Le courage, l’intelligence et le génie politique du peuple tunisien

par rakosky
mercredi 19 janvier 2011

Il y a bien décidément quelque chose de justifié dans l'admiration et la sympathie qui se sont emparés des peuples du monde entier à l'égard du peuple tunisien.
 
Ils ont toutes les raisons d'être inquiets, les tyrans et ceux qui les soutiennent, ils ont toutes les raisons de craindre le courage, l'intelligence et le génie politique de la classe ouvrière tunisienne.
 
Partout les maîtres du monde se prétendent les garants de l'ordre contre le chaos et l'anarchie.
 
23 ans de malheur, de terreur, de pillage, avec la bénédiction du FMI et de l'Union européenne, et pour finir cette fuite honteuse comme un voleur, comme un bandit, cette fois-ci le soutien d'Obama et de Sarkozy n'a pas suffi.
 
Il faut voir le courage avec lequel ont été mené les manifestations, la manière dont partout les travailleurs se sont ressaisis de l'UGTT, lui ont restitué toute sa place dans les manifestations et les appels à la gréve générale.
 
Il faut voir comment la foule des manifestants s'est portée partout au contact des militaires, les enveloppant littéralement, obtenant leur ralliement par des embrassades et des discussions passionnées, c'est le début classique de toute révolution, parce que c'est bien d'une révolution dont il est question ici.
 
De manière spontanée et encore une fois à l'appel de l'UGTT des comités de quartier se sont constitués pour défendre la population contre les exactions des bandes armées de Ben Ali, désarmant ses partisans avec souvent la traque et une vengeance terrible contre ceux qui ont terrorisé le pays pendant tant d'années.
 
Cela s'est passé ainsi au Portugal avec la traque des agents de la PIDE, cela s'est passé ainsi en Roumanie, les peuples veulent détruire tout l'ancien appareil de répression, exigent la dissolution du RCD et incendient ses locaux et veulent aujourd'hui chasser ses ministres du nouveau gouvernement.
 
Dans ces conditions, il faut apprécier comme une rupture majeure la décision de l'UGTT de refuser de reconnaître le nouveau gouvernement, d'en retirer ses ministres, mais aussi de se retirer du Parlement, de la Chambres des Conseillers et du Conseil économique et social.
 
Cette décision, combinée avec la poursuite des manifestations dans tout le pays, marque un tournant majeur dans la toute jeune histoire de la révolution tunisienne.
 
La question ne se réduit pas au nombre de ministre, c'est la question de l'état et de la démocratie qui est directement posée.
 
Comment accepter que les mêmes hommes continuent à gouverner le pays, comment accepter que ce soit encore la police de Ben Ali qui continue à réprimer et disperser les manifestations, que les membres du RCD continuent à occuper tous les postes clés de l'appareil de l'état, à diriger toutes les entreprises publiques privatisées et mises au pillage par les partisans de Ben Ali.
 
C'est l'état lui même qui a été gangrené par le RCD, jusqu'à se confondre avec lui et c'est bien là tout le problème et tout ce qui terrorise ceux qui ont soutenu Ben Ali pendant des années.
 
Les questions sont complexes et il y a tant à faire pour reconstruire un pays sur la base du respect de la dignité humaine, mais que l'on laisse le peuple tunisien décider lui même.
 
Que l'on respecte ce peuple, il a une longue et belle histoire, des élites politiques et culturelles et un peuple qui n'aspire qu'au travail et à la paix.
 
Il faut faire confiance au peuple, à sa conscience, l'appeler à élire une Assemblée Constituante souveraine, avec un gouvernement responsable devant elle.
 
Il faut laisser les partis politiques vivre et s'exprimer, que chacun, responsables et militants, puisse s'exprimer et débattre librement.
 
Il faut que dans la Tunisie nouvelle les travailleurs disposent enfin de leur représentation politique, que soit discutée dans l'UGTT la possibilité de présenter des candidats aux différentes élections, que soit discutée de la constitution d'un parti ouvrier indépendant.
 
Quels que soient les développements à venir et ils seront nombreux et rapides, les travailleurs et la jeunesse de Tunisie doivent regarder avec attention vers la Côte d'Ivoire, l'Irak, l'Afghanistan, la Somalie, l'ex Yougoslavie, partout où les grandes puissances ont pris en mains « la transition démocratique », partout le sang a coulé », les nations ont été disloquées, les peuples livrés à des chefs de bandes et à des trafiquants, la souveraineté est un bien nouveau et précieux et que certains veulent déjà contester, que tous ces gens restent chez eux et laissent tranquille la Tunisie en attendant un avion qui viendra peut-être un jour les chercher eux aussi, après tout on ne sait jamais, les peuples sont si imprévisibles.

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