Le Meilleur des mondes

par Bruno Hubacher
mercredi 15 avril 2020

La surproduction de biens et services, une conséquence directe de la croissance économique continue, fait partie de l’ADN du capitalisme. N’échappant pas aux dures lois de la physique, le capital se doit de se servir d’autres moyens pour poursuivre son objectif, soit par la destruction d’une partie de l’appareil productif, par une guerre, soit par la disruption volontaire du système, par une pandémie.

Dans une lettre à ses actionnaires du mois de septembre 2018, la banque d’investissement américaine Morgan Stanley annonça une crise financière pour l’année 2020 et, dans une lettre à ses actionnaires du mois de mars de cette année, le PDG de la multinationale de gestion d’actifs financiers « BlackRock », Laurence D. Fink, déclare être « modérément optimiste, se préparant d’ores et déjà à de nouvelles acquisitions avantageuses. » (FT)

Mis à part les conséquences socioéconomiques désastreuses qu’une telle concentration de pouvoir engendrera, ses implications sur la liberté individuelle s’annoncent d’ores et déjà dantesques.

Ce sont le « confort et la sécurité des citoyens » qui sont au centre des préoccupations du projet KDTI « Known Traveller Digital Identity » du « World Economic Forum », co-développé avec le « Département de la sécurité intérieure des Etats-Unis », dont le rapport vient d’être publié sous l’appellation « KTDI White Paper » le 26 mars dernier sur son site internet. The show must go on.

Mandaté par l’organisation à but non lucratif, la multinationale de conseil et de technologie américaine « Accenture », anciennement « Arthur Andersen », 435'000 collaborateurs dans 120 pays, figurant parmi les 500 entreprises les plus importantes de la planète, selon Forbes, dont 98 des 100 plus importantes entreprises sont clients, vient de terminer son rapport.

Retour en arrière. Lors de sa réunion annuelle à Davos au mois de janvier 2018, le WEF annonçait, sans grande publicité, que le gouvernement canadien s’apprêtait à « souhaiter la bienvenue sans formalités douanières fastidieuses à certains voyageurs volontaires, et sans doute privilégiés, grâce aux progrès de la biométrie (1) et de la technologie de chaîne de blocs (blockchain) (2) ». Le programme KTDI, développé sous le patronat du WEF, est devenu réalité, pour le gouvernement canadien, en collaboration avec la compagnie « Air Canada », un système de contrôle d’identité centralisé dont bénéficieront les voyageurs, encore une fois, à titre volontaire, bien entendu.

Quoi que, les responsables du programme estiment tout de même que ce nouveau « prototype » de « border-crossing experience » volontaire pourrait bien devenir une réalité pour l’ensemble des voyageurs, grâce à la collaboration « des leaders des secteurs privés et publics », car « un des objectifs à long terme serait la mise en réseau de données utiles concernant la santé, l’éducation, la situation financière, ainsi que des thématiques diverses, telles que par exemple l’aide humanitaire ou des élections parlementaires (rapport). » Par ailleurs, le gouvernement néerlandais et la compagnie « KLM » se sont également laissés séduire par la « border-crossing experience ».

Les standards technologiques, utilisés pour une telle surveillance volontaire, seront fournis par le « World Wide Web Consortium » W3C, un organisme de standardisation à but non lucratif, décidément, fondé en 1994 au « Massachusetts Institute of Technology » MIT à Boston, chargé de promouvoir la comptabilité des technologies du « World Wide Web », comprenant 435 entreprises partenaires, le partenariat public-privé, dont Microsoft, Apple et Google (Wikipedia).

Bien avant la publication du best-seller « 1984 » de l’écrivain britannique George Orwell, alias Arthur Blair, en 1949, c’est en 1932 déjà que son compatriote Aldous Huxley publia la sienne de « dystopie, randienne » dirait-on aujourd’hui, « Brave new world », une boutade shakespearienne.

C’est au sein de l’état mondial que cela se passe, en l’an 632 AF (après Henry Ford), dans lequel l’interdiction de l’enseignement de l’histoire, matière déclarée obsolète car anéantie par la « Guerre des neuf Ans », sert de garde fous contre toute individualisation de la pensée.

Le « soma », un puissant psychotrope, dénué de tout effet secondaire indésirable, est administré aux travailleurs en fin de journée, une potion, favorisant la cohésion de la société grâce à la consommation régulière duquel chaque élément se sentirait heureux et ne revendiquerait rien, se contentant de son appartenance à une des cinq classes sociales prédéfinies.

Les êtres humains sont exclusivement fabriqués en laboratoire et la sexualité est considérée comme un passe-temps, dont la durée des relations entre de multiples partenaires doit être strictement limitée, pour éviter le risque de contournement d’une reproduction qui échapperait au conditionnement réglementaire.

Aux embryons des castes inférieures est administré une dose d’alcool, censée entraver leur développement et leur amour propre permettant de mieux les intégrer dans le processus de la production.

Les castes supérieures

Les castes inférieures

Subdivisés en « Plus » et « Moins », chaque caste est conditionnée de sorte à ce que chacun de ses membres s’estime dans une position idéale par rapport à ses pairs et l’ensemble de la société, garantissant ainsi la stabilité.

L’enseignement « hypnopédique » dont chaque enfant bénéficie, une méthode reposant sur la théorie que l’Homme peut apprendre en dormant, permet de créer une morale commune profondément ancrée dans le subconscient, perpétuant le mépris des classes tout en reconnaissant la nécessité de leur existence. (Wikipedia)

Toute ressemblance avec des événements passés ou présents est fortuite.

 

  1. La biométrie (mesure du vivant) représente l’étude quantitative des êtres vivants, grâce à des techniques de reconnaissance, d’authentification et d’identification, se servant de caractéristiques physiques est comportementales. (Wikipedia)
  2. « Blockchain » une technologie de stockage et de transmission d’informations sans organe de contrôle à l’aide de la technique de la cryptographie (Wikipedia)

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