Le pari de la croissance à 3 % !

par Aimé FAY
mardi 25 septembre 2007

Nicolas Sarkozy a tout misé sur la croissance. Pari bien dangereux quand on ne maîtrise rien. La croissance ne se donne pas. Ne se décrète pas. Elle se prend. S’attire. Se capture. Puis, elle se fidélise. Exactement comme on prend un poste en entreprise ou à la tête d’un Etat. Nicolas Sarkozy doit pourtant savoir cela. Alors, quels sont les pré-requis méthodologiques pour gagner un tel pari ?

D’abord, celui de la crédibilité. Autant en interne qu’en externe. Essentielle, car le biotope dans lequel s’épanouira la croissance devra croire dans tous les éléments qui l’entourent. Ceux-ci devront être à l’unisson et en parfaite osmose, tant dans l’esprit que dans la lettre. Alors, est-ce aujourd’hui le cas ?
Parler d’une éventuelle guerre est-il un élément favorable pour attirer de la croissance ? Quel entrepreneur va risquer d’invertir quand le pays qui commence à passer pour un va-t-en-guerre ?

- Parler de la faillite du pays est-il porteur pour un développement économique, même faible ? Quel financier irait mettre de l’argent dans une entreprise dont le chef prévient qu’elle est en faillite ?

- Réduire ses ministres au rang de presque rien est-il porteur d’avenir ? Quel "business angel" mettrait un euro dans une entreprise où tout tourne, nuit et jour, autour du PDG omniscient et omniprésent ?

L’entreprise ou le pays qui aurait cette crédibilité moribonde aurait bien peu de chance d’attirer une quelconque croissance. Cette entité serait taxée d’immaturité. De manque de professionnalisme.

Ensuite, celui de la préparation. Un projet de croissance cela se définit de manière organique. On en fixe : le quoi, le qui, le comment, le où, le combien, etc. C’est une vraie démarche quintilienne, bien connue des organisateurs. Des personnes qui ont déjà managé des projets industriels, nationaux ou internationaux. Alors, assistons-nous actuellement à cela ?

- Distribuer de l’argent sous forme de cadeaux fiscaux fait-il bien partie de la phase préparatoire d’un grand projet - d’ailleurs, qui avait demandé ces cadeaux fiscaux si ce n’est l’un des arguments de la campagne électorale ?

- Quel investisseur va mettre de l’argent dans une entité qui aura d’abord pour volonté de le distribuer ?

- Ponctionner des revenus dans les masses laborieuses, sous forme de diverses franchises, va-t-il favoriser la dépense, la consommation ? Même l’anti-keynésien, feu Milton Friedman crierait à l’absurdité !

- L’absence d’objectifs industriels fait-elle aussi bien partie d’une démarche professionnelle de croissance ? Qui sait aujourd’hui en France, sur quels secteurs productifs vont porter nos axes de développement ? Quel homme d’affaires accepterait d’entrer au capital d’un groupe sans en connaître le projet industriel ? Lui dire qu’il touchera 10 ou 20 % de rentabilité ne suffira pas à le faire participer au tour de table. Il voudra au préalable entendre parler des projets de façons précises, concrètes. De quoi s’agit-il ? Sont-ils opportuns, faisables et surtout viables à court, moyen ou long terme.

Enfin, le pré-requis de la mise en œuvre d’actions structurelles. Elles doivent, en encadrant les objectifs, démontrer pas-à-pas, tous les jours, que le pays va dans la direction fixée. Où en est-on ? Que reste-t-il à faire ? Est-ce qu’on est toujours dans la bonne direction compte tenu de l’évolution environnementale ? Y a-t-il suffisamment de moyens ? Etc.

Que nenni ! Notre pays assiste, au contraire, chaque jour à une mise en scène du président ou celle de l’un de ses proches à l’Elysée. Cette technique de paillettes est contre-productive pour attirer les investissements porteurs de croissance durable. Cette technique avait été choisie par un grand groupe français présidé par le très médiatique J-M Messier, maître... d’une verbosité intarissable. Hélas, c’est la déconfiture qui a été livrée comme récompense aux actionnaires.

On le voit, la croissance c’est sérieux. Elle ne se décrète pas et surtout, elle ne s’appelle pas devant les caméras. La dame est très pudique. Surtout à 3 % !
Les entrepreneurs, les véritables, ceux qui connaissent la croissance diront tous, qu’elle est un partenaire qui se mérite et qui se fidélise chaque jour par des attitudes et des efforts soutenus, empreints de modestie et d’abnégation. Hélas, les dirigeants de notre pays sont encore aujourd’hui loin, très loin, d’une telle prise de conscience !


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