Le discours de Nasrallah réveille la hantise de la guerre civile libanaise

par Dr. salem alketbi
mardi 5 novembre 2019

En septembre dernier, le dirigeant du Hezbollah Hassan Nasrallah s’est vanter de sa loyauté envers le dirigeant suprême de l’Iran, Ali Khamenei, comme «  notre chef et maître.  »

Il a annoncé qu’il était prêt à mettre en œuvre ce qu’il exige de lui au Liban et à l’étranger. Il a reconnu que ce sont les mollahs iraniens qui lui ont fourni de l’argent et des armes.

Sur fond de manifestations en cours au Liban, il est revenu hier pour mettre en garde contre une guerre civile en cas de «  vide politique,  » menaçant les manifestants s’ils insistaient sur leurs revendications.

En appelant les manifestants à rentrer chez eux, Nasrallah les accuse d’obtenir des financements extérieurs et d’être infiltrés par certaines ambassades à l’étranger.

Un mois sépare la reconnaissance par Nasrallah de l’emploi d’un pays étranger de son accusation selon laquelle des millions de manifestants libanais reçoivent des fonds étrangers.

Il y a une grande différence entre les déclarations formelles et expresses et une accusation qui ne suscitent que le dégoût.

Se tenant comme un prédicateur, Nasrallah a accusé des millions de ses concitoyens d’être employés et de recevoir de l’argent étranger. Il n’a pas honte d’avoir déjà reconnu de façon flagrante qu’il est l’agent d’un pays qui traite le Liban et d’autres pays arabes tel un occupant et se vante d’occuper leurs capitales.

Une fois de plus, la milice du Hezbollah s’avère dangereuse pour le Liban. Elle fait revivre le théâtre de l’occupation de Beyrouth en 2008, et en 2018 lors de la célébration de la victoire aux élections libanaises, de la démonstration de la force et de l’invasion de Beyrouth.

Dans son discours, Nasrallah a alors rappelé aux Libanais la responsabilité de son parti pour la sécurité extérieure et intérieure du Liban, niant l’existence d’une armée et de forces de sécurité chargées de maintenir la sécurité, la stabilité et l’ordre.

Ce discours représente une situation récurrente dans notre région arabe.

La milice saute sur l’État national, enlève ses capacités et déclare le contrôle de l’État, tout comme a fait al-Houthi, l’allié de l’Iran au Yémen. Aujourd’hui, un autre allié iranien menace de reproduire le scénario Houthi au Liban.

La différence entre les deux cas est que Nasrallah professe être le mandataire loyal et subordonné des mollahs d’Iran, alors qu’al-Houthi le nie, même si les faits suggèrent que l’un est pire que l’autre en trahison, violation des frontières nationales et destruction des patries.

Dépassant le sectarisme, les Libanais ont participé à ces manifestations dans toutes les régions du Liban. Seul le drapeau libanais a été hissé. C’est peut-être leur plus grand crime aux yeux de Nasrallah, qui ne reconnaît que le drapeau de sa faction et son leadership à Téhéran.

Dans les rues, les Libanais se sont mobilisés contre la corruption et l’échec politique et administratif. C’est pas des promesses formelles de réforme qu’ils veulent, mais de vraies réformes. Ils veulent un système de gouvernement qui place le Liban au premier rang de ses priorités et qui ne fonctionne pas pour l’Iran et ses gardes révolutionnaires.

La prise de décision libanaise ne peut demeurer prisonnière de la volonté de l’Iran et un instrument dans sa main. Les milices pro-mullah qui reçoivent des ordres et des instructions du général Qassem Suleiman, menaçant l’une ou l’autre partie dans la poursuite de son plan stratégique expansionniste sectaire, ne devraient plus avoir de terreau fertile dans le Liban.

Dans son discours, Nasrallah n’a pas défendu la stabilité du Liban, comme il le prétend. Il est intervenu en faveur de son parti qui est confronté à une menace existentielle.

Les pratiques des éléments du parti sont susceptibles d’entraîner le Liban dans des guerres de rue. Elles visent à effrayer les Libanais et à les pousser à disperser les manifestations, reproduisant les pratiques des milices des Gardiens de la révolution dans les rues et les villes d’Iran dans des manifestations contre la mollahcratie qui ont été réduites au silence.

Nasrallah, qui fait allusion à ce scénario, a oublié qu’un grand pourcentage de ceux qui se sont opposés à la corruption sont des adhérents de son parti. Mais ce sont des Libanais qui ont été exploités par le parti dans son petit jeu politique.

Nasrallah dit que le Liban est devenu une cible régionale et internationale. Lui-même ne s’est pas posé la question  : Qui a mis le Liban dans ce cercle infernal  ? N’est-ce pas le Hezbollah, en étant loyal non pas à la nation mais au Guide suprême, responsable de l’entrée du Liban dans le spirale de la polarisation ? Nasrallah a-t-il non seulement commis une trahison, mais est-il même allé jusqu’à s’en vanter publiquement  ?

Le Liban souffre d’une crise structurelle de gouvernance et de gestion. Elle ne pourra être résolue qu’en démantelant ses causes et ses facteurs enracinés dans la structure politique et constitutionnelle libanaise.

Aujourd’hui, le peuple libanais a pris la rue en quête de son avenir, alors que Nasrallah essaie de se placer au-dessus de la volonté des Libanais, de la dompter et de la gèrer de sa propre manière, comme ses maîtres, dit-il, le font en Iran.

Dans ce contexte d’escalade imprudente, le Liban est au bord d’une crise majeure. Si Nasrallah et les partisans des mollahs ne respectent pas la volonté du peuple libanais, les choses risquent de déraper et le beau Liban, Dieu nous en préserve, pourrait devenir un champ de bataille qui finira toujours Dieu seul sait où et quand.

 


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