Le Dieu d’Hervé
par alinea
samedi 29 décembre 2012
Le Dieu d'Hervé
Je voudrais vous soumettre ce texte d'Hervé ; il est une tentative comme sans doute chacun devrait pouvoir le faire ; il est critiquable mais suscite la réflexion ; il est partiel mais ne se veut que proposition ; une quête de soi, une quête de morale, un désir de perfectionnement, il est courageux et louable parce qu'il s'expose mais n'impose pas, ne se donne l'illusion ni des « Lettres » ni du Savoir. Il vous interpellera.
Il était une fois, un enfant à qui les parents avaient livré l'Univers tout entier comme expression de son être et comme terrain de jeux. Ils lui avaient légué toute l'énergie de l'Univers de façon qu il n'eut jamais froid, jamais faim et jamais peur. Du moins ils le pensaient.
Ainsi cet être était- il omniscient, omniprésent et omnipotent dans tout l'Univers. A vrai dire, son corps était l'énergie éthérée de l'Univers lui même.
Ses parents lui avaient tout donné d'eux mêmes, mais avant de mourir ils lui avaient fait deux recommandations. Comme tout bons parents qui se respectent doit le faire.
1 Sans cesse tu créeras
2 Jamais tu ne te retourneras sur tes créations
Et Dieu, car c'est bien de Lui qu'il s'agit, commença à vivre. La vie qui est de donner sens à l'existant, de créer sans jamais s'arrêter.
Plus Dieu créait, plus Il s'émerveillait et jouissait de ses créations, qui étaient toutes une partie de son ego. Plus Dieu créait et plus Il s'éveillait à sa propre conscience. Ainsi vécu Dieu durant une éternité qui pour nous est incommensurable.
Lorsque vint le jour où Dieu s'arrêta de créer car il n'en voyait plus une qu'Il n'avait faites. Qu' Il pensa sa création achevée. Alors Il considéra que le temps était venu pour Lui de s'affranchir des recommandations de ses parents et se retourna pour contempler toute ses créations, son corps éthéré ainsi matérialisé.
A cet instant précis, Dieu vit ce que ses parents ne voulaient pas qu'Il prit conscience durant sa vie créatrice. Qu' Il s'interrogea sur sa solitude, sur le sens de sa création.
Quand Dieu vit cela, Il se rendit compte qu'Il venait d'atteindre ce qui Lui manquait de connaître et qui était aussi son ultime création, Lui même. L'accomplissement total de Lui même s'achevait par l'omniconscience. Mais de la conscience de Lui même apparaissait l'absence de l autre. la solitude infinie de soi même.
Commença alors pour Dieu le sentiment d'une grande, très grande solitude. Une solitude incommensurable, absolu où le sens de toute sa création se perdait et sombrait inexorablement dans le Néant. L'antre de son père. Dieu tomba dans une grande dépression. Voulait retourner dans le ventre utérin de sa mère.
Dieu parcourait tous les recoins de son corps à la recherche d'une seule création qui fût animée d'une volonté propre, unique, indépendante de Lui même. Qui fut animée de son libre arbitre pour pouvoir converser avec elle. Bref, une création dont Il ne connaîtrait pas à l'avance son intention, sa vérité intime. Qui ne Lui obéirait pas. A qui Il pourrait partager, montrer toute la beauté de sa création et écouter ses remarques, ses désapprobations et ses « roucoulements admiratifs » (tiré de « plume d'ange » de Nougaro). Être Un parmi Autres.
Mais tout, absolument tout dans l' Univers était de Lui, par Lui, pour Lui, en Lui. Tout était Lui.
Ainsi Dieu connut la faim, le froid et la peur.
Quand Dieu eut parcouru tout son être sans trouver âme qui vive, il comprit alors que sa vie prenait fin. Qu'il était temps pour Lui de retourner dans le Néant, de prendre place au coté de son père. Il était temps pour Dieu de mourir pour rester fidèle à la volonté créatrice de sa mère la Vie. Donner sens à son existence passée par la poursuite d'une nouvelle existence, avec un nouveau sens. Mais dans lequel, Lui, n'avait pas sa place. Dans lequel la condition pour qu'il y ait la vie, était sa propre mort.
Alors Dieu ordonna à tout son corps qu'étaient toutes ses créations, de garder souvenir de son essence, comme il l'avait gardé de ses parents. Et quand cela fut fait, Dieu fusionna tout son être et se réduisit en poussière car Dieu était omnipotent.
Tout son être ainsi réduit en poussière, jaillit dans un nouvel Univers animé d'un nouveau sens de la Vie. Un nouveau paradigme existentiel venait de naître, animée de la volonté de Dieu, de sa vérité mais plus de sa réalité. Car Il était bien mort.
Ce paradigme nouveau s'écrit ainsi :
« tu aimeras ton prochain comme toi même car c'est de sa présence et de sa différence que tu trouveras le sens de ta propre existence. »
"Chéri la diversité et la différence comme tes biens les plus précieux. La richesse véritable. Plus tu croiras posséder autrui et des choses, plus tu seras pauvre parce que tu n auras en diversité et différences des êtres et des choses que l écume de leur valeur.
Depuis lors, Dieu continue d'exister en vérité, car la vérité est dans l'intention de l'être, mais est (Dieu !) mort en réalité, car c'est la forme des êtres et des choses.
Aussi Dieu n'apparaît Il jamais à nos yeux, mais sa présence se manifeste à travers l'être. A toute personne qui le recherche en vérité et non en réalité.
Aussi Dieu n'intervient jamais de Lui même mais uniquement par l'entremise de la transcendance humaine. Car il est bien mort en réalité.
Aussi aucun livre sacré n'est la parole directe de Dieu ni est parfaite. Car tous dépendent de l'interférence entre la forme humaine et l'essence de Dieu contenue en toute chose.
Aussi Dieu ne se préoccupa-t-il pas du bien et du mal, car donner sens est sa seule volonté vraie, comme celle de sa mère la Vie. Pour qui aimer son prochain comme soi même est le sens donné à notre Univers légué par Lui. Car d'aimer les êtres et les choses vient la profusion de la vie dans toutes ses différences et diversités.
Aussi ne faut il pas s'attacher aux êtres et aux choses, mais seulement à soi même. Car c'est le véritable secret de l'amour et de sa propre libération. La seule qui permet la rencontre, l'attention et l'intention toujours renouvelée. Qui permet l'acceptation de l'autre sans ressentiment ni servitude aucune.
Ainsi, Il était une fois Dieu.