Le rapport Attavisme

par axalinencele
samedi 31 mars 2018

Le gouvernement s'apprête à durcir les conditions du chômage : embauche de contrôleurs, refus d'une offre raisonnable entraînant la radiation des listes, carnet de bord mensuel pour les demandeurs d'emploi… Ces mesures vous offusquent ? Ne lisez surtout pas l'article qui va suivre, vous risquez de vous évanouir ! Le rapport rédigé par le haut fonctionnaire Jean-Michel Attavisme qui dit-on aurait l'oreille des milieux entrepreneuriaux, voire même du président, risque en effet de mettre de l'huile sur le feu, en proposant notamment renforcer la dimension répressive…

 

Qui est JM Attavisme ?

Diplômé de l'Ena et des mines, membre des conseils d'administration d'Ernst and young, de Natixis et de l'Ifrap, co-rédacteur du rapport Gallois en 2012 mais également ardent promoteur de l'économie sociale et président honoraire de l'Ong « liberté pour les peuples Cubains et Venezueliens » Mr Attavisme est avant tout un homme protéiforme dont on ne compte plus les domaines de compétences. Maoiste en 1968, Mitterrandiste en 1981, Sarkozyste en 2007 et soutien d''Emmanuel Macron en 2017, ses détracteurs le considèrent parfois comme un caméléon prétentieux. Il n'en demeure pas moins qu''il s'agit d'une personnalité hors norme, dotée d'une intelligence rare (selon mr attavisme lui même, son qi dépasserait celui d'Einstein et Hawking), permettant de briser les tabous idéologiques dans lesquels notre pays s'est malheureusement enkysté depuis des décennies.

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La fléxisécurité Danoise comme référence.

La première partie rappelle les bienfaits de la politique de « flexisécurité » menée au Danemark, ayant permis une baisse importante du chômage structurel au début des années 2000 (passant de 12 à 4%). Ce modèle repose sur trois dimensions principales : une politique active en terme de formation permettant une adéquation permanente entre l'offre et la demande, une flexibilisation du marché du travail ainsi qu'une indemnisation des chômeurs accompagnée d'un contrôle drastique de ces derniers.

Ces trois piliers complémentaires permettent la prise en compte du phénomène de destruction créatrice décrite par l'économiste Schumpeter ainsi que de l'aspect dynamique du système capitaliste, tout en protégeant et surtout en formant les chômeurs. Tout au long de son rapport, n'hésite d'ailleurs pas à étayer ses préconisations de ses brillantes références philosophiques ou économiques afin de donner de la hauteur au propos.

La théorie est par ailleurs souvent corroborée par des analyses empiriques variées et il faut bien le dire poussées, Mr attavisme étant également un homme de terrain. Une usine de sidérurgie ou de l'agro-alimentaire ferme ? L’État ne doit surtout pas subventionner ce secteur mais au contraire aider ces salariés d'une soixantaine d'années à retrouver un emploi dans un secteur plus porteur, l'économie de la connaissance par exemple. Les attaques fusent contre ce que Mr Attavisme nomme le néo-colbertisme » et leur propension à l'étatisme. Il traite ainsi l'ancien ministre du redressement productif Montebourg de « sophiste économique » (en référence au livre de Fréderic Bastiat), du fait de son ancienne volonté de nationaliser les hauts fourneaux de Florange.

 

Un partenariat entre Pôle Emploi, les collectivités locales et la société Uber.

La deuxième partie propose la mise en place de nouvelles synergies, impliquant une intervention étroite de la sphère privée dans un secteur traditionnellement administré de près ou de loin par l’État. Si l'inversion de la hiérarchie des normes entraîne inexorablement la fin des accords tripartites entre l'Etat, les syndicats de patrons et de salariés, Mr Attavisme propose d'y substituer un partenariat entre les collectivités locales, pôle emploi et la société Uber France.

 

Un encouragement à la délation ?

Si les deux premières parties du rapports se contentent d'apporter un support théorique aux réformes entreprises par Emmanuel macron en matière de politique active de l'emploi, c'est cependant la dernière partie qui risque de provoquer des remous au sein de l'opinion publique….

Citant à plusieurs reprises l'école économique Américaine du « public choice », selon laquelle le fonctionnaire cherche constamment à maximiser son influence et son budget au détriment de l'intérêt collectif afin de conserver sa légitimité, il transpose intelligemment cette analyse aux salariés de pôle emploi. Pourquoi ces derniers souhaiteraient-ils réduire le chômage et risquer ainsi de perdre emploi et utilité sociale ? C'est en substance ce que laisse entendre ce rapport.

Plus concrètement les mairies seront incitées à afficher les listes de chômeurs résidant dans la commune sur l'hôtel de ville. Des personnes voulant arrondir leur fin de mois pourront ainsi se connecter à l'application « uber unemployment France » et pister un chômeur dans ses moindres faits et gestes. Ce dernier cherche-t-il réellement un emploi ? Coupe-t-il la haie de son vieux voisin sur le temps qu'il devrait dépenser à la recherche d'un emploi ? Ne profite-t-il pas de ses allocations pour se complaire dans ce que la sociologue du travail Dominique Schnapper nommait le chômage inversé ? C'est à dire la mise à profit de sa période de chômage non pas pour s'insérer mais pour développer tout un tas d'activités extra-professionnelles ou socialement valorisantes mais non rémunérées.

Si il récolte des preuves tangibles de son oisiveté (photo, video, compte bancaire dans les poubelles attestant de déplacement non justifiés….), l'application enverra les données au pôle emploi, en encaissant une commission de 20 % au passage. C'est donc bien un système de délation que propose Mr Attavisme.

Une prime importante est même prévue pour les individus démasquant un chômeur domicilié à l'étranger. La société Uber laissera par ailleurs à ces « chasseurs de prime » le monopole du marché de « uber eat » sur ces chômeurs. Ils ne seront ainsi pas concurrencer si les profiteurs démasqués désirent ensuite par exemple acheter des pizzas ou hamburgers via l'application sans se déplacer.

 

Des réactions diverses, parfois violentes.

Les réactions ne se sont pas fait attendre. Si le medef, la cgpme et Jerome Barbier y voient le moyen de redynamiser les chômeurs et de mettre fin à un système d'assistanat généralisé pénalisant les entreprises, le ruissellement des revenus et l'équité sociale, la Cfdt considère quant à elle que cette mesure est un peu excessive et propose un système de délation plus souple et un peu moins stigmatisant. Elle propose tout de même de ratifier les accords à la condition que l’État augmente ses subventions.

Les critiques les plus vives émanent du patron de la Cgt Mr Tartinez affirmant que ce rapport nous rappelle les heures les plus sombres de notre histoire, faisant également appel aux instincts humains les plus bas. Il s'en prend ensuite très violemment à mr Attavisme, se laissant aller tout d'abord à un point godwin, en affirmant péremptoirement que ce dernier se serait probablement soumis aux injonctions du gouvernement de Pierre Laval. Il sombre ensuite dans une attaque ad hominem sur son nom : "Mr attavisme porte bien son nom, en biologie évolutive l'atavisme est la réapparition d'un caractère ancestral, on peut considérer que la vision du travail de ce monsieur est le retour aux conditions du travail du 19 ème siècle, il s'agit par conséquent d'un atavisme".

 

c'est donc le deuxième rapport qui risque de provoquer des remous dans le monde du syndicalisme. Mais comme disait Danton : « il faut de l'audace, de l'audace ». on peut reprocher certaines choses à ce rapport mais certainement pas d'en manquer !

 


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