Le libéralisme ! Une idée nouvelle ?

par Pierre
jeudi 30 janvier 2020

Depuis la fin du XXe siècle, nous vivons le début d'une nouvelle révolution qui imperceptiblement bouleverse petit à petit notre société. Que ce soit du point de vue matériel ou sociétal, l'impact sur notre mode de vie est conséquent et n'est perceptible que si on la compare sur une ou plusieurs décennies.

Cette révolution se développe suite à la lente émergence d'un capitalisme financier conquérant, essentiellement anglo-saxon, qui s'appuie sur la doctrine libérale globalisée pour étendre sa domination sur la planète entière mais il se heurte à une résistance qui se traduit par des formes de protectionnismes que certains puissants États mettent en place pour protéger leurs intérêts nationaux.

Il est difficile de faire de la prospective, il y a trop de paramètres mouvants, mais nous pouvons quand-même faire un état des lieux et esquisser des pistes pour l'avenir..

 

                         Art urbain. La liberté guidant le peuple.

 

Rappel historique

 

Rappelons d'abord le principe d'origine du capitalisme avant d'évoquer son évolution.

Il a commencé à devenir important à Venise, une des puissances maritimes majeures, à partir de la fin du XIVe siècle et il s'est petit-à-petit étendu à d'autres puissances maritimes italiennes comme par exemple Gênes et ensuite à l'Europe du Nord : Amsterdam, Anvers, les villes de la Ligue hanséatique, l'Angleterre...

L'idée au départ était que plusieurs riches bourgeois rassemblent des fonds et s'associent pour monter des expéditions commerciales [i] trop coûteuses et parfois trop risquées pour être financée par un seul investisseur. Une fois le projet défini et le capital réuni, on confie sa réalisation à un responsable qui se chargera de l'acquisition ou de la construction des bateaux, de recruter les équipages, d'acheter des marchandises etc. sous la supervision des associés qu'on appelle dans ce cadre les actionnaires.

L'expédition terminée, toutes les marchandises vendues et les créances payées, les actionnaires se partagent l'argent restant qu'on appelle : les bénéfices. L'investissement de départ, des bateaux dans ce cas-ci, restant disponible, il suffit de monter une nouvelle expédition suivant le même principe avec une partie des bénéfices et c'est ainsi que des sociétés capitalistes prospérèrent. Je n'entre pas ici dans les détails spécifiques que le capitalisme engendre comme les actes bancaires, le monopole, les responsabilités ou la faillite.

D'un point de vue commercial et en faisant abstraction de l'exploitation humaine, il n'y a pas d'objection morale dans le principe capitaliste vu sous son angle originel.

 

L'étape suivante fut la libéralisation et l'émancipation de la tutelle de la noblesse, propriétaire terrienne tirant sa richesse de l'exploitation agricole et détenant tous les pouvoirs.

Le commerce permit à la bourgeoisie de s'enrichir et de souvent devenir plus riche que la noblesse. Ils réclamèrent un partage du pouvoir dans les villes ainsi que des avantages particuliers dit aussi des « privilèges » les protégeant contre les abus de l'autorité royale ou seigneuriale.

 

D'abord certaines cités-États et ensuite certains pays s'organisèrent en républiques indépendantes dirigées par l'aristocratie marchande : Venise, Gênes, les Pays-Bas... ou imposèrent une monarchie parlementaire (Angleterre) mais les grandes monarchies héréditaires conservèrent le pouvoir absolu du souverain et des formes de monopole de l’État : France, Espagne, Autriche...

 

Un grand bouleversement vit le jour en Grande-Bretagne à partir de la fin du XVIIIe siècle. Il s'agit de la première révolution industrielle et de l'invention de la machine à vapeur. Il ne s'agissait plus de réunir des fonds pour monter des expéditions maritimes mais à présent c'était pour construire des usines.

 

                             La première révolution industrielle.

 

Le capitalisme pris une plus grande dimension qui s'accentua encore un siècle plus tard avec la deuxième révolution industrielle et l’avènement du moteur à explosion et de la production d'électricité à grande échelle. Ces révolutions industrielles étaient accompagnées d'une explosion démographique qui mit une énorme masse de main-d’œuvre sur le marché.

 

Le système législatif britannique reposait depuis longtemps sur le bicamérisme : le pouvoir revenait à la Chambre des Lords qui représentait les intérêts conservateurs de la noblesse et à la Chambre des Communes qui représentait les intérêts de la bourgeoisie. Le roi étant écarté du droit de légiférer. (Bill of Rights.)

 

Le libéralisme classique.

 

Dès sa création, le capitalisme commercial des cités maritimes avait par nature une envergure internationale. Le capitalisme industriel a eu le même besoin par nécessité, d'abord pour s'approvisionner en matières premières [ii] et ensuite pour écouler une partie de ses produits finis. [iii]

Devait-on laisser le parlement décider de la direction que doit prendre le développement économique du pays ou fallait-il laisser le capitalisme se développer librement ? Telle était la question qui se posait en Grande-Bretagne en cette fin du XVIIIe siècle.

Vu que la première révolution industrielle naquit en Grande-Bretagne, il n'est pas étonnant que c'est dans ce pays que les réflexions sur les règles permettant au capitalisme de se développer à l'abri des abus du pouvoir foisonnèrent.

C'est donc dans la bouillante Grande-Bretagne du XVIIIe siècle que la philosophie libérale vit le jour.

Adam Smith en publiant en 1776 son œuvre principale, « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations  » peut être considérée comme le père fondateur de la philosophie libérale classique.

  1. Défense de la propriété privée.

  2. Économie de marché sans entrave.

  3. Fin des monopoles étatiques.

  4. État de droit.

  5. Libre échange international.

 

Voila les principes de base du libéralisme énoncés par Adam Smith.

Ils seront ensuite développés ou contestés par les générations suivantes de penseurs libéraux et ils favoriseront le capitalisme libéral classique au détriment d'autres systèmes économiques comme le libéralisme social (Intervention de l’État dans l'économie, État providence et partage du gâteau), le capitalisme d’État, l'économie planifiée, l'économie socialiste (de l'autogestion au marxisme) etc.

Associés aux conservateurs beaucoup plus militaristes, le capitalisme libéral fit du Royaume-Uni la première puissance économique, maritime et militaire du monde au XIXe siècle.

 

Comme nous le verrons plus loin, les notions d'égalité et de justice sociale sont absentes parce qu'elles ne sont pas compatibles avec le libéralisme classique.

 

Le libéralisme contemporain.

 

Le libéralisme classique a prospéré durant le XIXe siècle et au début du XXe jusqu'à la crise de 1929. Un libéralisme d'inspiration keynésienne plus interventionniste dans l'économie a ensuite petit à petit émergé surtout après la Deuxième Guerre mondiale. (Les Trente Glorieuses.)

La concurrence idéologique avec le marxisme et l'apparition du suffrage universel avaient mis le libéralisme classique entre parenthèses jusqu'à l'effondrement du système de Bretton Woods, du choc pétrolier de 1973 et de l'apparition d'une inflation galopante.

Des économistes anglo-américains éminents ont alors proposé de revenir aux fondamentaux du libéralisme classique pour le débarrasser de ses scories socialistes. Ils furent inspirés par Friedrich Hayek et son essai sur la liberté individuelle et l'économie de marché.

« La route de la servitude » publié en 1944 a été et reste encore toujours la bible de la pensée néolibérale.

Ce courant fut appelé néolibéralisme. [iv]

Le Chili après le coup d’État de Pinochet de 1973 a servi de premier modèle à l'expérience néolibérale. Le Royaume-Uni de Margaret Thatcher suivra à partir de 1979 et ensuite les États-Unis à partir de 1980. La nouvelle politique économique des États-Unis, ce qu'on a appelé les Reaganomics, [v] a été largement inspirée par les travaux de l'économiste américain Milton Friedman et son école de pensée.

La chute du mur de Berlin en 1989 fera croire pendant un certain temps que le néolibéralisme est le vainqueur idéologique d'une troisième guerre mondiale et il se sentit en droit de s'étendre à toute la planète.

Le centre décisionnel du monde capitaliste était passé outre-Atlantique depuis 1945. Comme pour le Royaume-Uni du XIXe siècle, le néolibéralisme pouvait s'appuyer sur une force militaire à laquelle rien ni personne ne semblait pouvoir s'opposer.

Normalement, le 9/11 aurait dû avoir le même effet qu'une piqûre de moustique sur un éléphant mais elle en fit un animal enragé incapable de prendre des décisions rationnelles. En engageant des guerres ruineuses, les États-Unis ont dû s'endetter à un point démesuré [vi] dont les conséquences sont encore imprévisibles aujourd'hui.

L'estocade fut portée en 2008 par une crise bancaire sans précédent dans l'histoire du capitalisme qui ébranla toute la planète financière. Bien peu avaient pressenti l'ampleur de la crise à venir.

Qu'une bulle immobilière éclate et qu'elle provoque une crise cyclique était prévisible. Qu'elle soit d'une ampleur telle que tout le système bancaire mondial en soit ébranlé n'était pas prévu et le système n'y était pas préparé.

On étudiera encore longtemps les causes (la titrisation) de cette crise déclenchée par ce que l'histoire retiendra comme la « crise des subprimes ».

Suivant la doctrine néolibérale qui rejette toute intervention de l’État dans l'économie, le secteur bancaire devait s'effondrer en 2008-2009. Les placements de fonds dans des produits à risques devaient être sortis des bilans et perdus ou dévalorisé pour leurs détenteurs.

Quand des banques centrales, en principe indépendantes mais dont les dirigeants sont nommés par le pouvoir politique, créent ex nihilo des milliers de milliards de dollars et d'euros pour les prêter aux banques privées en prenant leurs actifs toxiques (à leurs valeurs de bilan) [vii] en garantie, c'est contraire aux règles de base du néolibéralisme.

C'est suffisamment important pour être répété autrement : la solution politique à la crise de 2008 a été une rupture avec les règles du néolibéralisme.

Cette crise a marqué la fin des capacités autorégulatrices de ce système.

Les interventions des États dont il est question n'ont aucunement remis en cause le système néolibéral en lui-même. Il s'est agit de le refinancer pour lui permettre de survivre à sa crise structurelle en faisant porter le poids des pertes sur les États à un niveau déraisonnable et en les privant ainsi de toute marge pour une relance de l'économie de type keynésien.

 

La financiarisation de l'économie dans un monde globalisé.

 

Comment le capitalisme financier a-t-il supplanté le capitalisme industriel et quels en sont les conséquences ?

La question peut sembler sans intérêt à un profane pour qui un capitalisme reste un capitalisme.

Pour répondre à cette question, il faut d'abord revenir à Adam Smith qui avait déjà esquissé le principe des échanges internationaux sur base de spécialisation.

« Si un pays peut fabriquer moins cher un produit, il est préférable de le lui acheter en lui vendant nos produits excédentaires plutôt que de le produire nous-même. »

 

Après la fin du communisme, les tenants du néolibéralisme imaginèrent une version globalisée de ce principe avec une répartition planétaire des producteurs.

 

 

La libre circulation des capitaux et le dollar américain comme monnaie de référence pour les échanges faciliteront le commerce international.

 

L'OMC et le FMI furent les maîtres d’œuvre de cette politique qui provoqua localement des catastrophes économiques et sociales et qui ruina des pays à cause de la monoproduction achetée à bas prix par les multinationales.

Excepté pour l'Allemagne, il y avait de moins en moins de projets industriels à financer en Occident.

Le système bancaire relança alors des fonds de placement pour les investisseurs. Ces fonds inventèrent de nouveaux produits et entrèrent dans le capital des entreprises non pour développer des projets économiques mais juste pour obtenir le plus haut taux de rendement.

A quelques exceptions près, les grands capitaines d'industrie, ces visionnaires qui avaient marqué le XIXe siècle et avaient transmis leurs entreprises à leurs descendants, cédèrent leur place à des managers chargés de rémunérer davantage le capital.

Il n'est pas compliqué de comprendre que si plus de bénéfices vont aux actionnaires, c'est entre autres grâce à la diminution des coûts [viii] et comme les salaires sont aussi des coûts, les entreprises les réduisirent autant que possible en diminuant le personnel, en augmentant la productivité, en automatisant le travail, en limitant les augmentations salariales et en délocalisant leurs usines dans des pays à bas coûts salariaux.

Parfois même quand la valeur foncière des bâtiments est élevée, on les vend à des groupes immobiliers pour avoir plus de bénéfices à distribuer. Ces groupes leur louent ensuite les mêmes bâtiments ou réalisent les actifs immobiliers si les entreprises disparaissent.

Les conséquences de cette financiarisation de l'économie sont l'endettement des États pour subvenir aux besoins sociaux, l'endettement des entreprises, la plupart ayant moins de fonds propres vu que plus de bénéfices partent en dividendes et l'appauvrissement des classes moyennes et leur endettement encouragé par le pouvoir politique pour maintenir la croissance par la consommation et éviter la récession.

Excepté en France pour le moment, la plupart des pays à économie capitaliste ont encouragé la retraite par capitalisation. Les fonds de pension gérant des montants énormes les investissent dans l'économie (et dans les dettes souveraines) et exigent en retour des rentabilités élevées pour satisfaire les besoins des retraités.

Imperceptiblement, l'Occident est passé d'une économie productive à une économie financière plus avide de bénéfices à court terme que de projets industriels seulement rentables à long terme.

A cela s'ajoute encore les fonds spéculatifs dont les hedge funds qui n'apportent rien à l'économie. Ces derniers jouent sur l'achat et la vente d'actions, sur les variations de change des devises et sur des placements risqués pour engranger rapidement d'énormes bénéfices qui ne reviennent jamais dans l'économie réelle.

Cela provoque des bulles financières où la valeur des biens n'a plus rien à voir avec leur valeur comptable. Cela peut concerner le marché de l'immobilier, le marché de l'art ou un secteur économique particulier coté en bourse.

 

La réponse à la question posée au départ concernant les conséquences du passage de l'économie industrielle à une économie financière en Occident sont les suivantes.

 

 

La consommation, moteur de l'économie, est maintenant portée par les dettes souveraines et privées et favorisée par des taux d'intérêts bas, voire négatif pour certains États.

C'est une situation inédite dans l'histoire de la finance et personne n'est capable d'en prédire les conséquences à moyen terme.

 

 

                            La Banque centrale européenne.

 

Tous les économistes cependant s'accordent pour dire que la situation actuelle est anormale et que les conséquences sont imprévisibles.

Aucun ne propose une piste pour sortir sans dégât de l'impasse. Il n'est même pas sûr qu'une hypothétique croissance économique soit la solution.

Je n'ai pas de solution à proposer mais à mon avis, il va falloir à un certain moment s'émanciper du dogme néolibéral.

De toute façons, les dés sont pipés et dans le contexte actuel, une économie libérale globalisée saine est devenue impossible et a trop d'effets pervers sur la vie sociale.

 

L'écologie.

 

Par définition, une société à capital cherche à générer des bénéfices et à en redistribuer une partie à ses actionnaires.

Dans le système libéral où la libre concurrence doit établir le juste prix, tout coût supplémentaire diminue les bénéfices ou augmente les prix de vente.

A partir de cette constatation, nous pouvons dire que le coût « protection de l'environnement » à la fois dans la phase de production et du produit pendant son usage ne peut pas grever le prix final sous peine d'être plus cher et donc moins concurrentiel.

L'introduction de normes de fabrication non polluantes à toutes les entreprises dans une entité donnée ne fait que déplacer le problème vers d'autres régions à cause de la délocalisation des usines les plus polluantes.

 

La pollution de tout type est inacceptable sur toute la planète. Que ce soit pour produire des biens, les transporter ou les utiliser et cela quel que soit le modèle économique.

De tous les systèmes économiques existants, le libéralisme globalisé est celui qui est le moins contrôlable et qui n'a pas à répondre globalement de ses responsabilités. On ignore (on ne veut pas voir) les dégâts environnementaux que laisse la production industrielle et la consommation sur les autres continents. Exemples : l'extraction des métaux rares qui déplacent la pollution à l'autre bout du monde, l'exploitation des sables bitumeux et du pétrole de schiste qui font des dégâts considérables à l'environnement ou le rejet des déchets industriels et ménagers dans les cours d'eau dans certaines régions d'Asie.

 

                                  Traitement du pétrole.

 

L'apparition de partis écologistes est un non sens. L'écologie en soi n'est pas un système économique. C'est une philosophie que chaque parti et chaque système économique doit ou devrait intégrer et considérer comme prioritaire dans leur programme.

Quel que soit le système économique futur, il devra tenir compte de l'empreinte environnementale qu'il laisse sur la planète et actuellement la pression ne peut venir que des électeurs et des consommateurs.

 

Le réchauffement climatique est un problème séparé.

Qu'il soit d'origine anthropique ou cyclique, son existence est incontestable.

Qu'il aura un impact sur le climat et sur la nature est tout aussi incontestable.

Peut-on le ralentir, l'arrêter ou l'inverser ?

Je n'ai jamais lu ou entendu un expert dire qu'on peut l'arrêter ou l'inverser donc il faut donc se préparer à le subir.

Si le réchauffement climatique est d'origine cyclique, la théorie des cycles de Milankovich [ix]est la plus convaincante. Personne ne pourra arrêter le réchauffement vu qu'il est lié à des phénomènes astronomiques.

 

S'il est d'origine anthropique, il est peu probable qu'on puisse le ralentir significativement.

 

 

Les activités humaines actuelles ne se dirigent pas du tout vers cette troisième supposition ce qui fait douter de leur urgence. Il faudrait pour cela immédiatement arrêter toute les activités militaires non essentielles et remettre la globalisation économique en question.

Les mesures symboliques déjà prises en Union européenne pour amorcer une transition écologique ne représente que quelques centièmes de pourcent de diminution des émissions de gaz à effet de serre et ont déjà un impact négatif sur toute une catégorie de citoyens. Des mesures supplémentaires bouleverseront complètement la vie sociale de centaines de millions de personnes en Europe.

Le capitalisme financier en revanche semble s'intéresser au réchauffement climatique et y voit une opportunité pour révolutionner le modèle économique et l'orienter dans une direction qui pourrait relancer la croissance économique.

 

Réflexions sur la nature humaine.

 

L'homme est un mammifère faible dépourvu de griffes et n'ayant pas de dents acérées. Il n'est pas armé pour se défendre seul contre des prédateurs plus forts que lui. Pour survivre, il a eu besoin de se regrouper et d'apprendre à collaborer avec ses semblables.

Son comportement grégaire lui a permis de chasser des animaux plus gros et plus forts que lui.

Peut-on imaginer que des hommes préhistoriques après avoir chassé et tué l’aurochs ensemble, renoncent à en avoir leur juste part pour se contenter de quelques miettes qu'un des leurs leur donnerait pour le travail tout en gardant l'aurochs pour lui seul ?

Ils se révolteraient et ostraciseraient ce malotru qui veut s'approprier un bien gagné en commun.

 

Le fondement de la philosophie libérale repose sur la propriété et aussi sur le droit « naturel » à la liberté mais :

 

 

Le libéralisme place la liberté comme premier besoin humain mais est-ce bien le cas ?

C'est bien sûr au service et en cohérence avec la philosophie du libéralisme économique et des concepts libéraux dit naturels qui disent qu'une main invisible vient naturellement redistribuer la richesse produite. Ce n'est cependant que de la théorie démentie par les faits et qui ignore le principe d'égalité.

 

Je propose une autre hiérarchie des valeurs.

 

  1. Le droit à la vie.

  2. Le droit à la dignité, au respect, à avoir un abri et de la nourriture.

  3. Le droit à l'égalité. Personne ne doit avoir un statut supérieur à un autre.

  4. Le droit à la liberté d'action si elle ne nuit pas à l'intérêt collectif.

 

La liberté d'expression restant inhérente à chacun des principes décrits ci-dessus.

 

Un siècle avant Proudhon, des hommes s'était déjà émancipés et s'étaient organisés sur des principes égalitaires. Ils vivaient la plupart du temps dans un univers clos et :

 

 

Quelle était donc cette communauté utopique ? Réponse : les pirates de l'Atlantique du début du XVIIIe siècle. [x]

 

La littérature bourgeoise a décrit ces hommes qui s'étaient libérés des conditions inhumaines de la marine de Sa Majesté comme de sanguinaires voleurs.

Oui, ils avaient décrété 100 ans avant Proudhon que la propriété c'est le vol et ils ont pillé les cargaisons des galions qui revenaient avec des marchandises achetées grâce au commerce triangulaire [xi] tout en libérant les esclaves noirs quand l'occasion se présentait et en passant au fil de l'épée les responsables de cet odieux commerce.

Aucun théoricien anarchiste ne leur avait appris le principe d'égalité. Ils l'ont naturellement découvert et appliqué.

Cette digression pour souligner que le droit à la liberté n'est pas le premier droit que cherche l'homme quand il doit s'organiser et inventer un modèle nouveau pour vivre en communauté.

 

L'avenir du capitalisme.

 

Maintenir le système globalisé serait suicidaire pour la haute finance internationale, le principal détenteur du pouvoir dans le monde actuel.

Les classes moyennes (censées consommer et soutenir la croissance) sont fragilisées et le système n'arrive plus à gagner des guerres pour maintenir son hégémonie et conquérir de nouveaux marchés.

Des États s'appuyant sur d'autres logiques économiques refusent de se faire absorber dans la globalisation et opposent de farouches résistances.

En se réorientant vers l'économie verte, la haute finance internationale entrevoit de relancer une croissance basée sur les nouvelles technologies.

Elle part du constat que les pays grands producteurs d'énergies fossiles échappent au contrôle du capitalisme international et cela procure des rentes à des pays adversaires. Maintenir le marché des hydrocarbures sous contrôle est extrêmement coûteux et aléatoire, voire impossible en ce qui concerne la Russie.

Relancer la croissance et acquérir une indépendance énergétique est fondamental pour le capitalisme international et il n'y a que deux options pour cela :

 

 

Cette troisième révolution industrielle est soutenue, peut-être même initiée, par deux puissants groupes qui se réunissent de manière informelle tous les ans. Il s'agit du groupe de Bilderberg pour le monde occidental et de la Commission trilatérale qui est le Bilderberg élargi au reste du monde capitaliste.

Ces groupes réunissent les personnalités les plus puissantes des domaines économique, politique et militaire.

Si les objectifs transparaissent clairement, les moyens d'y parvenir sont opaques et ne sont sans doutes pas décidés lors des réunions annuelles de ces groupes. Les participants se contentent de trouver des pistes pour résoudre les problèmes actuels du capitalisme et de chercher un consensus sur les orientations futures qu'il doit prendre.

Il est exagéré de parler de complot quand on évoque ces réunions mais le manque de transparence sur les sujets abordés et la qualité des invités [xiii] laissent la porte ouverte à tous les questionnements et laissent l'impression que des intérêts très puissants veulent prendre le contrôle des pouvoirs politiques.

 

 

La transition énergétique fait partie de cette troisième révolution avec aussi tous les derniers développements dans les domaines du numérique, de l'intelligence artificielle et des télécommunications qu'on pourrait symboliser par l'essor des GAFA [xiv]et des autres géants du Web.

Le réchauffement climatique, incontestable mais à mon avis incontrôlable, sert de prétexte pour la reconversion du capitalisme. Elle permet de faire accepter une modification du modèle sociétal aux nouvelles générations avec la complicité consciente ou inconsciente des mouvements écologistes et des médias mainstream.

Les générations futures apprendront par exemple à se passer de voitures individuelles à moteur thermique, à être entourées de réalités virtuelles, à recevoir des informations filtrées et à vivre avec un pouvoir d'achat plus limité tout en consommant des biens et des services de plus en plus numérisés. Une nouvelle élite qui bénéficiera de privilèges émergera. Elle veillera à défendre ce nouveau consumérisme.

Il faut garder à l'esprit que ce sera un changement lent qui prendra le temps de plusieurs générations.

 

Seuls les États qui auront gardé des « cartouches » pour affronter ce troisième millénaire plein de nouveaux défis garderont des marges de manœuvre indépendantes et maintiendront une influence sur leur destin.

La globalisation et la financiarisation de l'économie a atteint ses limites. Les peuples de beaucoup de grands et aussi de petits pays en ont pris conscience et ont élu des gouvernements aux programmes plus protectionnistes veillant davantage aux intérêts nationaux. C'est vrai pour les États-Unis, le Royaume-Unis, la Russie, l'Inde, le Japon, le Brésil, l'Argentine la Corée du Sud et plusieurs pays de l'Union européenne.

Les valeurs libérales classiques risquent d'en pâtir et le capitalisme risque de davantage s'appuyer sur des politiques plus protectionnistes à l'avenir.

 

Conclusion.

 

Le capitalisme a prouvé sa résilience au cours des siècles passés. Il a surmonté toutes les crises et rien n'indique qu'il ne surmontera pas la suivante. Le « Grand Soir » n'est pas encore pour demain ni pour dans un avenir proche d'ailleurs. Bien sûr, la sortie de crise risque d'être douloureuse mais je ne vois pas le capitalisme disparaître tout simplement parce qu'il tient toutes les manettes sauf une dont je parlerai plus loin.

 

 

Même si le monde globalisé se scinde comme cela semble se dessiner et qu'il devient un monde multipolaire, chacun des pôles ne renoncera pas au capitalisme. C'est dérangeant à entendre, cela décevra beaucoup de ceux qui espèrent un changement de système économique mais c'est ce qui est le plus réaliste.

Les États-Unis ont prouvé leurs puissances financière et politique ces dernières années. Ils renforcent encore leur puissance industrielle sous la présidence de Donald Trump. Les entreprises américaines reviennent s'installer au pays et elles y ont déjà investi 400 milliards de dollars pour cela.

 

Les États-Unis gagnent leurs bras de fer :

 

 

Sur base de cette constatation, les États-Unis, avec ou sans Trump, devraient rester le centre du plus important pole qui réunirait autour de lui les pays de l'OTAN, le Japon, l'Australie et la Nouvelle-Zélande, la Corée du Sud, Israël, le Mexique et sans doute quelques autres pays.

Le deuxième pole en termes de puissance économique serait la Chine et les économies émergentes d'Asie.

La Russie, malgré tous les efforts de l'équipe au pouvoir, n'arrive pas à attirer d'autres pays autour d'elle pour atteindre le seuil permettant d'être un pole indépendant. Statut en attente mais peu d'espoir de devenir un pole indépendant même à moyen ou à long terme.

Au début des années 2000, certains politologues avaient cru qu'un pole sud-américain se rassemblerait autour du Brésil mais là aussi, cela semble être un échec.

L'Inde est un géant démographique qui semble se contenter de rester souverain mais qui tombera peut-être d'un coté ou de l'autre.

 

                           Conception russe du monde multipolaire.

 

Le capitalisme ne semble pas remis en question dans le futur monde multipolaire mais en revanche sa conjonction avec le néolibéralisme est remise en question avec la réémergence du nationalisme conservateur qui pourrait être une alternative sur laquelle le capitalisme pourrait aussi s'appuyer.

 

Les idées libérales que représente le président Macron, l'ouverture au capitalisme international et l'effacement de la nation, sont vieilles de presque deux siècles et demi.

Même si elles ont été réactualisées il y a 50 ans, elles sont anachroniques.

C'est pourquoi, prétendre comme le fait le président Macron que cela s'apparente à du progressisme est une vraie tromperie intellectuelle. La tendance mondiale se dirige plutôt vers la défense des intérêts économiques nationaux. [xv]

 

Une régulation de la finance s'impose et elle ne peut être imposée que par des États au pouvoir fort et qui oseront se mesurer à l'oligarchie. Il est anormal que les flux financiers dans le monde globalisé échappe à tout contrôle et puissent prospérer en spéculant au seul bénéfice de la finance internationale.

C'est à mon avis un problème ouvert qui ne pourrait être réglé qu'en changeant de système économique.

 

L'adage : « L'argent gouverne le monde  » n'a jamais été aussi vrai.

 

Est-ce inéluctable ? Si ce n'est pas inéluctable, ce ne sera en tout cas pas facilement remis en question.

 

En France, il serait illusoire de compter sur un homme (ou une femme) providentiel pour recouvrer la souveraineté à laquelle une grande majorité de Français aspire.

Nous avons vu l'effet pernicieux d'un système présidentiel qui aux trois dernières élections a vu les Français élire un président qui ne tient pas ses promesses électorales et dont le taux de popularité avoisine chaque fois les 30 % à mi-mandat.

C'est le signe d'une démocratie figée qui est détournée de son sens et qui est loin d'une démocratie dynamique dans laquelle les volontés majoritaires des citoyens sont respectées.

 

A mon avis, le seul atout garanti par la constitution que possède les peuples qui représentent encore toujours la grande majorité des citoyens reste quand-même le suffrage universel.

Actuellement, il est pris en otage par une élite privilégiée acquise au néolibéralisme et à l'économie de marché.

 

Je propose quelques pistes pour redynamiser la démocratie en France.

 

 

J'ajouterai que pour encore améliorer la démocratie, il serait utile d'arriver à un vrai pluralisme de l'information.

 

« La civilisation démocratique est entièrement fondée sur l'exactitude de l'information. Si le citoyen n'est pas correctement informé, le vote ne veut rien dire. » - Jean-François Revel.

 

Le pantouflage, le lobbying, la supranationalité, un parlement socialement non représentatif de la population, les manipulations politiques [xvii], le clientélisme... minent la confiance des citoyens dans leur démocratie. Le taux de participation aux élections est bas mais reste encore dans la moyenne européenne en France. La confiance dans les hommes politiques [xviii] (et les médias [xix]) suivant les sondages est elle tout bonnement catastrophique et ouvre la porte à un éventuel régime autoritaire.

 

Une piste est de peut-être donner nos voix à des partis réformistes mais il y en a certainement d'autres.

Je terminerai cet article par ce plaidoyer pour une refondation démocratique sur des bases transparentes pour réconcilier les citoyens avec la démocratie. C'est à mon avis le seul moyen non violent de voir les intérêts nationaux (ceux qui concernent l'ensemble des citoyens d'un pays) défendus et appréhender le monde post néolibéral et la troisième révolution industrielle qui s'annoncent en étant autre chose que des acteurs passifs

 

Cet article est basé sur des connaissances acquises et sur des réflexions personnelles. Il n'est de ce fait pas référencé.

Seuls des recherches pour des vérifications orthographiques et des précisions de chiffres, de dates ou de périodes ont été effectuées sur Internet.

Cet article peut être considéré comme la troisième partie et la conclusion des deux articles parus sur AgoraVox en octobre 2016.

 

https://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/conservatisme-liberalisme-et-185380

 

https://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/conservatisme-liberalisme-et-185870

 

 

i Au contraire d'expéditions de conquêtes financées par des monarchies européennes : Christophe Colomb, Magellan, Jacques Cartier etc.

ii La colonisation a permis d'exploiter le grand réservoir de matières premières et les productions agricoles des colonies et à partir de la fin du XIXe siècle, le pétrole du Moyen-Orient.

iii L'Angleterre a non seulement inondé son empire de ses productions industrielles mais elle l'a aussi pourvu d'équipements favorisant les échanges également fabriqués dans la métropole. Voies ferrées, équipements portuaires etc. Il est à noter que durant le XIXe siècle, les États-Unis avaient adoptés des mesures protectionnistes pour se mettre à l'abri de l'expansionnisme capitaliste britannique.

iv Le terme « néolibéralisme » a été contesté par Milton Friedman, Friedrich Hayek et les économistes libéraux du XXe siècle. Je ne l'emploie pas dans le sens péjoratif mais uniquement pour distinguer le libéralisme du XIXe siècle de celui qui a succédé au Keynésianisme et qui était sensiblement identique.

v Les quatre règles de base des Reaganomics étaient : réduction de l'impôt, réduction des dépenses gouvernementales, fin progressive de la régulation (mains libres pour le capitalisme) et contrôle de l'inflation.

vi La dette souveraine étasunienne était de 988 milliards de dollars à la fin de la présidence de J. Carter. Elle est maintenant de plus de 23 000 milliards de dollars. La dette totale des États-Unis (dettes privées et dettes souveraines) est 10 fois plus élevée.

vii Les actifs toxiques sont des créances irrécupérables qui si elles étaient placées en pertes dans les bilans des banques comme la logique comptable le voudrait entraîneraient leurs faillites qui seraient suivies d'un effondrement financier mondial à cause de l'interdépendance des banques.

viii Une autre façon d'augmenter les dividendes est d'augmenter son chiffre d'affaires mais dans le contexte d'une impitoyable concurrence internationale et d'une faible croissance en Occident, très peu d'entreprises arrivent à croître pour mieux rétribuer le capital excepté peut-être pour des entreprises innovantes ainsi que dans le secteur financier.

ix https://www.futura-sciences.com/planete/definitions/climatologie-cycle-milankovitch-13390/

x « Pirates de tous les pays. » - Marcus Rediker, historien à l'Université de Pittsburgh.

xi Le commerce triangulaire est aussi appelé « la traite des nègres ». Les bateaux partaient d'Europe avec des marchandises de peu de valeur qui servaient à acheter des esclaves en Afrique qui étaient ensuite revendus très cher dans les colonies en Amérique. Ils revenaient en Europe chargés de produits fabriqués dans les colonies. C'était un commerce particulièrement abject.

xii Les cinq principaux types d'énergies renouvelables sont l'énergie hydraulique, l'énergie éolienne, l'énergie solaire, la biomasse et la géothermie. Il n'y a pas de problème pour fabriquer suffisamment d'énergie électrique renouvelable dans le monde. Le problème des énergies renouvelables est leur stockage. L'énergie hydraulique et la biomasse peuvent être facilement stockées. La géothermie est perpétuellement disponible mais seulement en des lieux particuliers. Le problème se pose pour les énergies intermittentes comme l'éolienne et la solaire et pour le stockage de l'électricité. Il y a de nombreuses pistes à l'étude et le problème devrait être résolu dans les dix prochaines années.

xiii A défaut de communication de leur part, on se doute bien que ce sont des sujets liés à la gouvernance mondiale et aux orientation économiques qui sont discutés lors des réunions.

xiv Pour rappel. GAFA signifie Google, Apple, Facebook et Amazon.

xv Le nationalisme n'est pas l'isolationnisme comme on l'entend souvent dans les médias. Protéger des secteurs stratégiques et laisser d'autre secteurs à la concurrence est juste un autre modèle politique et économique que le néolibéralisme qui soit dit en passant n'a pas réussi à amener le bonheur universel. En vérité, le protectionnisme a toujours existé sauf que maintenant il se fera dans le cadre d'un monde multipolaire.

xvi Pour rappel : le traité constitutionnel européen avait été rejeté par 54,68 % des suffrages exprimés. Il a été adopté moins de trois ans plus tard par les députés français sous le nom de traité de Lisbonne.

xvii Il est difficile de croire que la sortie des petites municipalités des résultats nationaux sert à autre chose que de masquer le manque de popularité de LREM. Des gouvernements précédents avaient déjà été responsables de manipulations notamment avec le redécoupage de circonscriptions électorales par exemple.

xviii9% des Français font confiance au personnel politique suivant un sondage du Figaro en janvier 2019. https://www.lci.fr/population/sondage-une-defiance-historique-entre-les-francais-et-leurs-representants-politiques-2109861.html

xixSondage de juin 2019. 24 % des Français font confiance aux médias. https://www.liberation.fr/checknews/2019/06/26/la-confiance-des-francais-dans-les-medias-est-elle-a-son-plus-bas-historique_1736079


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