Le paradigme d’autorité et de confiance mutuelle dans la gestion et la protection des ressources naturelles
par GIRARD Pierre Benjamin
vendredi 20 janvier 2017
Qu’est-ce que c’est ?
Une complémentarité certaine dans ces deux modes de gouvernance
D’un point de vue pratique, l’approche « autoritaire » est pertinente dans un contexte de décision simple dans la mesure où l’identification d’un risque (qui rappelons-le, représente la convergence entre un aléa et une vulnérabilité) et les solutions qui en découlent entrainent un bénéfice certain à la société dans sa globalité. En outre, l’approche de « confiance mutuelle » est utile dans des contextes spécifiques et caractérisés par une complexité marquée par la présence d’une multitude d’acteurs et d’enjeux avec des intérêts différents. Ces distinctions entre ces deux paradigmes permettent de les définir et de les appréhender, mais n’engagent pas une différenciation totale. Pour cause, ils s’entremêlent souvent dans la gouvernance environnementale et se succèdent mutuellement quand l’un des deux est dans l’impasse.
Ces types de gouvernance se retrouvent par exemple dans la gestion des Aires Marines Protégées (AMP). Ces dernières ont été généralisées par la Convention sur la diversité biologique et visent à protéger une partie ou la totalité de l’environnement qu’elle délimite. 3 types d’AMP peuvent être identifiés et définis.
- L’AMP « réserve » qui est une réserve intégrale, une zone de conservation totalement protégée où les prélèvements sont interdits. Cette définition est utilisée par l’UICN.
- L’AMP « multi-usage » est un espace utilisé par différents acteurs, mais qui a une vocation de conservation. Les usages sont présents sur la totalité ou partie de la zone conservée. De plus, une partie de leur surface est entièrement protégée.
- Les « Restrictions Spatio-Temporelles » (RST) incluent les zones de pêche et la protection d’une ressource halieutique et l’optimisation de la pêche.
La mise en place de ces espaces protégés accumule 4 intérêts majeurs :
- Un intérêt écologique évident qui oblige une protection et une restauration du patrimoine naturel.
- Un intérêt touristique comprenant des composantes culturelles et pédagogiques.
- Un intérêt halieutique dans la multiplication du nombre de poissons et de crustacées compte tenu de l’interdiction d’accès de ces zones. En conséquence, les populations locales ont du mal à pêcher selon leurs besoins.
- Un intérêt critique dans la mesure où ces interdictions viennent enrailler les habitudes culturelles et économiques des populations locales. De plus, la pression sur les ressources n’est pas exclusivement due aux rendements qu’exercent les pêcheurs locaux sur les réserves de poisson (certaines compagnies de pêche frigorifique utilisent des techniques de pêche aux rendements destructeurs).
Aussi, ce type de protection renvoie à des approches environnementales, mais également historiques et culturelles. Les zones ainsi protégées recouvrent un ensemble de paramètres physiques, liés à des zones intertidales (relatives à l’estran), mais aussi métaphysiques (rapport à la nature).
Les Aires Marines Protégées doivent donc assumer plusieurs types de gouvernance qui se succèdent ou s’entremêlent selon les contextes et qui nécessitent des approches pluridisciplinaires afin d’appréhender tous les enjeux relatifs à cette zone sans uniquement se focaliser sur des problématiques environnementales.
Il en est de même pour d’autres espaces vulnérables qui doivent faire face à l’évolution de leurs paysages et des pratiques (humaines ou non) qui y sont associées. L’important est d’augmenter son niveau de pertinence en tenant compte de la multiplicité des facteurs et des enjeux tout en s’assurant de suivre un objectif commun, souvent corrélé aux populations locales. En effet, le principe de subsidiarité doit être mis en avant : les décisions doivent être prises par le plus petit niveau d’autorité compétente pour résoudre un problème. Une fois de plus, la géographie, par son rapport à l’espace, est un des outils les plus pertinents pour tenter d’appréhender ces problématiques.
Pierre Benjamin GIRARD, géographe consultant, géoGIR (www.geogir.fr)