette petite nation depuis qu’elle a eu le mérite d’enflammer, dans la délivrance d’une dictature, bien des pays arabo-musulmans. Le visiteur en question, Cheikh (qui signifie en arabe grand homme respecté pour son âge et pour ses connaissances scientifiques et religieuses) Mohamed Souleimane Mhisni, ou bien encore Sheikh Mohammed Ibn Sulayman al-Mohaisany, s’est dit, selon « Kapitalis » prêt à consacrer « de gros investissements en Tunisie dans les secteurs de l’agriculture, du tourisme, de l’immobilier et des programmes de logements sociaux. »

 Ce qui l’est moins est que ce vénérable individu est considéré comme un musulman « islamiquement correct »( ?!), c'est-à-dire en harmonie avec la religion, alors que devenu financier de haut vol, avec tout ce que cette fonction comporte d’irréligieux, il est également « un homme qui a amassé une grosse fortune en exerçant le métier, très juteux en Arabie Saoudite, de psalmodieur (dire d’une voix monotone) du Coran. »

 « Agé de de 47 ans , poursuit Kapitalis, Sheikh Mohammed Ibn Sulayman al-Mohaisany est l’un des plus célèbres prédicateurs et psalmodieurs du Coran d’Arabie saoudite. Il est aussi l’imam de la mosquée Al-Qotri à la Mecque. Son œuvre comprend essentiellement des enregistrements de ses récitations et psalmodies du Coran. » Alors qu’i l ne figure nulle part dans le « Livre » qu’un prédicateur ou un imam puisse tirer un profit financier de sa fonction, voilà que de simple commerçant de tissus, il serait devenu ainsi, « … président du conseil d’administration de l’Entreprise Al-Mohaisany pour l’investissement et le développement, un groupe spécialisé dans la construction de tours (à La Mecque et Médine), d’ensembles résidentiels modernes. Mais aussi dans l’élevage, l’agriculture et même le transport maritime ». Pas mal pour le ressortissant d’un pays qui pratique – uniquement pour son peuple bien sûr – l’islam dans son sens le plus radical ! Très surprenant par contre pour le tunisien qui, selon sa foi, a pour habitude de gratifier les psalmodieurs ou imams, souvent appelés pour bénir les demeures, de quelques boissons et friandises, ainsi que d’une poignée de dinars, la monnaie du pays, destinés à l’entretien de la mosquée.

 Reste à savoir si cet homme respectable, « islamiquement correct », aurait l’intention de faire don à la Tunisie des gros investissements évoqués via sa holding, ce qui parait très improbable. A moins d’associer le parti religieux du pays aux éventuels bénéfices de son entreprise. Pourquoi pas, les affaires étant les affaires ?

 Donc, en conclusion, lorsqu’on y regarde de très près, l’Islam ne semble pas différer des deux autres les religions monothéistes, quant au rapport avec l’argent des hommes destinés à enseigner ou propager la foi. Qu’ils soient disciples de Moïse, Jésus ou Mahomet, ils restent avant tout des hommes. Et au sein de chacune d’elles existent aussi les banques, juives, catholique ou islamiques, ces nouveaux temples qui bien souvent pratiquent des taux d’intérêt qui feraient rougir de honte… ou de colère, Dieu lui-même.

  Ô vous qui croyez ! Ne vivez pas de l’usure produisant plusieurs fois le double, craignez Dieu, peut-être serez-vous heureux. » (Coran - Sourate 3 - Verset 130).

 Alors, de grâce, ô vous qui me lisez, abstenez vous de jeter l’anathème sur seulement l’un ou bien l’autre des trois « messages » adressés à la Terre par le même Dieu. A quelques virgules et mots près, ils sont identiques, surtout lorsqu’ils sont pratiqués dans les sphères gouvernantes, par des prédicateurs, ou des bergers si vous préférez, chargés de les diffuser aux peuples. Ceux là ne sont pas des ascètes mais tout simplement des hommes avec le défaut de la cupidité. Et ils le resteront toujours.  


 


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