Le crash de la France Insoumise

par Elliot
mardi 28 mai 2019

L’insoumission des gilets jaunes, c’est-à-dire le refus des règles, n’est pas allée où l’on pouvait espérer qu’elle allât où l’on pouvait même espérer qu’elle pût trouver des cieux favorables à son émancipation.
Malgré une campagne en tous points remarquable avec autant d’assemblées populaires réussies, malgré la force de conviction de Manon Aubry et le talent oratoire de Jean-Luc Mélenchon, la liste de la France Insoumise s’est effondrée à un étiage que l’on peut qualifier de dérisoire ( du moins si on le compare aux espoirs légitimes du Mouvement )

 

LFI se retrouve au même niveau que les débris du PS et consorts, ce qui est en soi un désaveu dont il appartiendra aux dirigeants d’analyser les causes.

 

Que la liste des « Républicains » fassent un résultat à peine supérieur n’est pas une consolation pour la Gauche et ce n’est que la confirmation de la grande crise existentielle du gaullisme qui devra bien se résigner à tourner la page plus d’un demi-siècle après la disparition du grand homme : on ne peut pas indéfiniment faire parler les morts et tordre leur message à des fins indignes.

Pour tous ceux dont je suis qui ont mis leurs plus grandes espérances dans la tentative mélenchonienne de réussir son OPA sur la Gauche, la désillusion est d’autant plus amère que non seulement l’échec est total mais encore que cette Gauche semble maintenant devenue mythique tant elle répond peu aux sollicitations de ceux qui prétendent parler en son nom.

Quoique l’on en ait, une page se tourne : la Gauche qu’on a connue n’est temporairement plus l’avenir de la nation, elle est tout juste devenue une force de témoignage dont les analyses seront, il faut s’y attendre, de moins en moins reprises par une presse normalisée autour de l’oligarchie financière.


A tous ceux qui disaient que la lutte des classes n’existe plus le magnat américain Warren Buffett apportait, il y a quelque temps, un démenti : « Non seulement la lutte des classes existe bien mais c’est notre classe est en train de la gagner »

Il n’en reste pas moins que le programme « l’Avenir en commun » existe, qu’il est cohérent, inventif et offre des perspectives de changement dont on attendra des cieux plus cléments pour en mesurer les effets.

Comme l’Italie qui s’est donnée aux mains d’un aventurier qui souille par ses comportements la croix qu’il porte systématiquement à ses lèvres en conclusion de ses diatribes, la France a choisi de s’offrir à deux maux dont on ne sait finalement lequel est le plus calamiteux entre ceux qui veulent le repli sur soi et ses petites misères dont ils espèrent qu’elles seront moins grandes si elles ne sont plus partagées et ceux qui veulent jeter les fondements d’un grand n’importe quoi mercantile qui uniformisera les comportements de consommateurs appelés à s’empiffrer de malbouffe produite en dehors des normes du bon goût ( pour autant qu’on les dotent des moyens suffisants pour y avoir accès )

Devant un tel désaveu électoral la France Insoumise doit se remettre en question y compris dans le chef de son leader qui est, qu’on le déplore ou non, affaibli grandement et qui serait clivant selon l’expression consacrée médiatiquement ( mais peut-être pas encore par l’Académie )

Il serait un peu trop facile de pointer la responsabilité des médias ( qui existe ) dans ce naufrage mais c’est un fait que la répétition des sondages tous plus défavorables les uns que les autres n’a certainement pas motivé un électorat démobilisé.

Il serait aussi profondément injuste de rejeter la faute sur la personne emblématique de Mélenchon qui est tout de même celui a permis à cette grande espérance de germer, de mûrir pour enfin se lever au premier tour des Présidentielles de 2017.

Les tracasseries policières avec une débauche d’effectifs digne d’une perquisition dans un foyer terroriste ou chez un gros manitou du grand banditisme avec le renfort de la presse conviée à l’hallali ont desservi Mélenchon trahi par ses nerfs au point de proférer des paroles qui ne pouvaient qu’être mal comprises, lui qui sait pourtant si bien manier la belle langue.

Bref, après des débuts tonitruants à l’Assemblée Nationale où la France Insoumise a su représenter la seule opposition véritable, les perquisitions ont finalement occulté son message et si l’on ne peut avec certitude dire que c’était le but recherché, c’est en tout cas le résultat pratique.
Mélenchon n’a plus été vu avec les mêmes yeux par cette partie de l’opinion publique qui lui avait été favorable.

On laissera à leurs vaticinations oiseuses ceux qui se sont retirés de l’aventure des Insoumis sous des prétextes fallacieux ( on a vu ce que cela a rapporté aux Républicains de traquer le suffrage sur les terres de l’ancien Front National et d’agiter les thèmes les plus rances, il s’est encore une fois vérifié que l’électeur préfère l’original à la copie ), la plupart ont eu la délicatesse de ne pas se laisser séduire par les sirènes du Rassemblement National contrairement au dernier démissionnaire, infiltré de longue date au sein du mouvement progressiste, y défendant l’antithèse des thèses développées par le « lepénisme » avant de trouver sa consécration devant les médias ébaubis en jouant les transfuges. Qu’il ait poussé le cynisme ou l’inconscience jusqu’à figurer comme trophée de chasse à la tribune de ceux qu’il agonisait quelques jours auparavant, apporte un témoignage douloureux de l’extrême volatilité de ses convictions, ce qui ne devrait pas rassurer ses nouveaux amis : la trahison est dans ses gènes.

Pour la Gauche tout est à recommencer sur un champ de ruines et plus que probablement avec d’autres leaders : le problème est que l’on ne voit guère actuellement ce qui pourrait rapprocher un Glücksmann ou un Faure d’un Insoumis. Benoît Hamon dit vouloir se consacrer à un autre destin et le parti communiste est en miettes.

On voit mal qui et sur quelles bases pourrait aujourd’hui sans être accusé d’arrière-pensée carriériste appeler à de pourtant bien nécessaires assises de la Gauche.

PS.

En Belgique par un engagement social effectif sur le terrain notamment par le biais de son réseau de maisons médicales et un travail parlementaire parfaitement mis en scène et popularisé sur les réseaux sociaux la formation d’Extrême-gauche PTB et son équivalent flamand PVDA sauvent l’honneur de la Gauche européenne en remportant une magnifique victoire : ils accroissent leur représentation nationale et ils sont avec les écolos et malheureusement l’Extrême-droite raciste flamande les grands vainqueurs des élections nationales et régionales.

Je m’en serais voulu de ne pas signaler un rayon de soleil sur les décombres de la Gauche


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