Le Pakistan et l’Afghanistan sont au seuil d’une grande guerre

par Patrice Bravo
jeudi 8 décembre 2022

Début décembre, les autorités pakistanaises ont annoncé que la situation en Afghanistan s'aggravait très rapidement. Au même moment il a été rapporté que les Pakistanais avaient envoyé un avion pour évacuer leurs diplomates de Kaboul. 

Une semaine plus tôt, le gouvernement taliban a annoncé avoir réparé 70 avions et hélicoptères militaires "hérités du gouvernement précédent". Plus exactement offerts par les Américains parmi d'autres armements pour plus de 85 milliards de dollars. Grâce à cela, en termes d'aviation de combat l'Afghanistan taliban se place quatrième (derrière les États-Unis, la Chine et la Russie). Il possède notamment des An-32B, Mi-25, Mi-17B-5, UH-60A, MD530F et Cessna 208B. 

Début octobre, le commandement des talibans pakistanais Tehrik-e-Taliban Pakistan (TTP) ont diffusé un enregistrement de leur chef Noor Syed Mehsud ordonnant aux combattants de se préparer à une guerre contre les talibans afghans en Afghanistan. Le mufti affirme que "les talibans afghans ont commencé à humilier les combattants du TTP en fouillant leurs maisons, ce qui est d'autant plus inadmissible". 

D'après la police pakistanaise, au 1er décembre, près de 5.000 combattants du TTP se trouvaient à titre permanent sur le territoire afghan. Leur nombre a significativement augmenté après le départ des troupes de l'Otan d'Afghanistan. 

En novembre, un conflit entre les talibans et les militaires pakistanais dans l'est de l'Afghanistan a débouché sur un affrontement armé menaçant de dégénérer en hostilités d'envergure. Le Pakistan a annoncé une invasion de terroristes en Afghanistan et y a envoyé des unités. Islamabad a également exigé de l'Occident de rendre à l'Afghanistan 9 milliards de dollars bloqués sur les comptes aux États-Unis. 

Certains experts font remarquer que la déclaration d'une guerre par les talibans pakistanais à Islamabad a eu lieu presque immédiatement après la perte de la course au poste de commandant en chef par l'ex-patron du renseignement pakistanais ISI général Faiz Hameed face à Asim Munir. Plus tôt, le premier a été l'initiateur et principal superviseur des négociations secrètes avec le TTP afin de faire une trêve avec les talibans. 

L'échec de Faiz Hameed a coïncidé avec l'annonce par l'ambassadeur afghan en Allemagne Hamid Sidig d'une soudaine activité des États-Unis par rapport à l'Afghanistan : "Le département d'État américain s'intéresse sérieusement à l'état des dialogues interafghans et se dit optimiste concernant la disposition et la capacité des Afghans à se réunir autour d'une même table et trouver un consensus." 

Selon le diplomate afghan, les jours ayant coïncidé avec l'annonce d'un djihad contre le Pakistan "incluaient les négociations des représentants afghans avec l'USIP, le Conseil de l'Atlantique, le département d'État américain et le Congrès américain… Nos amis américains cherchent à soutenir le dialogue interafghan". 

Il s'est avéré également qu'en quittant l'Afghanistan les États-Unis restaient son plus grand donateur, allouant an août 2021 à Kaboul plus de 1,1 milliard de dollars au niveau de l'Agence pour le développement international (USAID) et le département d'État américain. 

Certains experts écrivaient début novembre concernant la préparation d'un nouvel accord américano-taliban après lequel ce partenariat deviendrait le principal défi pour la Russie, la Chine et l'Iran en Grande Asie centrale. Si c'est le cas, alors la déstabilisation du Pakistan n'est que l'un des axes d'actions contre la Chine, principal allié et pilier d'Islamabad dans la région. 

Le Pakistan et l'Afghanistan sont au seuil d'une grande guerre où les talibans pakistanais et afghans se battront (y compris entre eux) ou s'affrontent déjà.

Alexandre Lemoine

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Source : http://www.observateurcontinental.fr/?module=articles&action=view&id=4477


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