Le référendum, une arme électorale ?

par Taverne
samedi 11 février 2012

« Le rôle d’un président de la République, c’est d’apaiser les tensions, pas de jeter de l’huile sur le feu. Si on veut mettre un pays à feu et à sang, en faisant des chômeurs des ennemis publics, c’est-à-dire en leur faisant porter le poids des difficultés du pays, on fait courir les plus grands risques à la solidarité et à la France », a déclaré François Bayrou qui voit dans cette initiative « une idée pernicieuse ». Du coup, une centaine de gaullistes auraient rejoint le leader centriste. Quant à mon point de vue personnel de blogueur démocrate sur l'usage annoncé du référendum, le voici...

Le référendum est un moyen d’expression du Peuple réglementé par la Constitution. En aucun cas, il ne peut être un instrument au service d’un candidat à l’élection présidentielle.

Le référendum est un instrument constitutionnel au service du Peuple et du chef d’Etat

Pour la question de l’avenir de la France au sein de l’Europe, Sarkozy s’est assis sur le référendum. Et il voudrait nous faire croire aujourd’hui qu’il accorde un grand prix à ce mode d’expression démocratique ? Pour l’Europe, le recours au référendum était pleinement justifié constitutionnellement. Pour les questions qu’il soulève aujourd’hui, il ne se justifie pas et doit être absolument écarté car il est utilisé comme un levier à usage personnel pour un candidat à la Présidentielle et non comme un moyen actionné par le président de tous les Français.

Souveraineté populaire ou populisme ?

Sarkozy a bradé la souveraineté de notre pays chez les Américains et chez Angela Merkel (quelle pitoyable mise en scène l’autre soir au journal de France 2 !). Il fait mine de se rattraper par la voie de référendums mal intentionnés pour dire au peuple « vous voyez, vous gardez votre souveraineté. Il n’en est rien dans la réalité : à cause de Sarkozy, ce sont les marchés financiers, l’Allemagne et les Etats-Unis (voire le Qatar et autres émirats) qui décident bien souvent pour la France.

Le populisme est l’ennemi du Peuple. Il est admissible à petites doses surtout quand les électeurs ne sont pas vraiment dupes. Mais nous atteignons ici des sommets ! D'autant plus qu'il s'agit très probablement d'un leurre, l'annonce de référendum ne sera pas suivie d'effets.

Le recours au référendum à la manière de Sarkozy est non seulement personnel et intéressé mais aussi populiste, vu les sujets choisis.

L’objet de tout référendum est, pour le peuple, de toucher à un enjeu « essentiel à son destin » (Charles De Gaulle), à savoir : réforme de la constitution, intégration européenne, intégration ou séparation du territoire français de territoires particuliers, organisation des pouvoirs politiques ou des services publics, grands axes de la politique économique et sociale (voir la constitution de 1958). Ce n’est pas le cas ici. Par « essentiel à son destin », le général De Gaulle marquait bien l’idée d’un Peuple-Nation, c’est-à-dire moins marqué par ses contingences temporelles qu’embrassant autant le présent que le passé et l’avenir de notre nation. Il s’agit de lier le recours au référendum à l’idée de permanence et de durée, sans quoi son usage banalisé donnerait peu de légitimité aux réformes approuvées qui pourraient être défaites en peu de temps par la même voie…

La visée du référendum : il doit s’adresser à l’ensemble du peuple français et pas aussi ostensiblement à un électorat donné.

La justification du référendum : Ce mode d’expression ne doit être actionné que dans l’intérêt général du pays et pas dans l’intérêt d’un candidat. Je me demande dans quelle mesure son recours ne devrait pas être mieux réglementé en période de campagne d’élection nationale.

Nicolas Sarkozy piétine la constitution et le gaullisme pour défendre des intérêts particuliers. Il montre par là qu’il n’a jamais été le président de tous les Français ni le garant de la constitution.

En procédant ainsi et en radicalisant "à droite toute" sa tribune dans le Figaro magazine, Sarkozy a donné le coup de grâce aux gaulllistes, lesquels rejoignent aujourd'hui François Bayrou. "Il y a des députés qui n'ont pas envie d'être battus en criant "vive Sarkozy" comme on criait "vive le roi", a glissé Alain Lambert, président du conseil général de l'Orne, rallié à François Bayrou. Un autre rallié, Xavier Jaglin, ex-président des villepinistes du même département, affirme qu'une centaine de gaullistes ont rejoint le leader centriste dans son sillage. Le dernier en date : Florent Longuépée, ex-compagnon de route de Philippe Séguin.

Le référendum doit être préservé pour ne pas devenir un mode de gouvernement banal et ordinaire (ce qu'il n'est certainement pas dans notre constitution). Il doit constituer un des éléments-clés de la future "VIème République" où il sera employé comme un outil efficace pour renforcer le rôle des citoyens. Mais en attendant, nous sommes sous la Vème République, sa conception gaullienne doit prévaloir sans quoi la nature même du régime est bafouée ainsi que l'idée de démocratie à la française.


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